A suivre ce weekend, les articles de presse consacrés à la journée du 19 juin…
Première partie: les enjeux du 19 juin vus par la presse.
Le Monde (Pierre Jaxel-Truer): C’est à Nicolas Sarkozy que Dominique de Villepin prendrait le plus de voix
Quel électorat peut séduire Dominique de Villepin, s’il se présente à l’élection présidentielle de 2012 ? A deux ans de l’échéance, toute réponse figée est bien évidemment prématurée. Mais des pistes, déjà, se dégagent, alors qu’il s’apprête à lancer son mouvement, samedi 19 juin, à Paris.
Jérôme Fourquet, le directeur adjoint du département opinions de l’IFOP, a réuni les résultats de quatre études sur les intentions de vote en 2012, parues lors des quatre derniers mois, pour composer un panel de sondés d’environ 4 000 personnes. Y sont testées les hypothèses Nicolas Sarkozy (UMP), Martine Aubry (PS), Cécile Duflot (Europe écologie), Marine Le Pen (FN), François Bayrou (MoDem), Nicolas Dupont-Aignan (DLR) et, donc, Dominique de Villepin.
Il en ressort que l’ancien premier ministre de Jacques Chirac est crédité d’environ 7 % des intentions de vote. Soit à peine moins que M. Bayrou, qui oscille entre 8 % et 9 %. La cote de M. de Villepin varie peu en fonction des âges, même s’il séduit un peu plus les jeunes entre 25 ans et 34 ans, où il obtient un score de 10 %.
M. de Villepin plaît particulièrement aux artisans et aux commerçants, dont il obtient 11 % des intentions de vote. Il obtient 9 % chez les professions libérales et les cadres supérieurs, 8 % chez les professions intermédiaires, 10 % chez les employés, 5 % chez les ouvriers et 6 % chez les retraités.
M. de Villepin attire 10 % des électeurs qui ont donné leur voix à M. Bayrou en 2007, 8 % de ceux qui ont voté pour M. Sarkozy, mais seulement 4 % de ceux qui se sont prononcés pour Ségolène Royal et 3 % de ceux qui ont soutenu Jean-Marie Le Pen. « Au-delà des pourcentages, en nombre de voix, c’est donc à Nicolas Sarkozy que Dominique de Villepin prend le plus de sympathisants », note M. Fourquet. Il observe aussi que « si l’on additionne les intentions de vote pour François Bayrou et Dominique de Villepin, l’on obtient 15 % à 16 %, soit un score pas très éloigné de celui de François Bayrou en 2007, qui s’élevait à 18,5 % des suffrages ».
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Le Monde (Pierre Jaxel-Truer): Dominique de Villepin se prépare à lancer son parti
Dans les rangs de l’UMP, beaucoup veulent encore croire que le divorce n’est pas irrémédiable. Que Dominique de Villepin, en dépit de son affrontement avec Nicolas Sarkozy, symbolisé par le procès Clearstream, ne partira pas en solitaire dans une course à la présidentielle de 2012. Qu’il est encore possible, à droite, de s’éviter les dégâts d’une lutte fratricide. Même si le combat entre les deux hommes paraît de force inégale, il n’y a, jugent-ils, que des plumes à y perdre.
Ces optimistes de la cause de l’union risquent, samedi 19 juin, de frémir. Dominique de Villepin se prépare à lancer son parti, nommé République solidaire, à la Halle Freyssinet, dans le 13e arrondissement de Paris, avec un discours musclé. Il sait qu’il ne peut compter sur beaucoup d’élus. A peine une poignée de députés.
Mais il veut croire à un engouement populaire, après ses nombreux déplacements médiatisés en banlieue ou en milieu rural. Il espère que près de 3 000 personnes viendront l’écouter, dans son show dont il a réglé les détails personnellement. « C’est la joie du patron de PME, que ne connaît plus celui d’une multinationale », s’amuse-t-il.
Deux jours avant le lancement de son mouvement, l’ancien premier ministre de Jacques Chirac a accepté de rencontrer Le Monde, dans ses bureaux parisiens d’avocat d’affaires de l’avenue Foch, à deux pas de l’arc de Triomphe.
S’il assure qu’il n’a « aucune rancune » vis-à-vis de M. Sarkozy, il pourfend sa politique. Il veut, dit-il, « rassembler les orphelins de la République », ceux qui sont « déçus par la politique ». « C’est la moitié de la France », estime-t-il.
Pour M. de Villepin, le chef de l’Etat mène une « politique professionnelle de spécialistes de l’opinion qui, tous les jours, regardent les sondages et se demandent où il y a un coup à jouer », une politique de « la surenchère sécuritaire », de « la stigmatisation », des « atteintes aux libertés ». Bref, l’heure est grave.
L’ancien premier ministre, qui ne rendra pas sa carte de l’UMP – « il n’y a aucune raison qu’il le fasse, sauf s’il est exclu », estime la présidente du Club Villepin, Brigitte Girardin –, assure que son combat n’obéit à aucune ambition personnelle, mais à « l’intérêt national », et qu’il n’est pas intéressé par « un maroquin » ou « une fonction politique quelconque ».
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Le Télégramme (Hubert Coudurier): L’exécuteur
Dominique de Villepin lance aujourd’hui son parti, lequel suscite déjà une forte curiosité des observateurs politiques. Certes, beaucoup dans la majorité raillent la démarche de l’ancien Premier ministre et ironisent sur le thème: «S’il se déclare candidat à la présidentielle, Villepin ne fera pas plus que Marie-France Garaud en son temps». Et l’entourage du chef de l’Etat s’interroge sur la nécessité qu’il y aurait à créer un parti quand un simple club aurait suffi. Pour autant, selon les proches de Villepin, plus de 5.000 personnes se seraient inscrites pour le lancement aujourd’hui de ce nouveau mouvement politique. Preuve que sans pouvoir parler de tsunami, le dernier chef du gouvernement de Jacques Chirac ne laisse pas indifférent.
D’ailleurs, si tel était le cas, pourquoi l’Elysée aurait-il pris le soin de faire rentrer au gouvernement des villepinistes notoires, comme Bruno Le Maire ou Georges Tron. Sans parler, dans la perspective du remaniement de l’automne, des espoirs d’Hervé Mariton, qui semble s’éloigner de Villepin, dont il ne rejoindra pas le nouveau mouvement. Le député-maire de Vannes, François Goulard, que Nicolas Sarkozy recevait récemment, est pour l’instant fidèle au poste, en dépit de certaines divergences, notamment sur la fiscalité. Car Goulard demeure un libéral à tous crins, quand Villepin semble désormais vouloir braconner sur les terres de la gauche abandonnées par François Bayrou, auquel Nicolas Sarkozy pourrait bien avoir donné le baiser qui tue.
Toutefois, s’il ne reste que le Finistérien Jacques Le Guen, au fond quelle importance? De Gaulle n’était-il pas seul à Londres pour incarner la Résistance? C’est un fait, les Français font et défont les présidents au gré de leurs humeurs. Outre qu’ils n’ont jamais supporté le style de Sarkozy, qui n’a pourtant pas démérité, ils pourraient bien faire payer la facture de la crise au sortant. Et se servir ainsi de Villepin comme d’un exécuteur.
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Le Figaro (Jim Jarrassé): Financer son parti, la nouvelle bataille de Dominique de Villepin
Avec le lancement officiel de son parti politique, l’ancien premier ministre espère récolter les dons de ses partisans.
«Une rencontre avec un homme et un peuple», «une journée qui va changer le destin de la France», «un rendez-vous historique»… Les proches de Dominique de Villepin ne lésinent pas sur les superlatifs pour décrire le très symbolique «appel du 19 juin» de leur mentor. Les espoirs sont en effet immenses chez ces parlementaires qui n’ont pas hésité à s’éloigner du giron de la majorité présidentielle pour soutenir l’ancien premier ministre. «La création de notre mouvement symbolise le début d’une nouvelle ère avec l’envie d’occuper la scène politique», explique le député du Finistère Jacques Le Guen. L’objectif, plus personne ne s’en cache : une candidature de Dominique de Villepin à la présidentielle de 2012.
Le discours est rôdé et les ambitions bien réelles. Reste une inconnue de taille. Le nerf de la guerre, diront certains : l’argent. En 2007, Nicolas Sarkozy et Ségolène Royal ont chacun dépensé 20 millions d’euros pour l
eur campagne. Construit sur les fondations de l’ancien club Villepin, le nouveau mouvement de l’ancien premier ministre bénéficie pour l’instant de ressources très limitées. Le Club, présidé par Brigitte Girardin, ministre déléguée à la Coopération de Dominique de Villepin, a ainsi dû se contenter de bénévoles pour organiser la journée de samedi. «Nous nous finançons uniquement grâce aux cotisations de nos 15.000 adhérents», explique la présidente. Un pécule suffisant pour payer les quelques déplacements de Dominique de Villepin et le réseau social Villepincom, qui a coûté 15.000 euros. Mais pas question de rémunérer des salariés pour mieux gérer l’association ou de prévoir des transports pour acheminer les militants à la halle Freyssinet pour le lancement du mouvement. «On en a pas les moyens», reconnaît le député Jean-Pierre Grand, responsable du maillage territorial du club. A tel point que certains s’en agacent. A l’instar de Jacques le Guen, qui reconnaît «un démarrage difficile dû à des moyens pas suffisants pour promouvoir nos idées.»
