Onzième journée du procès Clearstream, avec le début des plaidoiries des parties civiles. Les principaux éléments de la journée:
1) Dominique de Villepin va publier un roman « Le Dernier Témoin » le 4 novembre, aux Éditions Plon. Né d’une conversation de l’auteur avec le cinéaste Luc Besson, ce conte philosophique rapporte l’histoire du survivant d’un incendie planétaire: un arbre qui prend la parole pour transmettre l’histoire de ce qu’il a connu…
2) « Tout ce qui livre en pâture une personne, sans fondement et de façon excessive, ce n’est jamais bien », a déclaré Nicolas Sarkozy, ce mardi. Le Président de la République ne s’exprimait pas sur le procès Clearstream pour regretter les propos qu’il avait tenus à New York, mais il s’exprimait sur la polémique que suscite l’accession de son fils, Jean, à la tête de l’Etablissement public d’aménagement de La Défense (EPAD)…
3) Alors que les plaidoiries des parties civiles ont commencé, les avocats de Dominique de Villepin ont transmis à l’ensemble des parties, mardi 13 octobre, les conclusions en défense qu’ils entendent soutenir au nom de l’ancien Premier Ministre. Pour ceux qui voudraient s’y plonger, cliquez ici.
4) Dominique de Villepin régresse de 6 points (à 43% de bonnes opinions) dans le dernier sondage Ifop pour Paris Match, tout en remportant un duel de popularité contre Nicolas Sarkozy. A la question « des deux personnalités suivantes, laquelle préférez-vous ? », 47% répondent Dominique de Villepin (contre 30% en octobre 2007). 44% citent Nicolas Sarkozy (67% il y a deux ans). C’est la première fois que l’ex-chef de gouvernement, préféré majoritairement par les sympathisants de gauche, remporte ce « duel ».
Mardi 21 heures 04 – AFP: Le dernier sondage Ifop pour Paris-Match
Jacques Chirac garde, détaché, la tête du palmarès politique Ifop pour Paris-Match publié jeudi, tandis que Dominique de Villepin régresse, tout en remportant un duel de popularité contre Nicolas Sarkozy.
L’ancien chef de l’Etat réunit 76% d’opinions positives, taux inchangé par rapport à septembre. Il devance de 5 points le deuxième du classement, le ministre des Affaires étrangères Bernard Kouchner (71%, +1). La secrétaire d’Etat aux Sports Rama Yade se maintient à la troisième place (70%, +3).
La chute de popularité maximale du mois est subie par M. de Villepin, le plus célèbre des prévenus du procès Clearstream. A 43% (-6 points), il perd 7 places, rétrogradant du 24e au 31e rang. Deuxième plus importante chute: la présidente de Poitou-Charentes, Ségolène Royal (PS) qui perd 4 places (de 34 à 38) et 5 points (41 à 36%).
Mais l’ancien Premier ministre UMP remporte néanmoins un duel de popularité face au chef de l’Etat. A la question « des deux personnalités suivantes, laquelle préférez-vous ? », 47% répondent Dominique de Villepin (contre 30% en octobre 2007). 44% citent Nicolas Sarkozy (67% il y a deux ans). C’est la première fois que l’ex-chef de gouvernement, préféré majoritairement par les sympathisants de gauche, remporte ce duel qui avait aussi fait l’objet de cinq sondages Ifop en 2006.
L’emploi est de très loin le problème majeur aux yeux des personnes interrogées: 45% le placent en tête (39% en janvier 2009) alors que le pouvoir d’achat passe à 18% (-12 points).
Sondage réalisé par téléphone du 8 au 9 octobre auprès d’un échantillon de 955 personnes représentatif de la population française de 18 ans et plus (méthode des quotas).
Mardi 20 heures 48 – L’Express: « Les coupures de presse ne cicatrisent jamais »
Le procès Clearstream est entré dans sa deuxième phase, ce mardi, au Palais de justice de Paris. Après plusieurs semaines d’audience des prévenus, la journée était consacrée aux premières plaidoiries des parties civiles, mais pas les plus attendues. Résultat, une salle à peu près déserte. Même les journalistes étaient absents des bancs de la Première chambre.
