Il y eut la génération sacrifiée en 1914-18. Aujourd’hui la crise risque de créer une « génération perdue », prévient le Bureau international du travail (BIT). Le chômage des 15-24 ans a atteint un niveau record de 81 millions de personnes dans le monde, soit un taux de 13% en 2009, selon l’organisation internationale. Et « le niveau devrait encore augmenter » jusqu’à 13,1% en 2010, selon les auteurs du rapport sur l’emploi des jeunes.
« Les jeunes gens sont le moteur du développement économique », a estimé le directeur général du BIT Juan Somavia. « Renoncer à ce potentiel est un gâchis économique qui peut saper la stabilité de la société. » Car, ajoute-t-il, ce chômage de masse risque de faire perdre tout espoir à cette génération d’obtenir un travail.
« Les portes se ferment »
La motivation n’est pas en cause. Ces jeunes « font toutes les démarches, mais les portes se ferment devant eux », plaide Sarah Elder, co-auteur de l’étude. Résultat, l’impact de la crise sur cette génération se traduit également « par des troubles sociaux qui vont de pair avec le découragement et l’inactivité prolongée », écrit le BIT.
L’inactivité des jeunes a aussi un coût considérable, celui des opportunités manquées. « Les sociétés perdent leur investissement dans l’éducation », s’alarme le BIT. De plus, « les États manquent de contributions aux régimes de sécurité sociale tout en étant contraints d’augmenter les dépenses d’aide sociale. »
Dans le détail, les jeunes femmes sont plus touchées que les jeunes gens, avec un taux de chômage de 13,2% pour les premières, contre 12,9% pour les seconds. A l’exception des économies développées et de l’Union européenne: entre 2007 et 2009, le taux de chômage chez les jeunes hommes a augmenté de 6,8 points, celui des jeunes femmes de 3,9 points. Aux Etats-Unis, le chômage des jeunes atteint 18%, contre 17,7% dans les « économies développés et l’Union européenne ».
Reprise plus lente chez les jeunes
« La reprise attendue devrait être plus lente chez les jeunes que chez les adultes », selon le rapport. Alors que le taux de chômage des adultes a atteint un pic en 2009, à 4,9%, celui des 15-24 ans ne devrait baisser qu’à partir de 2011. Et encore, pas dans toutes les régions. Au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, le chômage devrait continuer à augmenter en 2011.
Pour secourir cette génération, le BIT demande aux gouvernements de maintenir les programmes de retour vers l’emploi, malgré les tours de vis nécessaires pour redresser les finances publiques. Il y a urgence, prévient le BIT: « L’incapacité à trouver un emploi génère un sentiment d’inutilité et de désoeuvrement parmi les jeunes qui peut provoquer une hausse de la criminalité, des problèmes mentaux, de violence, de conflits et de drogue ».
Source: Guillaume Guichard (Le Figaro)