La transformation de l’association en parti politique pourrait sur ce point changer beaucoup de choses. Outre les cotisations, le mouvement de Dominique de Villepin va désormais pouvoir recevoir des dons, à hauteur de 7.500€ maximum par personne, qui donnent droit à une réduction d’impôts. «Beaucoup de nos sympathisants attendaient cette déduction fiscale pour donner», explique Brigitte Girardin. Reste à savoir si le mouvement saura se trouver un mécène à l’image de Pierre Bergé, bienfaiteur en 2007 des Désirs d’Avenirs de Ségolène Royal. La solution pourrait venir de Dominique de Villepin lui-même, qui a repris depuis la fin du procès Clearstream son activité d’avocat d’affaire. Depuis 2008, l’ancien premier ministre noue des contacts avec des clients prestigieux, parmi lesquels Alstom ou Veolia. Henri Proglio, président de Veolia, n’a jamais définitivement coupé les ponts avec Dominique de Villepin. Il est d’ailleurs l’un des seuls à prétendre pouvoir rapprocher Sarkozy et Villepin.
«Mission impossible», répondent en chœur les villepinistes. Entre les deux camps, la rupture semble consommée. Au point que certains, à l’instar de Jean-Pierre Grand, pourraient menacer de démissionner du groupe UMP à l’Assemblée. Un pas qu’a déjà franchi le député de Gironde Daniel Garrigue, lui aussi proche de l’ancien premier ministre. De là à penser à la création d’un groupe de villepinistes indépendants à l’Assemblée, il n’y a qu’un pas qui ne saurait être franchi pour le moment. Reste que cette émancipation est l’une condition sine qua none à l’obtention de subventions publiques, qui reste de loin la piste de financement la plus lucrative pour les partis politiques : chaque année, l’Etat partage un gâteau de 70 millions d’euros entre les partis en fonction de leur représentation au Parlement. Si les villepinistes restent sous le giron du parti présidentiel jusqu’aux législatives de 2012, l’argent ira directement à l’UMP. A charge ensuite au parti présidentiel de reverser une partie de ces aides aux villepinistes, comme il le fait par exemple avec le parti radical ou le Parti Chrétien Démocrate de Christine Boutin. «Ca n’est pas envisagé pour le moment», répond-t-on sans ambages à l’UMP.
«De toute façon, ça n’est pas le but premier de notre mouvement», relativise Jean-Pierre Grand. Dans l’écurie présidentielle Villepin, qui n’investira pas de candidat aux sénatoriales, l’objectif n’est en effet pas de durer à l’Assemblée, mais de gagner à l’Elysée. Et pour cela, les villepinistes assurent à qui veut l’entendre que l’argent n’est pas primordial. «L’important c’est pas combien on en a mais comment on l’utilise», s’amuse Brigitte Girardin. «Notre site qui fonctionne très bien nous a coûté 15.000 euros. Celui de l’UMP ne marche pas et a coûté 500.000 euros… » Bénévolat, système D… «C’est l’esprit de Dominique de Villepin qui rejaillit. Il veut vivre cette aventure avec simplicité, sans apparatchiks qu’on achète». Mais à l’épreuve de la réalité, les villepinistes pourraient bien s’endetter. En croisant les doigts pour réunir en 2012 les 5% nécessaires au remboursement des frais de campagne.
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France Soir (Christine Ollivier): Dominique de Villepin prend son élan et s’élance
Ambiance un brin paranoïaque chez les amis de Dominique de Villepin. Pour le lancement aujourd’hui à la Halle Freyssinet (Paris, XIIIe) de son mouvement – dont le nom, encore mystérieux, devrait associer les mots « République » et « solidarité » – les organisateurs ont prévu un groupe électrogène de secours. Au cas où.
Il y a quelques jours, il est vrai, l’ancien Premier ministre avait pris la plume pour dénoncer des « entraves, pressions et manœuvres » destinées, selon lui, à « empêcher la naissance » de son parti politique. Son entourage évoque des attaques informatiques contre le site Internet du Club Villepin, et des contrôles d’identité subis par des militants distribuant des tracts.
Facteur aggravant : plusieurs députés villepinistes – Marie-Anne Montchamp, François Goulard, Guy Geoffroy, Hervé Mariton – ont été récemment reçus par Nicolas Sarkozy à l’Elysée. Le député UMP Jean-Pierre Grand hausse les épaules : « Tout cela est maladroit et sans influence. Cela dénote un peu de nervosité et beaucoup d’inquiétude » du côté du parti présidentiel, estime-t-il. Après la défection de Georges Tron entré au gouvernement en mars, Hervé Mariton a annoncé, à son tour, qu’il ne rejoindrait pas le nouveau parti.
Les villepinistes n’ont pas apprécié non plus le très médiatique déjeuner de mardi entre Nicolas Sarkozy et Jacques Chirac, le mentor de leur champion. « Nous sommes très attentifs à ne pas instrumentaliser l’ancien président », souligne la porte-parole du nouveau parti, Marie-Anne Montchamp. Mais, ajoute-t-elle, « le président Chirac n’ignore rien de ce qui va se passer ».
Au programme de ce rassemblement, où sont attendus quelque 3.000 sympathisants : témoignages de Français, DJ, et un discours de trois quarts d’heure de Dominique de Villepin. Faute de moyens, chaque militant a payé lui-même le déplacement. « Nous, on n’est pas une formation politique avec des shows et des chéquiers !, lance Marie-Anne Montchamp. Cela tient plus de la fête de famille. » Une famille recomposée : « Dominique de Villepin, c’est le métro à 18 heures, assure Jean-Pierre Grand. Il rassemble des UMP déçus, des socialistes inquiets, beaucoup de centristes en quête d’une autre voie et des Français qui n’adhèrent à aucun parti. »
Mais une famille restreinte, aussi. Si les responsables du mouvement espèrent que les 15.000 adhérents revendiqués par le Club Villepin migreront naturellement – contre une cotisation de 20 € – vers le nouveau parti, l’ancien Premier ministre ne peut encore s’appuyer que sur une poignée de fidèles. « Le président Chirac disait : une campagne présidentielle, ça se fait à à quatre ou cinq », rétorque Marie-Anne Montchamp, qui table sur l’armée des déçus de la politique. « Lors des régionales, 53 % des Français, en s’abstenant, ont claqué la porte de la République », rappelle-t-elle.
Une fois son mouvement lancé, Dominique de Villepin continuera donc à sillonner le pays, et à épingler Nicolas Sarkozy. Crédité de 7 à 8 % d’intentions de vote par les sondages, il espère incarner une « alternative » à la présidentielle de 2012, du moins si le procès en appel de l’affaire Clearstream ne le fait pas trébucher au printemps 2011. Mais la route, il le sait, sera longue. Selon un sondage Ifop pour Paris-Match publié mardi, seuls 18 % des Français pensent que Dominique de Villepin ferait un bon président de la République. Même si
49 % ont de lui une « bonne opinion ».
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Le Télégramme (Bertrand Le Néna): Interview de François Goulard
À part vous et le Finistérien Jacques Le Guen, aucune autre personnalité politique de Bretagne ne se joint à vous. Combien y a-t-il de militants villepinistes dans l’Ouest?
Le nombre n’est pas encore considérable, mais ce premier meeting, où nous serons peut-être 5.000, montrera que la démarche de Villepin intéresse les Français, l’électorat en déshérence entre la droite incarnée par Sarkozy et le PS qui a pu voter Bayrou, le démocrate-chrétien, en 2007 et qui découvre l’alternative Villepin, d’inspiration gaulliste.
Est-ce une alternative à Sarkozy ou un tir de barrage pour empêcher sa réélection en 2012?
Il est hors de question pour nous de favoriser l’élection de quelqu’un ou quelqu’une qui ne porterait pas nos idées! L’essentiel de notre action ne sera plus dans la critique, bien que légitime, ou les querelles personnelles, mais dans la construction de notre projet, notamment sur la question des retraites qu’évoquera Dominique de Villepin aujourd’hui. Lorsque j’ai été reçu récemment à l’Élysée par le président Sarkozy, le ton n’était ni à l’agressivité, ni à la polémique. En 2007, Sarkozy représentait une alternative nouvelle; en 2012, c’est Villepin qui sera la nouveauté dans cette élection fondatrice, assez ouverte et forcément difficile pour la droite compte tenu du contexte.
Le mouvement République Solidaire va-t-il s’organiser en parti avec des fédérations et participer à toutes les élections?
Non, notre mouvement ne sera pas un parti classique. Nous n’allons pas présenter des candidats aux prochaines cantonales par exemple. République Solidaire ne fera pas partie de l’UMP mais la double appartenance au mouvement et à l’UMP ou au MoDem sera tout à fait possible. Moi, je reste à l’UMP.