Quatre avocats ont plaidé avec une belle unanimité: dans cette affaire, les parties civiles ont été lésées au profit d’une querelle politique entre deux ennemis, Nicolas Sarkozy et Dominique de Villepin. Les autres, « tout le monde s’en fiche », lâche l’avocat de Patrick Goubert.
Le bal s’ouvre avec Me Poynard, l’avocat d’Alain Gomez, ex-PDG de Thomson. Jean-Louis Gergorin est très vite pris pour cible. « Le corbeau n’est pas un petit dénonciateur de province mais une personne bardée de diplômes qui a réussi un tour de force inouï, réunir le gratin politique et médiatique autour de ce dossier », estime l’avocat. Celui-ci, en soulignant les compétences intellectuelles de l’ex-numéro trois d’EADS, veut démontrer l’absurdité de la défense choisie par ce dernier. « Sa thèse de la bonne foi est pitoyable, argue-t-il. Il tente une opération de blanchiment du mensonge. » Pour Me Poynard, la version qui consiste à dire que la source lui a fourni les informations et a mis, parmi les listings et de son propre chef, « la quasi-totalité des gens que Jean-Louis Gergorin n’aime pas » ne tient pas la route. « Aujourd’hui encore, cet homme joue la carte de se faire passer pour un déséquilibré. »
A la barre, l’avocat du milliardaire Arcadi Gaydamak, Me Goldanel, refait le procès de la presse. « J’ai l’honneur de défendre l’un des hommes les plus calomniés de France », déclare-t-il. Dans cette affaire, « on a instrumentalisé les médias et la justice qui travaillent, hélas, en binôme! » Abandonnant la culpabilité des médias, il se perd alors dans une autre affaire, celle de l’Angolagate, à laquelle est rattaché son client. Et de se faire rappeler à l’ordre par le président.
La tactique qui consiste à incriminer les médias est aussitôt reprise par Me Fedida, l’avocat d’Alain Madelin, qui s’est lui aussi constitué partie civile. C’est par la presse que l’ex-ministre a appris que son nom figurait parmi les listings de Clearstream. Une « sombre affaire » qui prend toute sa substance le 8 juillet 2004, avec l’article du magazine Le Point, « motocrotte de la diffamation parisienne », explique l’avocat. « Des journalistes peu scrupuleux de la présomption d’innocence, comme ceux du Parisien, dont tout le monde connaît la délicatesse, ajoute-t-il, ont jeté en pâture le nom des victimes, dont celui d’Alain Madelin. » Puis, il lâche avec emphase: « Les coupures de presse ne cicatrisent jamais. » Rires dans la salle. Me Fedida empile les effets de style jusqu’à s’y perdre. « Il faut soulever le gobelet pour trouver où est le haricot de la responsabilité », ose-t-il. Nouveaux rires mais aussi haussements de sourcils. En conclusion, l’avocat déplore la « dénonciation calomnieuse acharnée et répétée » qui a visé, via les courriers envoyés au juge Van Ruymbeke et l’étalage qui en a été fait dans la presse, l’ex-ministre. Enfin, s’écrit-t-il, « on n’a pas apporté la moindre parole de regret, ni la moindre parole d’excuse » du côté des prévenus quant à la « façon dont les choses se sont passées ».
Mardi 19 heures 30 – La Croix: Jean-Louis Gergorin, le « corbeau » repentant
Depuis le début du procès, l’ancien dirigeant d’EADS plaide la bonne foi. S’il regrette de graves erreurs de jugement, il nie farouchement être l’auteur des falsifications des listings. Il a reconnu être le « corbeau », soit l’auteur des lettres envoyées au juge Van Ruymbeke. Puis il a dit qu’il avait été un « pigeon », celui d’Imad Lahoud. Un drôle d’oiseau, indéniablement. Depuis le début du procès, Jean-Louis Gergorin a plaidé la bonne foi, une ligne de défense portée avec constance et volubilité, de sa voix haut perchée.
Selon l’ancien industriel, c’est Imad Lahoud qui lui a montré des listings de comptes, issus d’un prétendu « hacking » de la chambre de compensation luxembourgeoise. L’ancien trader lui aurait expliqué comment ces derniers démontraient l’existence d’un vaste réseau de corruption, impliquant à la fois des mafieux de l’Est, des personnalités industrielles et politiques, ainsi que des membres des services du renseignement.
