Invité de Guillaume Durand sur Radio Classique lundi matin, Dominique de Villepin a donné son sentiment sur la proposition de loi sur la burqa.
Sur la loi sur la burqa
« Je ne suis pas sûr que l’on prenne les choses du bon côté. Il faut avoir une position unanime. Il faut que nous nous rassemblions sur cette question. (…)
Quelle que soit la décision que nous prenions, parce que c’est vrai que la burqa ne correspond pas à l’idée que nous nous faisons de la République, il faut que nous soyons rassemblés. Alors l’idée a été avancée par certains à l’UMP d’une résolution qui serait votée par l’Assemblée Nationale et qui marquerait cette volonté de respecter notre idéal républicain. A partir de là, déterminons des outils juridiques ! Je ne suis pas sûr que la loi soit la meilleure solution (…)
Personnellement, j’aurais tendance à attendre que la mission parlementaire qui a été nommée à cet effet rende ses travaux. Je ne crois pas qu’il y ait de précipitation à avoir sur ce sujet pour deux raisons. La première, c’est que nous sommes dans une période de crise et dans les périodes de crise, il y a des peurs qui remontent et qu’il faut faire extrêmement attention à la façon de gérer des problèmes aussi difficiles si on veut éviter des stigmatisations, si on veut éviter des divisions. (…)
Il ne faut pas traiter ce problème de façon idéologique. C’est un problème pour la communauté nationale. Cela concerne tous les Français. Il faut donc traiter ce sujet avec exigence, mais aussi avec précaution. Donc il me paraît important dans un contexte de crise économique de ne pas se précipiter.
Il y a une deuxième raison qui doit nous conduire à la précaution: c’est que ce débat sur l’identité nationale n’a pas facilité les choses. Il a blessé un certain nombre de nos compatriotes et de ce point de vue, je crois qu’il faut revenir à l’unanimité. Et donc, le vote d’une résolution par l’Assemblée Nationale me paraît remettre les choses dans le bon sens.
Qu’à partir de là, on considère qu’il faille prendre tel et tel type de disposition (un décret, un arrêté, une circulaire), je crois que nous verrons bien, mais attention à ce recours abusif à la loi qui enlève de son sens à la loi et qui donne l’impression d’une gesticulation de circonstance, au fil des émotions. »
Sur l’élection présidentielle
« Je l’ai dit: j’ai un engagement public. Cet engagement public n’est pas négociable. Ca fait partie de ma vie, c’est le sens de ma vie. (…)
Je n’ai pas grandi avec l’idée d’être en haut de l’affiche: je ne crois pas que ce soit ça qui soit important. Par contre, que mon pays soit en haut de l’affiche, que je sois malheureux de le voir dans la situation où il est, que je pense que les grandes réformes que nous attendions ne soient pas, malheureusement, sur les rails, que nous soyons sur le plan de notre situation sociale et de l’emploi dans une situation extrêmement difficile, quand je voyage et que je vois que nous perdons un certain nombre de grands contrats, que nous perdons du terrain, comme Français comme Européens (…)
Pas uniquement l’affaire d’Abu Dhabi avec Areva, le rachat de Volvo par les Chinois, le grand marché autoroutier en Pologne gagné par la Chine: c’est tout un monde qui change et c’est pour cela que l’idée que « nous étions dans la crise, la crise est en train de se dissiper et tout va aller mieux », c’est une absurdité. Nous sommes confrontés à des défis structurels et il faut les relever. (…)
J’assumerai mes responsabilités. Je prendrai tout mon rôle, mais je n’ai pas l’habitude de prendre des décisions de façon hâtive. Je pense que ce sont des choses qui doivent se mûrir avec un sens aigu des responsabilités. »
Sur l’affaire Clearstream
« Je pense que cette affaire n’aurait jamais dû, en ce qui me concerne, échouer devant un tribunal. Je n’ai jamais bien compris comment on avait pu passer d’un certain nombre de questions sur ce dossier à une affaire politique.
Et cette transformation en une affaire politique a été, je crois, très largement due à cette idée qui s’est développée, chez Nicolas Sarkozy et dans l’entourage de Nicolas Sarkozy, d’une responsabilité qui était la mienne. Il se trouve que c’est faux. Il se trouve qu’à un moment donné, la vérité doit apparaître. (…)
Ce que je sais, c’est que la vérité et la justice, c’est de reconnaître que je n’ai pas eu de rôle dans cette affaire, à aucun moment. »
Source: Dominique de Villepin sur Radio Classique, le 11 janvier 2010