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Le Figaro (Jean-Baptiste Garat): Dominique de Villepin lance son parti et prend date pour 2012
A la Maison de l’Amérique latine, en octobre, ils étaient un millier. Trop nombreux pour les petits salons que Brigitte Girardin, présidente du Club Villepin, avait loués. Samedi après-midi, 2.500 personnes sont attendues à la Halle Freyssinet, à Paris, pour le lancement du «mouvement» qui doit porter Dominique de Villepin jusqu’en 2012. Un mouvement et pas autre chose. «Nous avons déjà un club et, même s’il en aura les statuts, ce ne sera pas à proprement parler un parti», témoigne un proche.
Pour ce grand rendez-vous, Villepin a personnellement supervisé tous les détails. Le choix du nom, bien sûr. C’était, mercredi, la grande question à trancher pour envoyer les consignes aux imprimeurs de tracts, d’affiches et autres «goodies». Dominique de Villepin s’en réserve l’annonce samedi après-midi, mais «La République solidaire», pour laquelle il avait plaidé en mars, est l’hypothèse qui tient la corde. Le logo devrait décliner les couleurs du drapeau national.
Côté festif, des danseurs freestyle seraient de la partie. En clin d’œil aux banlieues que Villepin prend soin de valoriser lors de ses déplacements. Un adhérent sur cinq de son club (sur les 15.000 revendiqués) seraient issus des quartiers. «Beaucoup de nos adhérents n’avaient jamais été encartés dans un parti, explique la députée Marie-Anne Montchamp, promue porte-parole. Nous souhaitons que cette journée soit autant l’occasion d’une fête qu’un moment de rencontre pour la petite société que nous formons.»
Ceux qui viennent entendre Dominique de Villepin parler politique ne seront pas en reste. «Il prépare un très grand discours», assure son entourage. Certains parient même qu’il sera «virulent», sans doute son plus dur sur la politique menée par Nicolas Sarkozy. «Si Dominique lance son mouvement le 19 juin, ce n’est pas tout à fait un hasard, glisse le député François Goulard. Notre mouvement s’inspire directement du gaullisme. C’est bien cela qui rend nerveux certains.»
Tous les parlementaires villepinistes ont ainsi été sollicités par l’Élysée. «J’ai rencontré Sarkozy la semaine dernière à sa demande», raconte Goulard. Son collègue Guy Geoffroy confirme : «J’ai été reçu pendant 40 minutes. Il ne m’a pas parlé de Villepin, ne m’a rien demandé, rien proposé.» «Moi, Sarko ne m’a pas proposé de portefeuille», assure Jean-Pierre Grand, qui estime que ces entretiens «prouvent qu’il y a de l’affolement à l’Élysée». «Ils essaient de retourner ses amis. Cela ne l’arrêtera pas !» assure l’élu de l’Hérault.
Villepin n’abandonnera pas son combat, ils sont de plus en plus nombreux à le penser. Jean-François Copé, avec qui il a déjeuné «juste après les régionales», estime «qu’il veut y aller». «Maintenant, il faut espérer que ça ne nous fasse pas perdre !» philosophe le patron des députés UMP. D’autres jugent que le temps joue contre l’Élysée. «Il ne faut pas attendre la dernière minute pour faire des gestes d’apaisement. Il ne faut pas pousser les gens au crime», prévient Bruno Le Maire, ministre de l’Agriculture. Quels gestes ? «Villepin ne veut pas être ministre. Il veut du respect et de la considération», assure son ancien bras droit.
Dans cette perspective, le 19 juin donnera de bons indices sur la motivation de Villepin. «Soit il donne le sentiment d’ouvrir une réflexion critique sur sa famille politique et, là, on reste dans les clous, expliquent ceux qui le connaissent bien, soit il annonce qu’il sera candidat – c’est ce qui se profile – et c’est game over.»
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Associated Press: Dominique de Villepin lance samedi son mouvement politique
Après l’appel du 18 juin, l’appel de Villepin. Entre deux procès Clearstream, Dominique de Villepin lance samedi après-midi à Paris son mouvement politique, une possible base pour 2012 pour le meilleur ennemi de Nicolas Sarkozy.
Entre 2.000 et 3.000 personnes, ainsi que 250 journalistes sont attendus à ce grand « rassemblement fondateur » à la Halle Freyssinet, dans le XIIIe arrondissement, selon son service de presse. Le toujours lyrique Dominique de Villepin devrait prononcer un discours d’une bonne heure à partir de 16h.
A 56 ans, le fringant gaulliste, ancien diplomate et poète à ses heures, entend fonder un « mouvement politique libre et indépendant ». Une nouvelle étape pour l’ancien Premier ministre de Jacques Chirac, qui se pose en plus grand opposant de Nicolas Sarkozy, ne ratant pas une occasion de fustiger l’ »échec » de la politique de la majorité.
Celui auquel ses adversaires aiment rappeler qu’il n’a jamais été élu assure ne pas vouloir « défendre une ambition personnelle », mais « une vision, un projet et une conviction pour la France ».
Cependant, il ne fait pas vraiment mystère de ses ambitions pour 2012. « L’élection n’est pas une affaire d’expérience. C’est une affaire de vision, d’ambition, non pas pour soi, mais pour la France », expliquait-il le 25 mars dernier, en annonçant la formation prochaine de son mouvement.
« Quand on présente un projet aux Français et pour notre pays, il ne s’agit pas évidement de préparer les cantonales de 2011″, avait alors résumé le député villepiniste François Goulard.
Mais avant la présidentielle, de nouvelles échéances judiciaires attendent Dominique de Villepin, qui devra se rasseoir sur le banc des prévenus, vraisemblablement au printemps de l’année prochaine. Relaxé le 28 janvier dernier dans l’affaire Clearstream, dont il était soupçonné d’avoir tiré les ficelles pour empêcher Nicolas Sarkozy d’accéder à l’Elysée, l’ancien Premier ministre aura droit à un nouveau procès, le parquet ayant fait appel. Une « décision politique », selon M. de Villepin, qui y voit une nouvelle preuve de l’ »acharnement » du chef de l’Etat à son encontre.
La
saga Clearstream n’a pas découragé, au contraire, cet admirateur de Napoléon qui a commencé à rassembler ses partisans autour du Club Villepin et multiplié les déplacements en province ou en banlieue à la rencontre de la population.
Aujourd’hui, 49% des Français disent avoir une bonne opinion de Dominique de Villepin, qui se classe en milieu de peloton des personnalités de droite et du centre préférées des Français, devant François Bayrou (45 et Nicolas Sarkozy (37%), selon le dernier baromètre Ifop- »Paris-Match » du mois de juin (réalisé auprès d’un échantillon national représentatif de 953 personnes). Plus que son bilan de Premier ministre, c’est son charisme qui est mis en avant par 33% des sondés. Mais une autre étude Ifop évalue son potentiel électoral à 7% d’intentions de vote au sein de l’ensemble des Français.
Ancien secrétaire général de l’Elysée, l’un des hommes de la dissolution ratée de 1997, qui avait valu à Jacques Chirac une cohabitation, Dominique de Villepin s’est illustré comme ministre des Affaires étrangères au moment de la crise irakienne. Brillant orateur, il avait réussi la prouesse de se faire applaudir lors d’une réunion du Conseil de sécurité de l’ONU consacrée à la question début 2003, fait rarissime. Nommé Premier ministre en 2005, il a vu son passage à Matignon marqué par l’échec du contrat première embauche (CPE).
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Sud Ouest (Samuel Laurent): Daniel Garrigue, demain parmi les parlementaires villepinistes
Dominique de Villepin présente demain les contours de son propre parti, à la Halle Freyssinet à Paris. On y trouvera le député du Bergeracois Daniel Garrigue (ex-UMP), parmi la dizaine de parlementaires officiellement associés à l’ancien premier ministre. « De tous, je suis le seul qui a quitté l’UMP », expliquait Daniel Garrigue, cet après-midi, en marge d’une conférence de presse.
Il n’a pas souhaité révéler le nom du nouveau mouvement avant Villepin, mais a indiqué qu’il contenait au moins deux mots, « République » et « Solidaire ». Il y aura un logo, qui reprendra le bleu-blanc-rouge du drapeau français dans « une sorte de yin et yang ».
Daniel Garrigue devrait s’occuper des questions de « l’emploi, la formation professionnelle et la politique de la ville » au sein du parti. « Nous voulons provoquer un sursaut sur les grands enjeux nationaux », ajoute le député, qui précise que le mouvement Villepiniste n’aura pas de candidats aux élections locales, pour le moment.
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Le Figaro: Les irréductibles de la villepinie
Malgré les défections de Georges Tron et Hervé Mariton, des fidèles se disent prêts à soutenir Dominique de Villepin jusqu’au bout. Ils seront tous présents samedi pour le lancement du nouveau mouvement de l’ancien premier ministre.