Obsédé par la mort – qu’il croit mystérieuse – de son patron Jean-Luc Lagardère, en 2003, inquiet pour l’avenir du groupe aéronautique, pour le sien aussi, alors que deux clans rivaux guerroient pour prendre le contrôle d’EADS, Jean-Louis Gergorin a tenté d’expliquer au tribunal qu’il avait cru à cette fable. « Plus Lahoud me donnait de nouveaux noms, et plus j’y croyais », a-t-il assuré.
Les débats ont permis de mettre au jour une personnalité complexe, à la fois géniale et fragile, stratège et crédule, un homme à la gestuelle étrange (mouvements de menton saccadés, brusques volte-face, regard fixe ou perdu au loin), obsédé par la théorie du complot. En répondant aux questions du procureur, qui s’étonnait de ce décalage entre une intelligence hors norme et des études au plus haut niveau d’un côté, et cette apparente émotivité de l’autre, le prévenu a reconnu avoir été rendu « vulnérable » par la mort de son protecteur, Jean-Luc Lagardère, qui lui avait fait promettre de « toujours défendre le groupe ».
Intarissable à la barre, l’ancien industriel a plaidé sa cause avec d’indéniables accents de sincérité. Mais des pans du scénario restent obscurs : Gergorin a eu du mal à expliquer pourquoi des fichiers ont été effacés de son ordinateur à la veille des perquisitions ; il n’a pas su expliquer non plus pourquoi se trouvaient, sur les listings, la quasi-totalité de ses rivaux.
Mais c’est surtout le témoignage, avant-hier, de l’ex-vice
-président d’Airbus qui a le plus ébranlé sa ligne de défense. Philippe Delmas a dépeint son ancien rival comme un homme habité par un « combat moral » entre « le bien » (groupe Lagardère) et « le mal » (incarné par Alain Gomez et Pierre Martinez, ex-dirigeants de Thomson, dont les noms se sont retrouvés sur les listings). Pour Philippe Delmas, l’affaire Clearstram porte « la patte » de Jean-Louis Gergorin : « la manipulation, la compromission d’autorités et l’impunité ».
L’ex-patron d’Airbus, qui a été placé en garde à vue par le juge Van Ruymbeke en 2004, et donc l’une des principales victimes de la manipulation, a expliqué qu’il s’agissait, selon lui, d’une « récidive » gravissime, après plusieurs campagnes de rumeurs et de calomnies lancées par Gergorin par le passé pour déstabiliser ses adversaires au sein du groupe ou à l’extérieur. Toujours selon Delmas, qui a vu sa carrière brisée par l’affaire Clearstream, Gergorin a fourni au général Rondot « des éléments accréditant l’idée d’un énorme système de corruption » tournant autour du trio Delmas-Gomez-Martinez. Mais il fallait intéresser Rondot à l’affaire. D’où, accuse Delmas, l’introduction des noms de hauts fonctionnaires de la défense. D’où, aussi, l’introduction des noms de personnalités politiques, pour « appâter » Villepin. Quant à Rondot, réputé pour sa rigueur morale, il aurait servi de « caution » pour crédibiliser les allégations de Gergorin.
Mardi 18 heures 51 – Blog de Pascale Robert-Diard, chroniqueuse judiciaire au quotidien Le Monde: Clearstream, l’heure du droit
Alors que les plaidoiries des parties civiles ont commencé, les avocats de Dominique de Villepin ont transmis à l’ensemble des parties, mardi 13 octobre, les conclusions en défense qu’ils entendent soutenir au nom de l’ancien Premier Ministre. Pour ceux qui voudraient s’y plonger, cliquez ici.
L’avocat de Nicolas Sarkozy, Me Thierry Herzog, plaidera lundi 19 octobre. Le réquisitoire est prévu mardi 20 et les quatre avocats de l’ancien premier ministre ouvriront les plaidoiries en défense, mercredi 21.
Saisie à la volée cet après-midi, dans la plaidoirie de Jean-Marc Fedida, avocat de Alain Madelin, sur la dénonciation calomnieuse: “les coupures de presse ont ceci de particulier qu’elles ne cicatrisent jamais”.
