« Le sort réservé à Sakineh Mohammadi Ashtiani suscite chez nous tous aujourd’hui une profonde émotion et un légitime sentiment d’indignation devant un châtiment cruel et inhumain.
Je sais combien ce visage de haine et de cruauté n’est pas le visage véritable de l’Iran. J’ai été en Iran à plusieurs reprises. J’ai marqué mon estime et mon respect pour un peuple et une culture qui a marqué l’histoire du monde. J’ai parlé de la place de l’Iran dans le monde d’aujourd’hui avec des intellectuels iraniens, des responsables économiques iraniens ainsi que des responsables économiques locaux et nationaux, avec le président Ahmadinedjad, avec le Guide Suprême Ali Khamenei, avec le président du parlement iranien, le Majlis, Ali Laridjani, le ministre des affaires étrangères Mottaki, soucieux de leur faire partager ma conviction que l’Iran et la communauté internationale ont tout à gagner à s’engager sur la voie du dialogue.
L’enjeu aujourd’hui, c’est d’avancer ensemble dans une société internationale bâtie sur le respect, dans laquelle l’Iran a toute sa place et tout son rôle à jouer. Refusons, partout, les logiques de bouc-émissaires, les stigmatisations, la haine.
Aujourd’hui, l’Iran dans un Moyen Orient divisé, meurtri doit entrer dans l’âge des responsabilités, non seulement par rapport à son peuple, mais par rapport à ses voisins, aux autres peuples du monde. Et il doit pour cela compter sur l’accompagnement de la communauté internationale s’il cherche à manifester sa bonne volonté et son aspiration au changement. Nous voulons croire en l’Iran, en dépit des reculs auxquels nous avons assisté au cours de l’année passée, en l’esprit de paix et de tolérance retrouvé dans un pays qui a porté bien des Lumières aux mondes dans sa longue histoire.
L’Iran est devant un choix et doit en prendre conscience, face aux nombreuses réactions qui se font entendre à travers le monde. C’est un choix entre la lumière, une société qui donne une place à chacun, ou le retour en arrière, la barbarie, la division, le triomphe de la force sur le droit. Aujourd’hui la lapidation de Sakineh Mohammadi Ashtiani serait le tribut versé pour le combat d’un autre âge, car Sakineh est le visage de beaucoup d’autres femmes et hommes. Tous les efforts de la communauté internationale doivent être faits pour accompagner l’Iran sur la voie du progrès, en dépit des retards et reculs de l’année écoulée. Prendre en compte cette indignation mondiale et accorder un traitement humain à Sakineh serait aujourd’hui un geste fort du pouvoir iranien sur la voie du dialogue. Nous voulons croire que les indications du gouvernement iranien réservant la décision peuvent être un pas en ce sens. »
Dominique de Villepin, ancien premier ministre, président de République Solidaire.