Brigitte Girardin : C’est la véritable cheville ouvrière du mouvement. Partout où Dominique de Villepin va, Brigitte Girardin est là. Depuis le lancement du club Villepin, qu’elle préside, celle qui fut ministre de l’Outre-Mer du gouvernement Raffarin puis ministre déléguée à la Coopération de Dominique de Villepin ne ménage pas ses efforts. «Je l’ai tous les jours au téléphone », assure-t-elle au Figaro.fr. Pour l’aider à administrer le club, elle dispose d’une dizaine de bénévoles mais s’enorgueillit de «faire mieux que les autres partis avec moins de moyens». A ses côtés, Christophe Carignano, journaliste et blogueur, anime le réseau social villepincom.net, et Nathalie Briot, conseillère au sein du cabinet Villepin de 2002 à 2007, gère la trésorerie.
François Goulard : Ministre de l’Enseignement supérieur de Dominique de Villepin, François Goulard est le porte-flingue de l’ancien premier ministre à l’Assemblée nationale. Très actif dans l’hémicycle, il s’est fait remarquer par des prises de position contre des textes-clés de la majorité présidentielle : bouclier fiscal, retour de la France au sein du commandement intégré de l’Otan, amendement Mariani sur les tests ADN, réforme constitutionnelle de 2008, loi Hadopi… Le député-maire de Vannes est un «opposant de l’intérieur». A tel point qu’il constituerait une prise de choix à l’occasion d’un éventuel remaniement. Reçu récemment par Nicolas Sarkozy, François Goulard cherche à rassurer ses proches : «Ce n’est pas une proposition de rendez-vous qui change quoi que ce soit à mes convictions», assure-t-il.
Jacques Le Guen : Pour le député du Finistère, la création du parti villepiniste constitue «le début d’une grande histoire». Fidèle à l’ancien premier ministre, Jacques Le Guen ne cache pas les ambitions présidentielles de celui qu’il décrit comme «un homme d’Etat d’exception» : «L’objectif est désormais d’occuper la scène politique», explique-t-il au Figaro.fr. A l’instar des autres fidèles de l’ancien premier ministre, Le Guen entretient des rapports difficiles avec le pouvoir présidentiel. Fervent opposant à la réforme constitutionnelle de 2008 – ce qui lui a valu d’être qualifié de «têtu de Breton» par Nicolas Sarkozy -, il est déchu de sa place de tête de liste pour les régionales en Bretagne au profit de Bernadette Malgorne. Rangé au côté de Dominique de Villepin, le député de Landerneau se voit en homme de l’ombre du mouvement : «Je suis un laborieux. Je n’attends plus rien, je ne demande rien, sinon que mes idées gagnent». Rendez-vous en 2012.
Jean-Pierre Grand : C’est peut-être le député le plus impliqué dans la création du mouvement politique de Dominique de Villepin. Jean-Pierre Grand coordonne la mise en place de comités locaux dans les départements. Parmi les proches de l’ancien premier ministre, il est aussi l’un des plus virulents vis-à-vis de l’UMP, où, prétend-il, «il ne se passe plus rien». A propos des tentatives de l’Elysée de débaucher certains proches de Dominique de Villepin, le député de l’Hérault ne mâche pas ses mots : «Des scalps à la ceinture du président de la République, ça n’a aucune incidence sur la politique nationale», assure-t-il, n’hésitant pas à traiter les villepinistes ayant cédé aux sirènes du pouvoir présidentiel de «maillons faibles». Et sur Villepin, Jean-Pierre Grand est intarissable. «Il y a quelque chose qui est en train de se passer entre cet homme et le peuple français», explique-t-il au figaro.fr. «Il suffit de sortir acheter un journal dans la rue avec lui pour s’en rendre compte».
Marie-Anne Montchamp : C’est déjà décidé, elle sera la porte-parole du nouveau parti de Dominique de Villepin. Un rôle qui va bien à celle qui a souvent su dire tout haut ce que certains pensaient tout bas. Fervente opposante du bouclier fiscal, elle n’a pas hésité à se présenter aux municipales de 2008 contre la liste officielle UMP du maire de Nogent-sur-Marne. Suspendue du parti présidentiel, sa circonscription de députée est supprimée lors du redécoupage électoral. A l’Assemblée, elle se rapproche alors des indociles villepinistes et rejoint le conseil d’administration du club Villepin en décembre 2009. Reçue mercredi matin par Nicolas Sarkozy, elle nie tout rapprochement avec l’Elysée et rappelle au point.fr le sens de son engagement : «L’objectif de ce mouvement est de proposer, pour la présidentielle de 2012, une alternative aux Français qui ne veulent pas voter comme en 2007.»
Daniel Garrigue : C’est le premier à avoir quitté le navire présidentiel. Fin 2008, le député de Dordogne démissionnait du groupe UMP à l’Assemblée. Fustigeant la ligne du parti «de plus en plus dans du néolibéralisme», «avec des positions qui varient au jour le jour selon l’humeur du président», Daniel Garrigue comptait alors créer une formatio
n politique «à la fois gaulliste, sociale et européenne». Une idée qui trottait aussi déjà dans la tête de Dominique de Villepin, auquel le député s’est finalement rallié. Comme l’ex premier ministre, l’ancien maire de Bergerac dénonce «le dérapage du présidentialisme». Et combat certains textes-clés de la majorité, comme le bouclier fiscal. Ancien administrateur à l’Assemblée nationale, il est très actif dans l’hémicycle et connaît bien les rouages de la machine parlementaire.
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Le Journal du Dimanche (Nicolas Moscovici): Interview de Jean-Pierre Grand
Samedi, Dominique de Villepin lance, à la halle Freyssinet, dans le 13e arrondissement parisien, son mouvement politique. Une étape d’importance sur le chemin qui mène à l’élection présidentielle de 2012 pour l’ancien Premier ministre. Membre de sa garde rapprochée, le député UMP de l’Hérault, Jean-Pierre Grand, interrogé par leJDD.fr à la veille de l’événement, ne cache pas sa satisfaction. Et dénonce à son tour les coups bas distribués, selon lui, par l’Elysée.
Le JDD.fr: Dominique de Villepin lance son mouvement politique samedi à Paris. Quel devrait être le ton de la journée?
Jean-Pierre Grand: Nous allons, à n’en pas douter, assister au discours d’un homme d’Etat. A travers nous, Dominique de Villepin va s’adresser aux Français. Et tous ces soutiens qui seront dans la salle (3.000 personnes environ sont attendues, ndlr) ne seront pas des apparatchiks de partis politiques ou des gens en recherche de postes politiques. Ce seront des Françaises et des Français qui attendent un autre discours politique. Pour reprendre une formule célèbre, Dominique de Villepin va s’adresser à la « majorité silencieuse » de notre pays. Cela va évidemment au-delà de la seule UMP.
S’agit-il pour lui de la première étape vers l’élection présidentielle de 2012?
Nous verrons bien. La décision lui appartient. En tout cas, le débat alternatif est effectivement ouvert.
Selon un sondage, 18% des Français pensent que Dominique de Villepin ferait un bon président de la République. C’est décevant ou encourageant?
C’est évidemment un formidable encouragement. C’est même énorme pour quelqu’un qui ne passe pas sur les grands médias…
Vous trouvez qu’on ne voit pas assez Dominique de Villepin dans les médias?
Je constate surtout qu’il est persona non grata au 20 heures de TF1 qui est totalement verrouillé par l’Elysée. Dans ces conditions, il
Vous vous en prenez à votre tour à l’Elysée, dans le même registre que Dominique de Villepin qui dénonce lui des « pressions » de la part de Nicolas Sarkozy…
(Il coupe) Ce n’est pas tout à fait la même chose. Ce que je vous dis au sujet de TF1, c’est récurrent. Ce que dénonce Dominique de Villepin est en revanche plus nouveau. Il s’agit d’agissements, disons classiques, de ceux qui ne veulent pas qu’il crée son parti politique ou qui sont très inquiets. Il fallait le dire pour que les gens le sachent. C’est fait, passons maintenant à autre chose.
Cela peut donner l’impression que Dominique de Villepin se complait dans un rôle de victime. N’en rajoute-t-il pas un peu?
Je ne peux pas vous laisser dire cela. C’est totalement faux. Des preuves de pression existent: des distributeurs inoffensifs de tracts tout aussi inoffensifs ont fait l’objet de contrôles d’identité; le préfet de police en personne est venu inspecter la salle où nous nous réunirons samedi. C’est tout à fait édifiant! Je vous rappelle également que des parlementaires dits « villepinistes » ont été reçus ces derniers jours à l’Elysée (François Goulard, Marie-Anne Montchamp, Guy Geoffroy et Hervé Mariton, ndlr). Personnellement, je n’ai pas été convié, sans doute parce que Nicolas Sarkozy sait que je suis irrécupérable, mais il est clair que cette invitation, lancée à une semaine d’un grand rendez-vous politique autour de Dominique de Villepin, est par définition suspecte…
Hervé Mariton a fait savoir qu’il ne suivra pas Dominique de Villepin dans sa nouvelle aventure. Faut-il y voir une relation de cause à effet?