Le compteur des demandes de dommages et intérêts a par ailleurs commencé à tourner: Philippe Delmas, ancien vice-président d’Airbus, qui a fait l’objet d’un placement en garde à vue et de perquisitions à son domicile demandés par le juge Renaud Van Ryumbeke avant d’être lavé de tout soupçon, a demandé solidairement aux trois principaux prévenus – Imad Lahoud, Jean-Louis Gergorin, Dominique de Villepin – 920.000 euros de dommages et intérêts. Alain Gomez, l’ex PDG de Thomson a évalué son préjudice à 150.000 euros.
Mardi 17 heures 54 – AFP: Marquées « au fer rouge », les victimes de l’affaire Clearstream demandent des comptes
Des parties civiles ont dit mardi au procès Clearstream quels stigmates elles avaient gardés de cette « nauséabonde affaire » de dénonciation calomnieuse, réclamant qu’enfin les coupables paient pour avoir ruiné leur réputation en les marquant « au fer rouge ».
C’est avec la chambre de compensation qui depuis huit ans enrage d’avoir donné son nom à l’affaire que s’est ouvert le bal des plaidoiries. Eminemment discret, l’établissement luxembourgeois se serait bien passé d’une telle publicité.
« Clearstream restera toujours synonyme de manipulation et d’affaire d’Etat. La dénonciation calomnieuse est un marqueur indélébile », a averti un de ses avocats, Christophe Belloc. Dans son sillage, son confrère Richard Malka a regretté qu’on se soit servi de Clearstream comme d’un « punching ball », alors que la chambre de compensation n’a, en quarante ans d’existence, jamais été condamnée pénalement. « Cela fait huit ans qu’on est traîné dans la boue, qu’on assiste à cette pseudo révélation et ça n’arrête jamais ».
Pour l’avocat de Clearstream, l’affaire n’a pas commencé en 2004, mais dès 2001. « Tout était posé (…). Les corbeaux n’ont eu qu’à se nourrir, personne n’a rien inventé dans cette histoire ». « Le terreau de toute cette affaire, il est là depuis 2001″ et le journaliste Denis Robert « l’a longuement fertilisé par cinq livres » dans lesquels il accuse Clearstream de blanchir de l’argent sale, « un film, des expositions de peinture, des cuvées de vin et des campagnes de soutien », a regretté Me Malka, critiquant la « vendetta » livrée par M. Robert contre Clearstream. D’après l’avocat, ce n’est pourtant pas lui qui est à l’origine de la « calomnie », mais un ancien dirigeant de Clearstream licencié pour faute grave en 1983, Ernest Backes, devenu depuis « gérant de boucherie », et informateur privilégié de Denis Robert.
M. Backes est d’ailleurs convaincu, a rapporté Me Malka, que « le croc de boucher » un temps évoqué par Nicolas Sarkozy pour pendre les manipulateurs, ne concerne pas Dominique de Villepin, mais lui-même! Rires de M. de Villepin.
Ont ensuite défilé à la barre les conseils de diverses parties civiles ayant vu leurs noms faussement cités dans les listings Clearstream. Avec au-dessus de leur tête, le soupçon qu’elles possédaient un compte occulte à l’étranger.
Me Roland Poynard a ainsi témoigné comment son client, Alain Gomez, président de Thomson entre 1982 et 1996, a été « marqué au fer rouge », son nom étant « définitivement associé au soupçon qui est indélébile et qui est planétaire ». La calomnie est selon lui d’autant plus sournoise que « le corbeau n’est pas un petit dénonciateur de village mais quelqu’un qui est bardé de diplômes », l’ancien vice-président d’EADS Jean-Louis Gergorin, qui a « réussi le tour de force de mobiliser le gotha industriel et politique et la presse du monde entier » pour « une dénonciation hors norme avec des accusations d’une gravité sans précédent ».
C’est l’avocat d’Alain Madelin qui a fermé le ban. L’ancien député UMP avait fait le déplacement pour l’occasion. Durant ce procès, a fustigé Me Jean-Marc Fedida, « nous avons eu le sentiment d’avoir affaire à une farce » regroupant « des demi-fous incapables de berner un laitier ». Mais « comment peut-on soutenir que l’affaire Clearstream était quelque chose d’à ce point banal, à la fausseté aussi caricaturale, alors même qu’un juge d’instruction et non des moindres et un éminent membre du renseignement auraient pu ainsi se laisser berner », s’est indigné l’avocat, pour qui cette machination a été « élaborée », pour « léser des intérêts de personnes en particulier ».
