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Dominique de Villepin, intime, dans Gala

Dominique de Villepin en voyage à Amsterdam, à 17 ans (photo publiée dans Gala, en vente en kiosque à partir du 8 février)

Dominique de Villepin est multiple. Poète, capable de se laisser porter par le verbe, le voilà qui, potache, assis sur une chaise à l’envers rejoue la scène mythique de La grande vadrouille pour faire rire son fils, Arthur, qui l’accompagne. Il titille aussi le patron de la brasserie parisienne où il se pose pour Gala entre deux déplacements de campagne.

Après avoir débattu sur la meilleure façon de servir toute une liste de plats consistants, que ne renierait pas son ex-mentor Jacques Chirac, il lâche dans un sourire: « J’aime bien me mettre à table ». Cela tombe bien, nous allons le cuisiner.

Retrouvez dans ce billet l’intégralité de l’interview donnée par Dominique de Villepin à Candice Nédélec du magazine Gala.

Gala : Quels souvenirs gardez-vous de votre enfance de fils d’expatriés ?

Dominique de Villepin : Je suis né à Rabat. J’ai en tête la lumière extraordinaire du Maroc. Grandir à l’étranger permet de vivre davantage ensemble, de partager plus en famille. Nos journées étaient rythmées par la radio que nous captions en ondes courtes et qui nous donnait des nouvelles de France. Mon père, qui travaillait dans l’industrie, puis a été sénateur représentant des Français à l’étranger, se levait tôt et branchait le poste dès 6 heures du matin. A midi, il y avait la séance de lecture du courrier.

L’exil a donc forgé votre amour de la France ?

Ma mère veillait, par nos lectures, à nous faire aimer la langue française. Mon père, formidable conteur, nous décrivait l’Histoire de France comme une épopée. En fin d’année, à Caracas, on nous réunissait à l’école pour nous montrer des diapositives de tous les grands monuments français, on voyait alors les larmes des enfants couler. Les trois mois de grandes vacances étaient l’occasion pour nous de voir notre famille, nombreuse, qui vivait dans la Nièvre, en Bretagne, en Bourgogne… et de découvrir l’Hexagone.

Avez-vous, comme nombre de candidats à l’élection présidentielle, voulu très jeune devenir chef de l’Etat ?

J’ai eu très tôt la vocation. Etant issu d’une famille de militaires, je n’imaginais pas pouvoir faire un métier où l’on n’entre pas sous un porche où flotte un drapeau français !

Vous n’avez pourtant pas toujours été un élève modèle…

J’ai, en effet, connu la queue de classement. Enfant, je faisais beaucoup de sport : football, course à pied, natation, tennis. Je sais ce que c’est que d’être montré du doigt à cause de ses résultats scolaires, ou de se cacher derrière son cartable pour ne pas être interrogé. A quatorze ans, j’ai demandé à mes parents de m’inscrire en pension à Toulouse. J’ai alors obtenu des prix d’excellence, en ayant conscience que les premières places donnent plus de devoirs que de droits. Comme mes parents vivaient aux Etats-Unis, que j’étais fort en tête et que j’avais un style décontracté, mes camarades m’ont alors surnommé « l’Américain ».

Vous avez grandi aux côtés d’un frère aîné, Eric, qui souffrait d’épilepsie. En quoi cette maladie vous a-t-elle façonné ?

L’épreuve de la maladie d’un frère, c’est l’épreuve de la solitude. La maladie vous isole et crée l’incompréhension. Il faut apprendre à vivre en étant moqué, savoir ne pas avoir honte de ceux qu’on aime. C’est la première leçon que j’ai apprise à mes enfants.

Vous aviez dix-huit ans lorsque, à l’issue d’une sortie en mer avec votre frère, le coeur de ce dernier s’est arrêté alors qu’il prenait un bain chaud. Vous n’avez pas pu le ranimer. Comment avez-vous réussi à surmonter cette épreuve ?

J’ai été avec lui jusqu’au bout. Je me souviens être rentré aux Etats-Unis pour l’aider à préparer son bac. Il m’a appris l’humilité et à ne pas avoir peur. J’ai vu ce que c’était que de se battre à armes inégales. Tout est plus simple après, car on entre dans la vie dépouillé de beaucoup de choses inutiles. Il faut vivre intensément. Ca m’a rendu moins vulnérable aux attaques et a renforcé mon esprit d’indépendance.

A la sortie de l’ENA, vous avez choisi le Quai d’Orsay, cela vous a amené à quitter à nouveau la France pour vivre en Afrique, aux Etats-Unis ou en Inde. Des pays qui vous ont changé, dites-vous…

Partir est une chance supplémentaire d’aller chercher l’autre dans sa diversité, de repousser ses limites, de se nourrir de nouvelles questions. Les questions sont souvent plus importantes que les réponses, c’est pourquoi je ne fais pas partie des acides ou des satisfaits.

On vous décrit tantôt poète, tantôt chef d’escadron. Qui est le vrai Dominique de Villepin ?

Les deux, bien sûr ! La poésie sert à réinventer le monde, à sublimer l’ordre des choses, mais, à la façon militaire, j’ai le goût des choses crues, je n’ai pas peur de me coltiner le réel. Comme Rimbaud, je pense que les mots doivent être en avant de l’action. Il est important de creuser d’abord le sillon des idées.

A l’UMP, personne ne croyait à votre candidature à la présidentielle. « Il est fou, mais pas à ce point », nous répétait-on. Ce qualificatif n’a toutefois pas l’air de vous déranger plus que cela.