Non, je ne pense pas. Les gens que Nicolas Sarkozy a convoqués à l’Elysée sont des gens très lucides. Ils sont, comme tous les partisans de Dominique de Villepin, républicains jusqu’au bout des ongles. Il leur était donc impossible de refuser une invitation du chef de l’Etat. En ce qui concerne Hervé Mariton, qui est un ami, il explique son départ par le fait qu’il n’est pas toujours d’accord avec Dominique de Villepin. Et effectivement, si les différences – sur l’Otan, sur l’Irak, etc – sont si fortes, il vaut mieux qu’il reste aux côtés de Nicolas Sarkozy…
En vous engageant aux côtés de Dominique de Villepin, ne craignez-vous pas une rupture de ban avec l’UMP et la perte, par exemple, de votre investiture pour les élections législatives de 2012?
La seule investiture qui vaille est celle du peuple, mais voilà tout ce qui fait la différence entre Nicolas Sarkozy et Dominique de Villepin. Nous ne sommes pas dans une logique de calculs personnels et de politique politicienne. Si l’UMP veut me faire barrage en 2012, elle n’a qu’à présenter un candidat contre moi. Nous verrons bien à qui le peuple fait confiance.
Avant 2012, Dominique de Villepin sera jugé en appel dans le procès Clearstream. Cela vous inquiète-t-il?
Un procès est toujours inquiétant. C’est toujours un moment délicat, mais le jugement en première instance a été clair comme de l’eau de roche et l’appel formulé est avant tout un acte « politique. Et comme par hasard, on a appris la date de ce procès (qui se déroulera à l’automne 2011, ndlr) dans la semaine précédant notre rassemblement du 19 juin. Tout cela n’est que de la petite politique sans intérêt, mais c’est tout de même inquiétant pour notre pays.
Nicolas Sarkozy a rendu un vibrant hommage au général de Gaulle à Londres. Marche-t-il sur les platebandes gaullistes de Dominique de Villepin?
Le plus grand respect que l’on doit au général de Gaulle, c’est de ne pas trahir les grands principes du gaullisme, en particulier l’indépendance nationale. Quand on est gaulliste, on est intransigeant sur un certain nombre de choses: on ne se jette pas dans les bras de l’Otan, on ne sert pas les riches au détriment d’une véritable politique sociale et humaine, etc. Tout cela pour dire que la politique menée actuellement en France est aux antipodes du gaullisme. Et les discours n’y changeront rien.
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Le Monde (Samuel Laurent): Dominique de Villepin, quatre ans de rébellions
« Je vais vous dire un truc, Dominique : de toute façon, tous les deux, même quand on se déteste, on s’amuse. On ne s’ennuie jamais. On prend du plaisir. Donc on peut continuer ensemble, on se mettra sur la gueule, de toute façon on s’amusera, c’est l’essentiel ». La phrase est de Nicolas Sarkozy. Elle date du 31 janvier 2006, d’après Bruno Le Maire qui la rapporte dans son livre, « Des hommes d’Etat ».
Quatre ans plus tard, les relations entre l’ancien premier ministre, qui lance samedi 19 juin son propre parti, et celui qui est devenu chef de l’Etat, ne se sont pas améliorées, au contraire. Pourtant, les deux hommes ont cherché à se rapprocher à plusieurs reprises. Mais à chaque fois, la rancoeur a été la plus forte.
- 2006-2007 : Villepin en marge de la campagne. Jusqu’au dernier moment, Dominique de Villepin laisse planer le doute sur l’éventualité de sa candidature à la présidentielle. Une manière de compter et de chercher à rentrer dans la campagne de Nicolas Sarkozy, ce dont l’intéressé n’a aucune envie. Le premier ministre n’hésite pas à critiquer publiquement le ton de cette campagne, le
manque de diversité affichée par l’UMP.
Lors de l’investiture du candidat de l’UMP, le 14 janvier 2007, porte de Versailles, les sarkozystes craignent sa venue, qui pourrait déclencher des sifflets qui donneraient une mauvaise image de la majorité. Le premier ministre finit par faire un passage éclair à la convention, sans être sifflé, mais sans prendre la parole. Ni lui ni ses fidèles ne seront vraiment intégrés à la campagne de Nicolas Sarkozy, ni encore moins dans le gouvernement de François Fillon
- 2008 : l’ombre de Clearstream. A peine a-t-il quitté Matignon que Dominique de Villepin doit composer avec l’affaire Clearstream. Mis en cause, accusé d’avoir été l’un des acteurs principaux de la fabrication de faux listings de comptes, il devra s’expliquer devant la justice. Parmi les personnes citées dans les fichiers, Nicolas Sarkozy. Le chef de l’Etat est convaincu que celui qui était alors premier ministre a cherché à lui nuire dans cette affaire. Il compte bien aller au bout de la procédure.
Durant les premiers mois de la présidence Sarkozy, en 2007, Dominique de Villepin réplique. Par médias interposés, il multiplie les critiques contre le style de Nicolas Sarkozy, sa gouvernance ou certains projets. Sur France Inter, le 5 septembre 2007, il se lance ainsi dans une tirade contre l’esprit de cour : « Ce n’est pas quand on est entouré de ‘béni-oui-oui’, de cire-pompes et de courtisans que vous faites avancer un pays ». En février 2008, il signe un « appel à la vigilance républicaine » organisé par l’hebdomadaire Marianne contre Nicolas Sarkozy.
Mais la posture ne dure qu’un temps. Dès 2008, l’ancien premier ministre se fait plus discret. Il s’inscrit au barreau, écrit, donne des conférences à l’étranger et dit avoir quitté la vie politique « active », sans être « ni amer, ni rancunier ». Il revoit même Nicolas Sarkozy à quelques reprises, au point que la presse évoque un « pacte » entre les deux hommes : selon son entourage, le silence de l’ex-premier ministre aurait été échangé contre des promesses de poste. « Il n’y a aucun pacte. Vous me voyez solliciter une place ? », rétorque l’intéressé au Figaro, tout en reconnaissant : « Nous avons de l’estime l’un pour l’autre »
La paix ne dure qu’un temps : alors qu’il était persuadé que l’affaire Clearstream était derrière lui, le 18 novembre 2008, Dominique de Villepin est renvoyé en correctionnelle. L’équivalent d’une déclaration de guerre. Le jour même, l’ancien premier ministre déclare: « la vérité des faits et du droit a été détournée au profit d’une seule partie civile qui est en même temps aujourd’hui président de la République ». Ce sera sa ligne de défense.
- 2009 : « Je suis ici par la volonté d’un seul homme ». La guerre entre le chef de l’Etat et l’ancien premier ministre reprend, à outrance. Dominique de Villepin accuse toujours Nicolas Sarkozy d’instrumentaliser la justice contre lui. « Personne ne me mettra entre parenthèses », lance-t-il au Figaro. A l’Assemblée, ses derniers fidèles marquent leur indépendance par rapport à l’UMP, critiquant parfois certaines réformes.
Dominique de Villepin, lui, se place désormais clairement dans l’opposition à Nicolas Sarkozy. En avril 2009, il évoque « un risque révolutionnaire en France » et appelle à renouer le dialogue avec les partenaires sociaux pour « maintenir la cohésion sociale ». Quelques jours plus tôt, il a réuni ses fidèles parmi les députés, pour un colloque aux accents gaullistes où il a fustigé « la rupture d’un consensus Français », après le retour de Paris dans le commandement de l’OTAN. Il cherche désormais à incarner la tradition gaulliste en opposition à Nicolas Sarkozy, et songe même un moment à se rapprocher de François Bayrou, avec qui il se trouve « ‘un certain nombre de convictions communes ». La défaite du MoDem aux européennes l’en dissuade.
En septembre 2009, alors qu’un sondage du Figaro le sacre « meilleur opposant à Nicolas Sarkozy », il lance un réseau social sur Internet, VillepinCom. Un premier pas vers un parti politique, réalisé avec peu de moyens, mais qui connaît un petit succès. Le site est ausi destiné à assurer à Dominique de Villepin une tribune, alors que s’ouvre le procès Clearstream.
Avant d’entrer dans la salle d’audience, le 21 septembre, Dominique de Villepin explique : « je suis ici par la volonté d’un homme, je suis ici par l’acharnement d’un homme, Nicolas Sarkozy, qui est aussi président de la République française. ».
Un message qui résume sa stratégie : politiser ce procès pour apparaître comme une victime de l’exécutif. Celui-ci va d’ailleurs lui faciliter la tâche : le 23 septembre, interrogé sur ce procès, Nicolas Sarkozy dérape : « deux juges indépendants ont estimé que les coupables devaient être traduits devant le tribunal ».
- 2010 : un parti villepiniste. En débutant son procès, Dominique de Villepin avait promis d’en sortir blanchi. La justice lui donne raison : le 28 janvier, il est relaxé. C’est un camouflet pour le chef de l’Etat, partie civile au procès. Le procureur de la République fait appel. Mais Dominique de Villepin a regagné sa liberté de parole et de ton. Il en profite pour venir à la télévision ou même se rendre en banlieue, au contact des habitants, comme en janvier à Bondy.