Mardi 14 heures 29 – 20 Minutes: La géographie du procès Clearstream
Journalistes – Les quatre rangs du fond près du radiateur: Il y a trois catégories de journalistes. Ceux qui ont le badge jaune. Ceux qui ont le blanc. Et les autres. Les «jaunes» sont les premiers à pénétrer les lieux chaque jour vers 13h15 ou 9h15 quand l’audience commence le matin. Fidèles au principe «Si je t’écrase, j’aurai une meilleure place», ils se précipitent vers le radiateur au fond à droite. C’est là que se trouve la seule prise de courant où brancher leur ordinateur. Après trois jours d’audience, les «jaunes» ont tout de même conclu une trêve en pensant à apporter une multiprise à l’audience. Les «blancs» peuvent ensuite rentrer. Mais pas de pitié pour eux. S’il ne reste plus de place sur les bancs, ils se retrouvent par terre dans l’indifférence générale. Le but pour eux n’est pas forcément de suivre l’audience. Mais bien d’éviter de se faire écraser par les magistrats qui circulent dans l’allée. Quant aux autres, ils n’ont a
ucun espoir de rentrer. Leur quotidien se résume donc à filmer la porte de la salle d’audience en attendant que Dominique de Villepin en sorte.
Public – Un espace aux frontières mouvantes: «Vous savez où se passe le procès Clearstream?» Pas un jour ne passe sans que la question revienne dans la cour du Palais de Justice. Un ancien Premier ministre dans les rangs des prévenus, un président dans celui des parties civiles: ça attire les foules. Dès 9h00, des dizaines d’anonymes commencent à faire la queue derrière les barrières, gardées par des gendarmes. Dans la salle d’audience, l’espace qui leur est réservé se trouve au fond à gauche. Mais les frontières sont mouvantes. Certains jours, une dizaine d’entre eux arrivent à rentrer. Mais les jours fastes – l’audience de Dominique de Villepin notamment – seules quatre places leur étaient accordées. Dehors, ils étaient pourtant près de 200 à attendre.
Parties civiles – A droite de l’allée centrale: Le fils Pasqua, le célèbre flic Jean-Jacques Martini, Edwy Plenel: il y a du beau linge dans les rangs des parties civiles. Du coup, les magistrats leur ont réservé une dizaine de rangs près des fenêtres à droite de l’allée centrale. Pourtant, ils sont peu nombreux à se farcir chaque jour six à douze heures d’audience. Ca profite surtout à leurs avocats. Comme au cirque, ces derniers n’hésitent pas à emmener une ou deux «collaboratrices»…
Avocats des prévenus – A gauche de l’allée centrale: Séparation officieuse des rôles: l’allée centrale divise l’accusation et la défense. Ils ont le droit à une dizaine de rangs. Il faut dire que les prévenus n’ont pas lésiné sur les moyens. Dominique de Villepin arrive tous les jours avec ses quatre avocats. Florian Bourges, le lampiste de l’affaire que l’on n’entend jamais, en a aussi deux, rien que pour lui.
Les stars – Sur le devant de la scène: Ils ont beau être célèbres, les cinq prévenus n’ont droit qu’à un banc en bois sur le devant de la scène. D’autorité, Dominique de Villepin a choisi l’extrémité gauche du banc. Assis à côté d’Imad Lahoud, il rigole plutôt avec les dessinateurs de presse qui le surplombent légèrement. A droite de la barre, un petit banc accueille les petites mains de Clearstream: Denis Robert et Florian Bourges. Tous font face au tribunal.
Le tribunal – Au dessus du lot: Composé du président, des assesseurs et des greffiers, le tribunal est installé tout au fond de la salle, devant les boiseries. Quatre à cinq personnes auxquelles témoins et prévenus s’adressent. Toujours. Même quand c’est un avocat qui pose la question. Le président Dominique Pauthe, cheveux grisonnant et lunettes sur le nez, est installé au centre. Très calme, c’est lui qui mène les débats et distribue paroles et micros.
