Dominique de Villepin
envoyé par 20Minutes
L’ancien Premier ministre Dominique de Villepin est sur tous les fronts. Après avoir été relaxé le 28 janvier dans l’affaire Clearstream et avant le procès en appel qui aura lieu au printemps 2011, il a lancé, en juin dernier son propre mouvement, « République Solidaire ».
Alors qu’à droite chacun commence à prendre position pour la présidentielle, un sondage le donne même au coude à coude avec Nicolas Sarkozy. Des chiffres qui commencent à faire grincer quelques dents.
Dominique de Villepin, était l’invité de la rédaction de 20 Minutes le mercredi 22 septembre. Politique du gouvernement, retraite, roms, ambition politique, quid de son mouvement, une rampe de lancement pour 2012 à venir.
Monsieur De VILLEPIN, lorsque vous êtiez Premier Ministre, votre politique sociale en matière d’emploi s’est essentiellement limitée à essayer d’imposer par la force le CPE, c’est à dire un contrat de travail précaire et sous payé destiné aux jeunes de moins de 26 ans qui devait permettre aux employeurs de les licencier sans motif à n’importe quel moment durant deux ans. Mais la rue en a décidé autrement … Quelle est votre crédibilité aujourd’hui ? (FRANCIS10)
Ma crédibilité est celle d’un chef de gouvernement qui a réussi à inverser la courbe du chômage en créant 600.000 emplois avec la mobilisation de tous nos instruments et en particulier la création du contrat nouvelle embauche en direction des PME. Qu’il y ait eu des erreurs, vous avez raison, mais la réponse est dans l’action et dans la capacité à tirer des leçons de l’expérience. C’est ce que je veux faire à mon modeste niveau.
Mr de Villepin, une question très simple: en quoi la droite de Dominique de Villepin serait-elle différente de la droite de Nicolas Sarkozy? Pour vous, quels chantiers sont prioritaires en France? (la sécurité, l’éducation, la culture, le social…) (ANNELAURE)
J’appartiens à la famille gaulliste qui a toujours eu la conviction que la vérité était dans le rassemblement et non pas dans le recroquevillement sur soi. Pour cela, il faut 3 conditions: satisfaire à l’exigence de justice sociale, revenir à un équilibre institutionnel, défendre un esprit d’audace et d’innovation; C’est dire qu’il faut que le pouvoir s’ouvre aux réalités de la société alors qu’il a trop tendance à vivre coupé des réalités.
M. Le 1er Ministre, Je souhaiterai connaître votre position sur la dette publique française. En effet, celle-ci est extrêmement élevée et cela fait des années que la situation se détériore et la plupart des hommes et femmes politiques se contentent de critiquer cette situation de fait mais ne proposent rien afin d’y remédier. Certes l’accroissement de la dette publique ne peut être combattue que grâce à une croissance forte économique mais ne faudrait-il pas aussi essayer de diminuer les coûts de fonctionnements de la République ? Enfin, ne regrettez vous pas que cette question n’ait pas une place plus importante aujourd’hui dans le débat public? En effet, la France s’endette actuellement afin de rembourser ses intérêts d’emprunt, c’est économiquement ridicule comme situation, non? Merci d’avance et bon courage pour la suite. (CORTO)
J’ai engagé quand j’étais chef du gouvernement, avec Thierry Breton et Jean-François Copé, une action énergique pour réduire le déficit. Tout le problème aujourd’hui est de poursuivre cet effort tout en donnant toutes ses chances à la croissance. Je plaide donc pour un effort sur 10 à 12 ans, conjoint avec nos partenaires européens, qui permettra de trouver un chemin d’équilibre.
Bonjour monsieur, je considère que la réforme des retraites en l’état actuel est d’une abyssale inutilité et que ça n’est qu’une mise en scène maladroite de plus pour donner l’impression qu’on applique de grandes mesures importantes tout en prenant garde à ne surtout rien changer au vrai fond du problème. Partagez-vous ce sentiment? Avez vous également l’impression que c’est un scénario qu’on nous rejoue un peu trop régulièrement dans cette parodie de gouvernement? (Backtoroots)
Malheureusement, le projet en l’état ne peut valoir que jusqu’en 2018. Il fait suite à la réforme de 1993, de 2003 et 2007, c’est pourquoi je pense que nous avons une occasion historique en prenant en compte l’exigence de justice de faire une réforme non pas partisane au service de l’UMP mais pour tous les Français.
Bonjour M.de VILLEPIN, pensez vous que l’on est toujours crédible quand on a été au centre de l’affaire Clearstream et que l’on souhaite revenir sur le devant de la scène politique ? Pensez vous que les français ont si rapidement oublié cet épisode ? (Missile)
La vie politique n’est pas un long fleuve tranquille. Le fait d’avoir été victime d’attaques et de rumeurs fait partie de la légitimité et de l’expérience indispensable à toute action politique. C’est dans cet esprit de résistance que se forgent à la fois la conviction et l’ambition d’un destin.
Vous avez lancé votre propre parti politique, vous fustigez régulièrement l’action de Nicolas Sarkozy, mais vous conservez votre carte de l’UMP. Pour quelle raison ? On a du mal à comprendre et vos supporters sont désorientés. Certes, sans doute souhaitez vous marquer ainsi la différence qu’il y a entre un parti, en l’occurrence l’UMP, auquel vous adhérez toujours dans les idées et le président de la République lui-même? (Aristide71)
J’ai fait partie de ceux qui ont participé avec Jacques Chirac et Alain Juppé à la création de l’UMP. Ce n’est pas parce que ce parti connaît aujourd’hui une dérive regrettable qu’il faut baisser les bras. J’entends donc mener mon combat à l’intérieur comme à l’extérieur avec République Solidaire, qui est un mouvement totalement indépendant.