Le 22 mars, au lendemain de la défaite de la droite aux élections régionales, il annonce qu’il va créer son propre parti, pour incarner une « alternative » à Nicolas Sarkozy. L’ancien premier ministre réunit la presse et se livre à un réquisitoire de la politique gouvernementale, qui va parfois jusqu’à contredire l’action que lui-même a eu en temps que chef de gouvernement. Nicolas Sarkzoy réagit en tentant d’isoler l’ancien premier ministre. Il séduit ses fidèles, comme Georges Tron, bombardé secrétaire d’Etat à la fonction publique, ou Hervé Mariton, reçu à l’Elysée, qui annonce dans Le Monde qu’il ne participera pas à la création du parti. Nicolas Sarkozy va même déjeuner avec Jacques Chirac devant les photographes.
Le 15 juin, Dominique de Villepin, que les sondages créditent d’environ 8% s’il se présentait en 2012, dénonce, dans une lettre manuscrite à ses partisans, » les entraves, les pressions et les manœuvres » qui vont jusqu’au piratage informatique pour empêcher la création de son parti. Une manière de se victimiser pour mieux souligner, en creux, les méthodes supposées de son adversaire acharné. Samedi 19 juin, le parti villepinistre naîtra officiellement. Pour porter son champion à la présidentielle et en finir avec son ennemi juré, ou pour mieux peser à droite et monnayer son soutien à Nicolas Sarkozy, comme on veut le croire à l’UMP ? Réponse dans quelques semaines, ou quelques mois.
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La Tribune (Hélène Fontanaud): Dominique de Villepin, l’homme du 19 juin
L’ancien Premier ministre de Jacques Chirac concrétise son affrontement avec Nicolas Sarkozy en baptisant samedi à Paris son mouvement politique. Objectif : présenter une alternative à droite pour 2012.
C’était un jour de 2006 sur le chantier d’une autoroute en construction, quelque part en Normandie. L’hélicoptère acheminant le Premier ministre avait affronté des bourrasques de vent, des rafales pluvieuses, avant de se poser sur un improbable carré de terre, boueux et glissant. Devant les autres passagers un peu sonnés, Dominique de Villepin avait bondi hors de l’appareil, avec cette phrase : « marchons vers notre destin ! » Depuis, le destin s’est souvent joué de l’ancien secrétaire général de l’Elysée, qui a déjà perdu plusieurs duels face à son éternel rival, Nicolas Sarkozy.
Mais ce samedi 19 juin, dans un clin d’oeil à la geste gaulliste, Dominique de Villepin franchira un pas décisif. Celui qui était considéré jusqu’ici comme un promeneur en politique, au po
int d’être devenu cette année le héros d’une bande dessinée à succès, portera sur les fonts baptismaux son propre parti, ou plutôt un mouvement, ce qui est plus conforme à l’esprit du fondateur de la Ve République. Une formation, « la République solidaire », qui devrait rallier d’emblée les quelque 15.000 membres des Clubs Villepin qui se sont structurés depuis la fin 2009, sous la houlette de l’ancienne ministre chiraquienne Brigitte Girardin.
Les derniers sondages créditent toujours Dominique de Villepin d’un score avoisinant les 10% au premier tour d’une présidentielle. De quoi susciter irritation et froncements de sourcils tant à l’Elysée qu’à l’UMP. Depuis quelques jours, la tension est montée d’un cran. « Intimidations » et contrôles d’identité visant des jeunes sympathisants de l’ancien Premier ministre lors de la distribution de tracts, piratage informatique du site Internet des Clubs Villepin, apparemment depuis la Californie, convocations d’élus villepinistes dans le bureau de Nicolas Sarkozy, les escarmouches se succèdent.
Un groupe électrogène aurait même été réservé pour samedi, en cas de coupure d’électricité à la Halle Freyssinet, dans le XIIIème arrondissement de Paris, où Dominique de Villepin prononcera son discours « fondateur » devant quelque 3.000 de ses partisans. C’est à eux que l’ancien Premier ministre s’est adressé mardi soir pour dramatiser son affrontement avec le chef de l’Etat, comme il l’avait déjà fait à l’automne dernier lors du procès Clearstream. Dans une lettre – manuscrite à l’encre bleue – Dominique de Villepin a ainsi relevé la multiplication « des entraves, pressions et manoeuvres pour empêcher la naissance de notre mouvement ».
Parmi les avanies de ces derniers jours, la défection d’Hervé Mariton est un coup dur pour l’ancien Premier ministre. Le député de la Drôme a annoncé qu’il ne ferait pas partie du mouvement villepiniste. Pour lui, dans une période de forte impopularité pour le chef de l’Etat et la majorité, « la multiplication des structures n’est pas une bonne chose ». « Je ne veux ni fracture ni rupture au sein de la majorité », a-t-il affirmé. Hervé Mariton confie en outre être en désaccord avec Dominique de Villepin, notamment sur la fiscalité. Et souligne s’être détaché de l’ancien chef du gouvernement bien avant d’avoir été reçu par Nicolas Sarkozy comme d’autres élus villepinistes.
Jouant toujours dans le registre symbolique, le chef de l’Etat a déjeuné mardi avec Jacques Chirac. Or, l’ancien président reste proche de Dominique de Villepin, même si les contraintes de l’instruction judiciaire du dossier Clearstream ont longtemps empêché les deux hommes de se voir. Pour le député villepiniste de l’Hérault, Jean-Pierre Grand, qui n’a pas été convoqué à l’Elysée parce que jugé « irrécupérable », toutes ces initiatives présidentielles « démontrent une fébrilité et une maladresse ». Au passage, l’élu note que la date du procès en appel de l’affaire Clearstream – au printemps 2011 – a été annoncée une semaine avant la réunion du 19 juin.
Et puis, il y a bien sûr le 70ème anniversaire de l’appel du 18 juin. Nicolas Sarkozy y consacre une journée entière. A Londres tout d’abord ce vendredi matin, où il doit prononcer un discours mitonné par le scribe « gaullo-sarkozyste » de l’Elysée, Henri Guaino. Parallèlement, une délégation de l’UMP a été chargée d’aller fleurir la tombe du général de Gaulle, à Colombey-les-Deux-Eglises. De retour à Paris en fin d’après-midi, le chef de l’Etat déposera une gerbe au pied des statues du général de Gaulle et de Winston Churchill, avant une cérémonie au mont Valérien. Pas de quoi intimider le camp villepiniste, sûr et certain de détenir les morceaux de la vraie croix de Lorraine. « Le véritable hommage au général de Gaulle, c’est d’être fidèle aux principes qui ont guidé sa vie politique », souligne ainsi Jean-Pierre Grand.
Dans cette bataille, les sondages qui indiquent que le gaullisme est aujourd’hui un courant d’idées périmé pour près de trois Français sur quatre n’ont que peu de poids. Pour Nicolas Sarkozy, il s’agit de sauver le talisman de la victoire de 2007, à savoir l’union de la droite derrière un seul candidat pour passer le plus haut possible la barre du premier tour de la présidentielle.
Or, depuis plusieurs mois, Dominique de Villepin, qui garde une puissance de feu médiatique, s’est attaché à incarner une « alternative » à Nicolas Sarkozy. Il conteste avec virulence chacun des choix économiques ou fiscaux du gouvernement et plaide pour davantage de « justice sociale ». Lors d’un déplacement à Mantes-la-Jolie, début juin, on l’entend ironiser sur les « lunettes sécuritaires » qui empêchent le chef de l’Etat de voir les vrais problèmes des quartiers en difficulté. « Trop d’hommes politiques parlent de la banlieue sans jamais y venir, ou alors derrière des CRS », insiste l’ancien Premier ministre.
Après le 19 juin, Dominique de Villepin reprendra ses déplacements dans toute la France pour « installer » son mouvement, explique Jean-Pierre Grand. L’ancien Premier ministre prend soin d’entretenir la flamme pour 2012 sans toutefois préciser ses intentions. Certains de ses amis, mais aussi des proches de Nicolas Sarkozy, espèrent toujours une réconciliation avant la prochaine présidentielle. Mais la députée Marie-Anne Montchamp, qui sera la porte-parole du mouvement villepiniste, assure qu’elle ne l’a « jamais vu aussi déterminé ». En novembre, Dominique de Villepin, marathonien confirmé, avait participé aux 20 kilomètres de Paris. Avec cette phrase : « je finis toujours les courses que je commence. »
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Les Echos (Pierre-Alain Furbury): Dominique de Villepin lance son « appel du 19 juin »
L’ancien Premier ministre porte samedi sur les fonts baptismaux son mouvement politique pour «rassembler les Français au-delà des clivages partisans». Un pari compliqué.