Marin – Le procureur au sommet: C’est l’une des particularités de la justice française. Le procureur, en l’occurrence Jean-Claude Marin, dispose d’un petit bureau surélevé à droite des prévenus. Cela lui donne d’office un léger avantage sur les avocats de la défense qui, de leur côté, bataillent dans la fosse.
Mardi 13 heures 13 – Reuters: Dominique de Villepin conforté par les débats du procès Clearstream
Selon l’agence Reuters, les débats du procès de l’affaire Clearstream ont mis à mal la version des faits de l’ex-Premier ministre Dominique de Villepin mais l’accusation pourrait peiner pour lui imputer un délit pénal. Après dix audiences, les débats se sont achevés lundi et les juges vont entendre pendant trois jours les plaidoiries des avocats de quelque 40 parties civiles, dont celle de Thierry Herzog, conseil de Nicolas Sarkozy, prévue lundi prochain.
Le réquisitoire du procureur est programmé mardi prochain, et le jugement sera ensuite mis en délibéré pour plusieurs mois. Dominique de Villepin s’est présenté dans sa dernière déclaration lundi en « bouc émissaire » et a affiché sa confiance. « J’ai agi dans le sens du service de l’Etat, mon honneur n’est pas en cause (…) La vie est devant moi », a-t-il dit. Il nie tout complot contre Nicolas Sarkozy en rappelant qu’il l’avait ramené dans le jeu politique en 1997, après sa disgrâce consécutive à la présidentielle de 1995.
Les interrogatoires menés par les juges n’ont pas permis de progresser vraiment par rapport à l’instruction de cette affaire visant la manipulation de faux listings de comptes de la société Clearstream, comportant des centaines de noms, dont Nagy et Bocsa, patronymes hongrois de Nicolas Sarkozy.
Dominique de Villepin assure toujours avoir organisé une seule réunion sur l’affaire le 9 janvier 2004 en tant que ministre des Affaires étrangères, où il n’aurait pas été question de Nicolas Sarkozy. Il dit ensuite n’y être revenu qu’en juillet 2004, avec une autre enquête demandée à la DST.
Ses coprévenus Imad Lahoud et Jean-Louis Gergorin, ainsi que le témoin principal Philippe Rondot expliquent au contraire qu’il a été question d’emblée de Nicolas Sarkozy et que Dominique de Villepin a suivi l’affaire toute l’année 2004. Jean-Louis Gergorin assure même qu’il lui a demandé de transmettre les listings au juge d’instruction Renaud Van Ruymbeke en avril 2004, mais aucun autre élément ne le prouve.
La défense de Dominique de Villepin est cependant parvenue à obtenir la même réponse de tous : pour eux, Dominique de Villepin pensait que les listings pouvaient être authentiques, ce qui exclut toute dénonciation « calomnieuse » de sa part.
Par ailleurs, Imad Lahoud et Jean-Louis Gergorin ont souffert davantage que Dominique de Villepin à l’audience.
Imad Lahoud, informaticien et mathématicien libanais, accusé d’avoir falsifié les listings, est qualifié par les personnes entendues au procès de « menteur », « manipulateur », « mythomane », « affabulateur » ou « escroc du renseignement ». Il a été démontré qu’il se faisait passer pour le neveu du président du Liban, qu’il prétendait connaitre Oussama ben Laden ainsi que l’activiste Ilich Ramirez dit « Carlos ». Il menait plusieurs intrigues et escroqueries parallèles qui lui ont valu d’ailleurs plusieurs arrestations et mises en examen.
Jean-Louis Gergorin a aussi été décrit à l’audience, notamment par l’ancien vice-président d’Airbus Philippe Delmas mais aussi d’autres témoins, comme un vieil habitué des manipulations visant à déstabiliser ses rivaux industriels.
Dans ce contexte, la tâche du procureur Jean-Claude Marin sera d’autant plus difficile que son raisonnement juridique est fragile. Il soutient que Dominique de Villepin est « complice par abstention » de la dénonciation calomnieuse imputée à Jean-Louis Gergorin, car il aurait dû selon lui sonner l’alerte en juillet 2004, quand il a appris que les listings étaient faux.
