Dans trois semaines, l’ancien premier ministre, qui veut proposer une « alternative à Nicolas Sarkozy », lancera son nouveau parti à Paris. Parallèlement, il poursuit son « tour de France » : il sera mardi 1er juin à Mantes-la-Jolie, en banlieue parisienne.
« Bon alors, on sera combien le 19 juin ? » C’est l’obsession de Dominique de Villepin, qui doit lancer son nouveau parti à Paris au lendemain de la célébration du 70e anniversaire de l’appel du 18 juin, à Londres. Tout un symbole.
Juridiquement, c’est bien d’un parti – son nom n’est pas arrêté – qu’il s’agit. Mais l’ancien premier ministre de Jacques Chirac, qui n’a de cesse de dénigrer « l’esprit partisan » et « tous ces professionnels de la politique », refuse d’employer le terme ; il préfère parler d’un « mouvement », « libre » et « indépendant », notamment et surtout de l’UMP. « On ne crée pas un énième parti d’apparatchiks ! martèle-t-il devant ses proches. On veut rassembler les Français ! »
Dans les locaux du Club Villepin, un petit rez-de-chaussée près de l’église Saint-Augustin, dans le VIIIe arrondissement de la capitale, une poignée de bénévoles se relaient pour préparer l’échéance, sous la houlette de l’ancienne ministre chiraquienne Brigitte Girardin, présidente du Club.
« Un événement festif et populaire »
La halle Freyssinet, dans le XIIIe arrondissement, a été réservée : 18 000 m2 industriels souvent dévolus aux défilés de mode. Les villepinistes espèrent y rassembler 3000 personnes, soit deux fois plus qu’à la maison de l’Amérique latine, où l’ancien premier ministre avait réuni ses partisans au lendemain du procès Clearstream.
Le jour J, près de 400 bénévoles, vêtus du même tee-shirt, encadreront la manifestation. « Ce sera un événement festif et populaire », explique Brigitte Girardin, qui veut « créer la surprise ». Dominique de Villepin prononcera un discours, dans l’axe des trois piliers du mouvement : défense des valeurs républicaines, exigence de justice sociale, défense d’une France indépendante. Soixante mille tracts ont été imprimés, prêts à être distribués en Île-de-France.
Le député de l’Hérault, Jean-Pierre Grand, chargé du maillage territorial du Club – 15 000 adhérents, issus de tous les horizons politiques –, estime qu’une trentaine d’adhérents par département feront le déplacement pour le lancement du parti, à leurs frais.
« La force de l’engagement nous rend efficaces »
Et après ? Dans l’entourage de Dominique de Villepin, ils sont nombreux à s’inquiéter du manque de moyens et d’une organisation jugée « sommaire » et « chaotique ». Brigitte Girardin, assistée d’un spécialiste de l’informatique (qui gère le site) et d’une attachée de presse, est seule au front, entourée d’une armée de bénévoles. Le conseil d’administration du Club, composé de parlementaires et d’anciens collaborateurs, ne s’est réuni qu’une seule fois en un an, à l’occasion de la galette des rois. Seuls quelques députés fidèles retrouvent leur mentor tous les mercredis.
Mais Dominique de Villepin, désormais avocat, sèche un certain nombre de ces réunions, du fait de ses déplacements à l’étranger. Et s’il suit attentivement la préparation du 19 juin, il s’investit très peu dans le Club. « Il en fait le minimum », soupire un proche. « Cela ne l’intéresse pas », renchérit un autre, qui déplore « l’absence totale de structure et de directives ».
Même inquiétude sur le fond : si huit groupes de travail ont été mis en place, ils sont loin d’être tous actifs ou productifs. Les anciens collaborateurs de Villepin à Matignon, qui pourraient livrer leur expertise, sont de moins en moins sollicités. « On part de zéro, mais la force de l’engagement nous rend efficaces », veut croire la présidente du Club.
Que veut faire Villepin de ce nouveau « mouvement » ?
Quant au député UMP François Goulard, il reconnaît des « problèmes logistiques », mais les relativise : « Si nous avons un peu de mal à faire face, la structure du parti que nous allons créer nous ouvrira des possibilités de financement. Ensuite, tout dépendra des sondages. S’ils sont bons, les banques nous prêteront de l’argent. Et les troupes grossiront… «
Quand ses amis viennent l’alerter sur les questions d’organisation, Dominique de Villepin – qui sera mardi 1er juin à Mantes-la-Jolie (Yvelines) dans le cadre de son « tour de France » à la rencontre des Français – hausse les épaules : « Bah ! Dans une campagne, ce qui compte, c’est le premier et le dernier meeting ! »
Au-delà de la simple question matérielle, reste une inconnue, cruciale : que veut faire l’ancien premier ministre de ce nouveau « mouvement » ? Depuis le procès Clearstream, Dominique de Villepin (qui devra affronter un procès en appel) se plaît à jouer avec l’idée d’une candidature à l’élection présidentielle de 2012.
« Dominique est très déterminé »
« Mais il ne s’en donne pas les moyens, se désole un proche. Il n’a jamais fait de campagne et ne mesure pas ce que c’est : organiser une équipe, structurer les choses… N’est pas Napoléon qui veut ! Si ce dernier a gagné autant de batailles, c’est d’abord parce qu’il était un redoutable tacticien, un organisateur hors pair. »
Un diagnostic que ne partage pas Brigitte Girardin : « Dominique est très déterminé, assure son « amie de trente ans ». Il y a une forte attente dans le pays. Il tirera les conclusions de tout cela le moment venu. »
Source: Solenn Royer (La Croix)