Dominique de Villepin veut croire que «les hommes sont les acteurs de leur propre histoire». Samedi, il s’apprête à écrire une page importante de la sienne. Au lendemain du 70e anniversaire de l’appel du général de Gaulle, le dernier Premier ministre de Jacques Chirac porte, à Paris, son propre «mouvement» politique sur les fonts baptismaux. En lieu et place de son club, créé il y a un an et qui revendique 15.000 adhérents. «Le 19 juin, c’est le premier jour à partir duquel on se met au travail», a-t-il prévenu, affirmant son ambition de «réinventer quelque chose» et de «préparer une alternative» pour 2012. Pour être candidat face à Nicolas Sarkozy ? L’ex-ministre Brigitte Girardin, présidente et cheville ouvrière de son club, assure n’avoir «aucun doute qu’il ira jusqu’au bout».
Si Dominique de Villepin accélère, c’est parce qu’il juge possible de devancer le candidat de l’UMP au premier tour de la présidentielle, compte tenu de la conjoncture économique et de l’impopularité du chef de l’Etat. Même si ses proches jugent ce rêve «un peu ambitieux», il entend mettre toutes les chances de son côté en se dotant d’une machine de guerre plus «structurée». Pour accroître son fonds de commerce électoral et, surtout, récolter des fonds.
Le nom de sa formation politique n’a pas encore été dévoilé (le terme de «solidaire» pourrait y figurer), mais une chose est sûre : tradition gaulliste oblige, elle n’aura pas la dénomination de «parti». Dominique de Villepin veut illustrer une volonté de «faire de la politique autrement» et de rassembler «les Français, pas les apparatchiks». «Samedi, c’est la France qui se déplace», insiste le député villepiniste Jean-Pierre Grand, chargé du maillage territorial du club Villepin. Cela permet aussi d’entretenir un certain flou, de laisser la porte ouverte pour – espère-t-il -d’éventuels ralliements de l’UMP. Les députés villepinistes eux-mêmes veulent rester membres de l’UMP. A l’approche des législatives, cela s’annonce compliq
ué. Dominique Paillé, le porte-parole adjoint du parti majoritaire, rappelle «les règles» : «Sauf à être un mouvement associé, on n’appartient qu’à un parti. Je n’imagine pas quelqu’un qui soit à la fois adhérent du Modem et de l’UMP.»
Les proches de l’ancien Premier ministre n’ignorent rien de la difficulté de l’aventure. Peu de moyens, peu d’élus et un exécutif qui lui met des bâtons dans les roues… «Ce n’est pas simple. On n’invente pas un parti comme cela», glisse le député Michel Raison. Dominique de Villepin n’est «pas un homme d’intendance, pas un homme de parti», avoue son homologue François Goulard, qui sourit : «Comme disait le général de Gaulle, ce sera long, ce sera dur, mais je ne me retirerai pas.» «D’autres seront là pour que l’intendance suive», tempère la députée Marie-Anne Montchamp, porte-parole du nouveau mouvement. Brigitte Girardin cherche, elle aussi, à positiver : «C’est quand on n’est pas nombreux qu’on est efficace», dit-elle, assurant que Dominique de Villepin a «les mains dans le cambouis». La preuve ? «Il a lui-même choisi les graphismes qui seront samedi sur les tee-shirts de nos militants !»
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Europe 1 (Aurélie Herbemont): Dominique de Villepin lance son parti
L’ex-Premier ministre lancera samedi son mouvement, censé le démarquer de Nicolas Sarkozy.
Ça ne sera ni people, ni bling-bling, jure les villepinistes. Mais le meeting de lancement du parti de Dominique de Villepin, samedi à Paris, sera en revanche « branchouillard », ose un député, avec DJ, hip-hop freestyle et… témoignages de citoyens français. Un agriculteur et un étudiant de banlieues sont attendus à la tribune, car l’ancien Premier ministre surfe sur son succès dans les cités, au point d’avoir fait fabriquer des badges « je kiffe Dominique de Villepin ».
Ces information ont été distillés au compte-goutte pour réserver des surprises, mais aussi par paranoïa, se désole un organisateur. Car Nicolas Sarkozy a reçu des villepinistes et déjeuné avec Jacques Chirac ces derniers jours. Dominique de Villepin dénonce des pressions.
Quant à Marie-Anne Montchamp, future porte-parole du parti, elle ironise sur cette soudaine prise au sérieux. « Le président de la République nous a honoré de cette attention, si je puis dire, c’est étonnant », grince la députée du Val-de-Marne. « Un mouvement politique, avec peu de moyens, peu de parlementaires, c’est le signe que cet espace politique est réel, et que donc se décourager ce n’est pas du tout dans notre état d’esprit. Nous sommes confiants, loin des petites « combinazzione » politique. »
Dominique de Villepin prononcera un discours de près d’une heure centré sur les institutions. Il dévoilera aussi enfin le nom de son part qui pourrait ressembler à République solidaire, avance un proche. Mais la vraie question est de savoir s’il fera, enfin des propositions concrètes.
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Nouvel Observateur (Carole Barjon): Dominique de Villepin, l’homme du 19 juin
L’ancien Premier ministre est convaincu que Nicolas Sarkozy ne remontera pas la pente. Plus gaullien que jamais, il lance samedi son propre mouvement. Et se dit de plus en plus déterminé à se présenter à la présidentielle de 2012.
Il a travaillé dans les lieux les plus prestigieux, habité les adresses les plus chics : quai d’Orsay, Washington, rue du Faubourg-Saint-Honoré, place Beauvau, rue de Varenne… Mais ne lui parlez plus d’endroits huppés. Malgré sa récente acquisition d’un hôtel particulier rue Fortuny – celle-là même où est né Nicolas Sarkozy ! – pour y abriter ses bureaux d’avocat et sa famille, Dominique Galouzeau de Villepin ne jure plus que par la banlieue et les quartiers déshérités. On l’a vu à Draveil, à Bondy et plus récemment à Mantes-la-Jolie, dans le quartier du Val-Fourré.
Ce samedi, c’est dans le 13e arrondissement de Paris, à la Halle Freyssinet, un bâtiment industriel de 18 000 mètres carrés, qu’il lancera officiellement « son » parti politique. Villepin annoncera lui-même le nom de ce nouveau «mouvement» (terme qu’affectionnent les gaullistes), nom tenu secret jusqu’ici mais qui devrait être assorti de l’adjectif « solidaire ». L’ancien Premier ministre, qui sera finalement président de ce parti, a réglé lui-même le moindre détail de cet après-midi du 19 juin qu’il veut festif et populaire. Il a choisi le logo, la musique et le graphisme des tee-shirts que porteront les 400 bénévoles préposés à l’organisation. Entre 3 000 et 5 000 personnes sont attendues venant de province, de Paris et des cités.
La banlieue, Villepin s’y sent à l’aise. On le réclame, on l’accueille, on le fête. Il s’y taille de francs succès. Au Val-Fourré comme ailleurs, jeunes beurs ou autres habitants issus de l’immigration n’ont pas oublié son vibrant discours à l’ONU contre l’intervention américaine en Irak, en 2003. Son opposition maintes fois répétées au vote d’un projet de loi interdisant le port de la burqa et sa condamnation sans appel du gouvernement israélien il y a deux semaines ont encore augmenté sa popularité dans les quartiers. Souvenir, souvenir… En 2002, au soir de sa réélection, Jacques Chirac, accompagné de sa femme Bernadette, avait été longuement acclamé par une foule de jeunes blacks, blancs, beurs.
Villepin lui aussi parie sur cet électorat qu’il sait hostile à Nicolas Sarkozy. A l’automne dernier, s’estimant « victime de l’acharnement d’un homme », il a décidé, à la fin du premier procès Clearstream, de lancer l’hypothèse de sa candidature à l’élection présidentielle de 2012. Depuis, il soigne toutes les catégories de la population délaissées par le président, celles qui ont fait défaut à la majorité aux régionales, comme les médecins ou les agriculteurs. Il a multiplié les déplacements en zones rurales, et tel un super-Chirac s’est livré au mois de mars à une véritable course d’endurance au Salon de l’Agriculture, à grands coups de claques dans le dos, de bises sonores et de petits verres d’armagnac.
Villepin, l’homme du 19 juin… Lorsqu’il commence son tour de France voilà plusieurs mois, le contexte lui est favorable. Le président de la République accumule alors faute sur faute : « coupables » pour «prévenus » du procès Clearstream, affaires Polanski- Mitterrand, élection de son fils Jean à l’Epad, double fonction et salaire d’Henri Proglio… La majorité, consternée, s’affole. Elle ne sait plus à quel saint se vouer. A droite, on se cherche un nouveau champion. Un espace s’ouvre donc pour un deuxième candidat républicain de centre-droit. François Bayrou étant à terre, Villepin peut être celui-là. Durant tout l’hiver, les médias le suivent à la trace. Il est sous le feu des projecteurs. Aujourd’hui, la situation a changé. Le 21 mars au soir, en analysant les résultats des élections régionales, Sarkozy a senti le vent du boulet. Et cette fois il semble avoir vraiment compris. Sobriété médiatique, inflexion dans sa gouvernance, rôle retrouvé de son Premier ministre François Fillon, plus d’interventions à l’emporte-pièce sur tout et n’importe quoi… Le président se concentre sur l’international et les grands sujets.