L’ancien Premier ministre a répondu lundi qu’à cette date, Michèle Alliot-Marie – alors ministre de la Défense – disposait des mêmes informations que lui et n’a pas davantage agi. « Le fait d’être désigné comme rival politique de Nicolas Sarkozy me vaut d’être devant vous. Le fait de ne pas être le rival politique de Nicolas Sarkozy vaut à Mme Alliot-Marie d’être aujourd’hui Garde des sceaux », a-t-il dit.
Il s’est donc montré ironique en suggérant à Jean-Claude Marin, qui avait refusé de le poursuivre initialement avant une volte-face, de « requérir le coeur léger ».
Mardi 13 heures 09 – Le Monde: Déclaration de Nicolas Sarkozy
« Tout ce qui livre en pâture une personne, sans fondement et de façon excessive, ce n’est jamais bien », a déclaré Nicolas Sarkozy, mardi 13 octobre. Le Président de la République ne s’exprimait pas sur le procès Clearstream mais sur la polémique que suscite l’accession de son fils, Jean, à la tête de l’Etablissement public d’aménagement de La Défense (EPAD).
Mardi 12 heures 50 – AFP: La plaidoirie des avocats de Clearstrea
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L’affaire Clearstream, qui a profondément écorné la réputation de la chambre de compensation luxembourgeoise éponyme, aurait pu être stoppée dès 2001, a estimé mardi son avocat qui a raconté comment cette « chimère » était partie d’un « gérant de boucherie ».
« Tout était posé dès 2001. Les corbeaux n’ont eu qu’à se nourrir, personne n’a rien inventé dans cette histoire », a plaidé Me Richard Malka, en ouvrant avec son confrère Christophe Belloc le bal des plaidoiries. « Certains ont dit que Florian Bourges », un auditeur qui a fait sortir de Clearstream des listings comptables authentiques, « était à l’origine de tout, d’une certaine manière oui, mais il n’y a pas que Florian Bourges car il y a avant Denis Robert, mais avant cela, la source de toute cette affaire, c’est un cadre de Clearstream qui a été licencié en 1983 pour faute grave, Ernest Backes », a argué l’avocat.
En 2000, a-t-il poursuivi, M. Backes « est devenu l’informateur de Denis Robert, mais à cette époque, son métier à Ernest Backes, c’est d’être gérant de boucherie ». Une activité qui ne serait qu’une « couverture ». En effet, a ironisé le conseil, d’après les ouvrages de Denis Robert, il s’agit en fait d’un éminent espion, « reconnu par Scotland Yard », qui a « retrouvé les avoirs de Saddam Hussein », qui n’est pas moins que « le correspondant habituel du FBI ou du procureur de New York ». Et voilà, a ponctué, désabusé, Me Malka. « Ca part de là. Tout vient de Ernest Backes, le co-auteur de Denis Robert dans +Révélations+ », le premier d’une série de cinq ouvrages qui ont sapé la réputation de Clearstream en l’accusant de blanchir de l’argent sale.
D’ailleurs, M. Backes, qui s’est confié à M. Robert dans son ouvrage « Clearstream L’enquête », est convaincu que « le croc de boucher » un temps évoqué par Nicolas Sarkozy pour pendre les manipulateurs, ne concerne pas Dominique de Villepin, mais lui-même!
« Il est persuadé que Sarkozy l’a en ligne de mire », +le croc de boucher, ce sont des mots qui me désignent+ dit-il », a rapporté Me Malka, suscitant au premier rang les rires de Dominique de Villepin. « Le terreau de toute cette affaire, il est là depuis 2001 et on l’a longuement fertilisé par cinq livres, un film, des expositions de peinture, des cuvées de vin et des campagnes de soutien », a regretté Me Malka, en faisant référence aux diverses activités de Denis Robert.
Plus globalement, l’avocat a regretté qu’on se soit servi de Clearstream comme d’un « punching ball », alors que la chambre de compensation n’a, en quarante ans d’existence, jamais été condamnée pénalement. « Cela fait huit ans qu’on est traîné dans la boue, qu’on assiste à cette pseudo révélation et ça n’arrête jamais », a-t-il déploré. « Tout n’aurait jamais dû commencer, si on avait fait preuve d’un peu de discernement ». « Le plus extraordinaire, c’est que ce fantasme restera imprimé dans les esprits. Clearstream restera toujours synonyme de manipulation et d’affaire d’Etat. La dénonciation calomnieuse est un marqueur indélébile », a relayé Me Belloc.