Monsieur le ministre, n’avez vous pas peur dans l’hypothèse ou vous seriez candidat a l’élection présidentielle en 2012 de diviser la droite et de voir ainsi ressurgir le spectre de 2002 qui pourrait cette fois ci se transformer au second tour en un duel opposant Marine Le Pen face à un ou une candidate socialiste? (lami-du-peuple)
Je suis convaincu que ce n’est pas le sujet aujourd’hui. La question n’est pas la division de la droite mais celle de sa fidélité à des valeurs essentielles. L’intérêt ne peut être le moteur de la politique et là dessus, je ne transigerai jamais.
Bonjour M. De Villepin, on dit toujours qu’il est prudent de surveiller ses ennemis. Dans l’hypothèse où le président Sarkozy vous appelle au prochain remaniement, comment réagiriez-vous ? Bien que de droite, vous êtes plus chiraquien que sarkozyste, comment qualifiez-vous les agissements de Nicolas Sarkozy? Le dossier des retraites, l’expulsion des roms, quelle aurait été votre politique ou du moins votre façon d’amener le débat ? Dans le schéma politique actuel, où se trouve République solidaire ? Au printemps 2011, le procès Clearstream s’ouvre en appel ? Pensez-vous que Nicolas Sarkozy usera de toutes les voies judiciaires pour vous empêcher de vous présenter à la Présidentielle? Dernière question: 2012 c’est demain. Qu’est-ce qui me ferait voter pour vous ? Respectueusement votre. (Leroy+Jethro+Gibbs)
J’ai d’emblée indiqué mon refus de toute nouvelle responsabilité ministérielle, dès lors qu’il n’y avait pas un profond changement de politique. Je crois à l’exigence de rassemblement et de compromis pour servir l’intérêt général. Je crois aussi à la nécessité d’être fidèle à nos principes républicains qui ne peuvent pas à mon sens être instrumentalisés comme on le voit trop souvent aujourd’hui à des fins partisanes Enfin, dans le dossier Clearstream, j’ai eu à faire face à nombre de manipulations et d’instrumentalisations et compte tenude l’enjeu, je suis convaincu que certains n’hésiteront pas à persévérer dans la même voie.
Bonjour Monsieur de Villepin, pourquoi avez-vous piteusement reculé avec le CPE? est-ce le Président Chirac qui vous l’a demandé? Bruno Julliard était-il le vrai Premier Ministre à l’époque? au passage, pensez-vous que le Président Sarkozy se soit servi de Monsieur Julliard pour vous, permettez-moi l’expression, torpiller comme il se dit ci et là? Cordialement. (TeaParty)
A l’époque mon gouvernement a fait face à une double opposition, celle de la rue bien sûr, eff
rayée par la mise en place d’un nouveau dispositif que je n’avais sans doute pas eu le temps suffisamment d’expliquer, mais aussi par l’opposition d’une large partie de ma majorité, conduite par Nicolas Sarkozy, qui n’a pas hésité à saborder ce projet en prenant langue avec certains responsables syndicaux, dont Bruno Julliard. Je veux tirer les leçons de cet échec. Une bonne réforme est une réforme juste et bien comprise par tous.
Je pense que nombreux sont les Français qui voient en vous un recours. Nombreux sont également ceux, venus d’horizons divers, qui seraient prêts à s’engager derrière vous. Mais nombreux sont également ceux qui hésitent à accorder leur confiance à une classe politique, qui de gauche comme de droite, n’a en vue que des ambitions personnelles et non l’intérêt de la France. Nous aimerions vous faire confiance. Mais irez-vous au bout de votre démarche? Nous ne voulons plus de ces accords politiciens de dernières minutes. Enfin, Monsieur de Villepin, parce que j’en ai l’occasion, encore merci pour votre discours à l’ONU… (Marcel)
Merci de votre message qui me touche. Vous avez raison, l’ambition personnelle est un frein pour la classe politique. C’est pour cela que je souhaite rassembler très largement autour de principes communs ainsi qu’autour d’un projet de société. Ma conviction c’est que celui ou celle qui pourra incarner ce projet s’imposera de lui même le moment venu.
Bonjour, pensez vous que la nouvelle loi sur les retraites soit juste (notamment pour les femmes (carrière courte) et les travaux pénibles) ? Ne pensez vous pas que la suppression de toutes les exonérations seraient un meilleur choix et que celui-ci libérerait aussitôt les fonds nécessaires (surtout si l’on constate que + 70 % des exonérations profite aux grands groupes dégageant de gros profit (prendre total et BNP). (Reflechi)
La réforme des retraites est nécessaire mais le projet actuel ne satisfait pas encore à l’exigence de justice. De ce point de vue, je n’accepte pas le passage de la retraite à taux plein de 65 ans à 67 ans parce qu’il pénalise les plus précaires et notamment les femmes. 50% d’entre elles seront amenées selon ce projet à travailler jusqu’à 67 ans.Pour trouver le financement nécessaire (6milliards), il me parait souhaitable de solliciter les Français les plus aisés, sachant que le projet actuel ne fait passer la dernière tranche d’impôt sur le revenu que de 40 à 41%.
Comment la droite modérée se sent-elle face à cette droite dure, nauséabonde qui gouverne ce pays depuis 2007. (Lafayette)
Il y a un durcissement de la droite au pouvoir qui ne m’apparaît pas conforme à l’intérêt de notre pays. D’où, pour moi, la nécessité d’un rassemblement qui puisse réunir les Gaullistes, les centristes, les radicaux, les démocrates chrétiens et sociaux pour proposer une alternative aux Français.
Source: 20 Minutes – Charles Dufresne