Pourtant, à écouter Sarkozy, ce n’est pas Villepin qu’il craint. Quand on l’interroge sur cet éventuel rival, le chef de l’Etat balaie la question d’un revers de main dédaigneux. Pour le vainqueur de 2007, l’ancien Premier ministre n’est tout simplement pas un homme politique. N’empêche ! Prudent, Sarkozy prend quand même soin de lui compliquer la tâche en organisant la bataille du centre (voir encadré).
Villepin s’est adapté à l’inflexion présidentielle. Lui qui, jusqu’au printemps, tenait des propos que n’aurait pas reniés la gauche, par exemple son idée d’instaurer une échelle des salaires, a légèrement recentré son discours. Même s
‘il parle toujours d’augmenter les impôts, au risque de heurter les rares élus qui le suivent, comme le très libéral député UMP du Morbihan François Goulard. Surtout, lui qui prétendait se situer, dans la plus pure mystique gaulliste, « au-dessus » ou en dehors des partis, ailleurs en tout cas, explique désormais qu’il reste dans l’UMP et a même réclamé sa carte d’adhérent au secrétaire général Xavier Bertrand. Motif : rassurer l’électorat de droite.
«Demeurer dans l’orbite de l’UMP lui permet aussi d’en récupérer les déçus », note François Goulard. Il lui faut aussi de l’argent pour mener campagne. Il n’en attend guère de l’UMP… Mais les parlementaires qui lui restent fidèles, les Goulard, Jean-Pierre Grand et quelques autres, pourraient verser leur part annuelle à son parti. A condition de trouver, comme l’exige la loi, une association de financement qui aurait été créée en 2007, seul moyen pour encaisser la contribution des parlementaires élus ou réélus cette année-là. Pour le reste, c’est la dèche… Or une campagne présidentielle coûte cher. Très cher. Quelle banque, quel généreux donateur prendrait aujourd’hui le risque de financer la campagne de Dominique de Villepin ? «Les crédits, remarque François Goulard, ça vient avec de bons sondages. » D’où l’impérieuse nécessité de passer à la vitesse supérieure.
L’ancien Premier ministre est « déterminé comme jamais », selon tous ses amis. Il en est convaincu : la rupture entre Sarkozy et les Français est profonde, et malgré tous ses efforts remarqués le président ne pourra remonter la pente. De quoi donner des ailes supplémentaires à Villepin. Quel avenir sinon ? Avocat international et écrivain ? Cette perspective ne suffit pas à cet homme de pouvoir. Il veut revenir dans le jeu. Pourtant, jusqu’ici il n’a fait que suggérer sa candidature. Pour voir. Pour tester l’hypothèse auprès des Français et faire mesurer sa cote de popularité dans les sondages d’opinion. Pour peser ensuite sur les élus, les décideurs, les médias. Fort des quelque 8% d’intentions de vote que lui accordent les différents instituts, il continue. Mais de là à annoncer solennellement sa candidature, il y a encore un pas.
Le franchira-t-il ? Oui s’il n’a pas d’autre choix. Oui si Nicolas Sarkozy continue de le tenir pour quantité négligeable. Oui, surtout, si son discours rencontre un écho durable dans l’opinion et, dit un de ses proches, s’il réussit à s’imposer durablement comme un candidat sérieux. « Son objectif ne doit pas être de signifier qu’il sera candidat jusqu’au bout, quitte à faire perdre son camp, mais de démontrer aux Français qu’il peut incarner une alternative crédible et faire gagner son camp, dit ce conseiller. On verra déjà samedi s ‘il est capable d’endosser un autre habit que celui du littéraire qui fait de beaux discours et de bonnes conférences de presse. »
Jacques Chirac était, selon la légende, plus adapté à la conquête du pouvoir qu’à son exercice. Longtemps, Villepin a été l’exact inverse de son mentor. Il aime exercer le pouvoir, mais n’a jamais daigné le conquérir. Le voilà au pied du mur.
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Reuters (Elisabeth Pineau): Dominique de Villepin lance samedi son mouvement « alternatif »
Malgré les pressions dont il se dit la cible, Dominique de Villepin lance samedi à Paris son mouvement « libre et indépendant » destiné à proposer une alternative à Nicolas Sarkozy dans la perspective de 2012. Aux yeux des observateurs, rien ne dit cependant que l’ancien Premier ministre âgé de 56 ans sera en mesure de se lancer, le moment venu, dans la course à l’Elysée.
Selon les organisateurs, plus de 2.500 personnes et 300 journalistes sont annoncés samedi à la Halle Freyssinet, dans le XIIIe arrondissement, pour porter le mouvement « villepiniste » sur les fonts baptismaux. Dominique de Villepin, qui s’exprimera dans l’après-midi, dévoilera le nom de cette formation issue du Club Villepin fondé l’été dernier, qui revendique plus 15.000 membres selon son animatrice, l’ex-ministre chiraquienne Brigitte Girardin.
« C’est un rendez-vous qui veut offrir une alternative, une autre façon de faire de la politique », affirmait l’ancien Premier ministre lors d’un récent déplacement en banlieue, le 1er juin à Mantes-la-Jolie (Yvelines). « Je n’ai pas peur des Françaises et des Français, je suis avec le peuple », ajoutait celui qui appelle à une « République solidaire ».
Au lendemain du 70e anniversaire de l’Appel du 18-Juin, le député Jean-Pierre Grand attend de Villepin le gaulliste « un discours très fort et très rassembleur ». « Il ne va pas s’adresser à la classe politique mais aux Français, au peuple de France », a-t-il dit à Reuters.
Dominique de Villepin a écrit mardi à ses partisans pour les galvaniser « à l’heure où se multiplient les entraves, les pressions et les manoeuvres pour empêcher la naissance de notre mouvement ». Il a notamment peu apprécié que certains des élus qui le soutiennent aient été récemment reçus à l’Elysée.
Opposant déterminé au chef de l’Etat, qu’il a affronté à distance lors du procès Clearstream, Dominique de Villepin est toujours membre de l’UMP. Diplomate de formation devenu avocat, jamais élu, il s’est efforcé ces derniers mois de tisser un lien avec les Français au fil d’une tournée qui l’a emmené de la Bretagne à la banlieue parisienne, où il a reçu bon accueil.
« Villepin président! », entendait-on souvent sur son passage. Une hypothèse à laquelle François Miquet-Marty, de Viavoice, ne croit pas vraiment. « Il y a une marque Villepin, qui existe, mais il n’y a pas de désir présidentiel de Dominique de Villepin, y compris à droite », souligne le politologue. « C’est un personnage médiatique, populaire, presque déjà un personnage de légende car il y a une histoire extraordinaire à travers Clearstream mais il n’est pas encore perçu dans un rôle qui pourrait être celui d’un présidentiable ». Dans un sondage Ifop publié cette semaine, 18% des sondés pensent qu’il ferait un bon président de la République et 53% des sympathisants UMP lui reprochent de diviser la droite en s’opposant à Nicolas Sarkozy. Une enquête LH2 publiée fin mars montrait que 69% des Français n’étaient « pas intéressés » par son mouvement politique.
Pour ses partisans, Dominique de Villepin, tour à tour secrétaire général de l’Elysée, ministre des Affaires étrangères et Premier ministre, a l’expérience et le charisme d’un homme d’Etat. Son discours de 2003 à l’Onu marquant le choix de la France de ne pas s’engager en Irak est donné en exemple.
Ses détracteurs lui reprochent d’avoir malencontreusement conseillé à Jacques Chirac de dissoudre l’Assemblée nationale en 1997 ainsi que l’échec du contrat première embauche (CPE), retiré en avril 2006 sous la pression populaire lorsqu’il était à Matignon. L’affaire Clearstream, dans laquelle il a été relaxé en première instance en janvier dernier, pèse en outre toujours sur sa destinée politique. Un procès en appel se tiendra au printemps 2011, calendrier qui pourrait contrecarrer une éventuelle candidature à la présidentielle.
Pour François Miquet-Marty, l’opposition farouche à Nicolas Sarkozy ne saurait suffire à faire de lui un candidat crédible. « On ne peut pas construire un projet politique sur une rivalité personnelle », dit-il. « Il est prisonnier de cette image. Ça joue pour lui en termes de popularité, mais ça ne suffit pas en terme d’assise présidentielle ».
Pour le politologue, si Dominique de Villepin veut préserver ses chances, les circonstances devront changer. « Cela dépendra des autres candidatures, d’un éventuel discrédit plus important encore envers Nicolas Sarkozy qui le ferait apparaître comme un recours, et surtout de l’appareillage politique: un parti, un réseau, un programme, etc. », dit-il.
Pour l’heure, Dominique de Villepin ne peut compte
r que sur le soutien d’une dizaine de députés, dont Marie-Anne Montchamp, sa nouvelle porte-parole.