Venant de ceux qui l’emploient, c’est un hommage ! La politique est trop souvent quelque chose de prévisible. Je pense que cela doit rester une prise de risque, quelque chose à inventer, même seul, même dans des circonstances difficiles, il faut écouter cette petite voix intérieure, bousculer l’ordre des choses.

On vous surnomme parfois « l’épique en chef », on a l’impression que le drame ne vous déplaît pas !

L’épique est dans nos vies en permanence ! Enfant, je me souviens du bouillonnement de la décolonisation auquel j’assistais depuis la terrasse de mes parents en voyant défiler les troupes marocaines. Puis, un nouveau coup d’Etat a frappé le pays d’Amérique latine où nous vivions. Avec la crise économique, l’épique est là, à condition de pouvoir le voir. Nous vivons une époque extraordinaire et les hommes ne sont pas toujours à la hauteur des enjeux.

Croyez-vous à la métamorphose de Nicolas Sarkozy ?

Cinq ans après être devenu Président, c’est un peu tard. Sa façon d’être ne le prédispose pas à cela !

Alain Juppé a reconnu ne plus être le même après son procès. Quelles traces a laissé chez vous l’affaire Clearstream ?

J’ai toujours eu la conviction que la vérité l’emporterait. J’ai vécu cette épreuve comme un combat et je n’ai jamais baissé les bras. L’affection des miens m’a guidé. Il faut être capable de se ressourcer dans ces moments-là. Mes compagnons d’infortune, Paul Celan, René Char, Arthur Rimbaud ne m’ont jamais quitté non plus. Ils étaient tous avec moi.

Vous avez fait des pompes durant l’une de vos auditions, vous vous êtes physiquement préparé à cette épreuve, pourquoi était-ce aussi important ?

Je n’ai jamais autant couru que durant cette période-là ! Le sport, le défi individuel vous permettent de ne pas subir les choses, vous aident à faire face.

Vos enfants et votre épouse étaient à vos côtés le premier jour du procès pour faire valoir leur statut de victimes collatérales…

J’étais contre, mais ils ont insisté, je ne me suis pas senti le droit de leur refuser cette présence.

Votre épouse a évoqué, il y a quelques mois dans Gala votre séparation, due, selon elle à la dureté de la vie politique. Est-il impossible d’échapper à cette violence ?

La vie politique ne frappe heureusement pas tout le monde aussi sévèrement que nous l’avons été. Mais traverser ce genre d’épreuve est difficile, il faut savoir puiser au fond de soi pour résister. Et il n’y a pas chez l’entourage les raisons profondes qui, chez l’homme politique, l’ont conduit à l’engagement. Cela fait partie des douleurs de la vie. Il n’y a pas de protection possible.

Votre fille aînée, Marie, a pris un pseudonyme pour pouvoir mener plus sereinement sa carrière de mannequin et de comédienne, on croise parfois votre fils, Arthur, dans votre sillage. Sont-ils vaccinés contre la politique?

Mon fils s’intéresse à la politique, mais il n’est là que ponctuellement, car il vit en Chine. Ma fille aînée habite New-York et ma plus jeune fille au Brésil. C’est la mondialisation ! Ils sont globalement plus attirés par l’art et la culture que par la politique.

Vous qui avez fait l’éloge des voleurs de feu, ne pensez-vous pas, comme Rimbaud, que la vraie vie est ailleurs?

Je pense qu’on a plusieurs vies. Il faut savoir mener chacune d’elles jusqu’à se brûler. L’existence n’est pas à mes yeux quelque chose d’écrit, de monolithique. L’engagement public peut prendre plusieurs formes, comme l’humanitaire à l’autre bout du monde. La lumière n’est pas ce qui m’attire ou me retient. J’aime le mystère et la solitude. L’ombre m’irait très bien. J’aime trop la vie.

Source: Propos recueillis par Candice Nédélec (Gala, en kiosque à partir du 8 février)

6 Commentaires

  1. charles

    Le journal Gala :
    - je passe mon tour, je passe mon tour, je passe.
    ( c’est à vous d’en jouer Mr. Sarkozy.. les piques ou les trèfles ? )

  2. Tavi

    Merci! Est-ce que vous avez les autres photos?

  3. Miss Nicopéia

    Ce portrait ne rappelle-t-il pas un peu Rimbaud, par hasard?

    En politique:…écouter cette petite voix intérieure, bousculer l’ordre des choses, dit-il. Avec son expérience, son intelligence et ses bilans, il a les compétences nécessaires à bousculer l’ordre des choses dans le bon sens.
    Avec DDV, partout, toujours!

  4. charlotte

    COMME DDV a eu raison de rappeler a MME FERRARI qu’il n’était pas venu pour parler de NS mais pour parler de son programme,déja qu’il n’avait que peu de temps pour en parler!IL a aussi du faire rectifier une annonce fausse de PARIS MATCH de la semaine dernière qui prétendait qu’il était en instance de divorce alors qu’il a fait savoir que c’était faux!je me demande ce qu’il vont encore aller inventer!ET que dire des référendums de NS,c’est du grand n’importe quoi,et comme dit DDV les français devrait choisir a sa place,et ce serait quoi la question?il est vraiment temps de tourner cette page désastreuse.

  5. Sonatine

    QUI VA TOURNER CETTE PAGE DESASTREUSE !………… PERSONNE

  6. Yombock

    je me suis procuré le journal,quel reportage! Quelle sensibilité ! Si quel qu un souhaite l avoir je le lui envoie

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