Sortie aujourd’hui du dernier livre de Dominique de Villepin: Le dernier témoin, publié chez Plon.
Le roman, en France, jouit d’un étonnant statut. Tout le monde veut en faire. Même les hommes politiques : regardez Jean-Louis Debré et Valéry Giscard d’Estaing. Même les historiens et les poètes : regardez Dominique de Villepin. Son dernier livre, Le Dernier Témoin (Plon, 176 p., 18 €), est bel et bien une oeuvre de fiction.
L’ancien premier ministre, très présent dans les gazettes en ce moment, s’en explique dans un court avant-propos : « En quittant l’Hôtel Matignon, je rêvais d’autres vies, loin de toutes mises en scènes et jeux de rôle, dans un extrême ailleurs. » Un ami lui a indiqué la voie : « Pourquoi ne racontes-tu pas l’histoire d’un arbre ? » Il a donc écrit l’histoire d’un arbre.
Rien à voir avec Les chênes qu’on abat, d’André Malraux, malgré une posture gaullienne partagée. Nous sommes dans un roman.
La Terre a été balayée par une terrible catastrophe. Il n’en reste rien qu’une épaisse couche de boue, et quelques esclaves aux comportements mécaniques, des êtres qui n’ont plus grand-chose d’humain. « Un peuple de cendres. » Seul subsiste un arbre qui a beaucoup voyagé au cours des siècles et en a vu de toutes les couleurs. Chêne ? Orme ? Tilleul ? On ne sait pas. Lui-même s’est senti, tour à tour, bouleau, banian et baobab, quand des émigrés dans le Nouveau Monde – Polonais, Vietnamiens, Angolais ou Palestiniens – ont reconnu chacun en lui un arbre de son enfance. Ce survivant se souvient et raconte. On cherche à le faire taire, mais en vain. Réussira-t-il à rendre son humanité au peuple de cendres ?
Comme on le voit, nous sommes loin de Clearstream. Inutile d’y voir des allusions entre les lignes. D’accord, il y a un procès, mais c’est celui de l’arbre. Quand ce dernier se demande : « Les épreuves passées m’ont-elles endurci ? » et qu’il répond : « Non, mais elles m’ont fait sentir qui j’étais », ne cherchons pas midi à quatorze heures. Aucune allusion, même inconsciente, à l’actualité judiciaire quand il commente : « Etre témoin, n’était-ce pas déjà être un peu complice ? » Certes, « l’arbre est notre semblable », comme l’écrit l’auteur dans l’avant-propos, et tout son livre n’est que métaphore, mais ce n’est pas un « notre » de majesté : il parle des hommes en général.
Dominique de Villepin est incontestablement un écrivain. Il manie la plume avec brio, s’exprime dans une langue classique de belle facture. Il sait faire vivre les paysages et les situations, avec tout ce qu’il faut de couleurs, de bruits, d’odeurs et d’émotions. Quant au sujet lui-même, chacun en pensera ce qu’il veut. Le thème de la fin du monde a été déjà amplement labouré par des romanciers. Après La Route, pour lequel Cormac McCarthy a obtenu le prix Pulitzer, il était audacieux de se lancer dans une telle voie, surtout au moment où l’on joue son avenir politique. Mais sans doute le fallait-il. Comme le proclame l’arbre – toujours lui : « Je ne craignais pas les juges qui étaient devant moi. Néanmoins, je redoutais le démon en moi qui me disait : A quoi bon ? »
Source: Robert Solé (Le Monde)
Le narratif publié par l’éditeur Plon
Né d’une conversation de l’auteur avec le cinéaste Luc Besson, ce conte philosophique rapporte l’histoire du survivant d’un incendie planétaire : un arbre qui prend la parole pour transmettre l’histoire de ce qu’il a connu:
« La Terre a été ravagée par le feu. Tout, désormais, est recouvert de cendres et les rares êtres qui subsistent encore n’ont plus grand-chose d’humain.
Seul indice de la splendeur du monde passé, un arbre règne sur les vestiges d’une ville morte. Il est le dernier témoin de ce qu’a été l’humanité et, au milieu du silence, il prend la parole : dans ce monde perdu, il veut sauver ce qui peut encore l’être, et transmettre leur héritage à ces hommes qui n’en sont plus.
En racontant son incroyable destin – indissociable de l’histoire du monde -, l’arbre va tenter de faire comprendre au peuple de cendres ce qu’est la vie et lui rendre ainsi son humanité. »