Si les deux avocats n’ont pas demandé la condamnation de Denis Robert, poursuivi pour recel de vol et d’abus de confiance, ils ont longuement critiqué le journaliste qui selon eux est sorti de son rôle, en se livrant à une « vendetta » contre Clearstream.
Les plaidoiries des parties civiles doivent s’achever lundi soir, avant le réquisitoire mardi 20.
Mardi 11 heures 05 – AFP: Michèle Alliot-Marie ne veut pas répondre à Dominique de Villepin
Michèle Alliot-Marie ne souhaite pas répondre à Dominique de Villepin tant que le jugement du procès Clearstream n’aura pas été rendu, car elle ne veut pas participer à une politisation du procès, a indiqué mardi l’entourage de la ministre de la Justice.
Dominique de Villepin s’est dit lundi victime d’une « inégalité ministérielle », sa rivalité politique avec Nicolas Sarkozy lui ayant valu d’être poursuivi dans l’affaire Clearstream, alors que Michèle Alliot-Marie, alors ministre de la Défense, a été promue.
La Garde des Sceaux « souhaite un procès serein », a indiqué son entourage, interrogé par l’AFP. « Certains veulent politiser ce procès mais elle ne souhaite pas répondre sur ce terrain-là, pour préserver les débats lors du procès ». « Cependant, quand l’affaire aura été jugée, elle ne s’interdit pas de répondre sur le plan politique », a-t-on ajouté de même source.
Durant le procès, la défense de M. de Villepin a à plusieurs reprises affirmé que Mme Alliot-Marie et son directeur de cabinet, Philippe Marland, avaient été régulièrement informés par le général Rondot de l’affaire Clearstream, mais qu’ils n’en avaient jamais alerté personne.
Mardi 8 heures 21 – AFP: Dominique de Villepin va publier un roman le 4 novembre
«Le Dernier Témoin», ce n’est pas un nouvel épisode du procès Clearstream, qui se déroule actuellement, mais le titre d’un roman que Dominique de Villepin annonce pour le 4 novembre, aux Éditions Plon.
Né d’une conversation de l’auteur avec le cinéaste Luc Besson, ce conte philosophique rapporte l’histoire du survivant d’un incendie planétaire : un arbre qui prend la parole pour transmettre l’histoire de ce qu’il a connu…
Mardi 6 heures 06 – La Tribune: Place aux plaidoiries
La première phase du procès Clearstream s’est achevée comme elle avait commencé : par une déclaration publique de l’ex Premier ministre Dominique de Villepin qui s’est dit victime d’un complot politique. Il a aussi dénoncé la différence de traitement entre lui et la ministre de la Justice (et auparavant de la Défense, puis de l’Intérieur) Michèle Alliot-Marie.
Auparavant, les juges ont pu assister à l’audition de l’ex-patron des RG (renseignements généraux, fusionnés avec la DST, direction de la surveillance du territoire, pour créer la DCRI), Yves Bertrand, qui a démenti toutes les accusations d’Imad Lahoud assurant avoir falsifié les fichiers Clearstream dans le bureau du maître espion, puis de l’ancien responsable de la stratégie d’Airbus (filiale d’EADS) qui a raconté sa vie professionnelle brisée par la bataille avec son ex ami devenu rival, Jean-Louis Gergorin, alors responsable de la stratégie chez EADS, soupçoné d’être à la fois le corbeau de l’affaire Clearstream et l’un des auteurs de la falsification.
Alors que commencent les plaidoiries, les pronostics des observateurs vont bon train sur le verdict final. Beaucoup s’attendent à un non-lieu pour Dominique de Villepin, qui a résisté aux attaques et aux soupçons. Il risque d’en aller différemment pour Imad Lahoud et Jean-Louis Gergorin.
Mardi 5 heures 55 – L’Alsace: Dominique de Villepin estime que Michèle Alliot-Marie était au courant de tout
Dominique de Villepin a regretté, hier, lors de sa dernière audition au procès Clearstream, d’avoir été renvoyé devant un tribunal en raison de sa rivalité avec Nicolas Sarkozy, là où Michèle Alliot-Marie, selon lui tout aussi concernée, avait bénéficié d’une promotion.
C’est à l’heure où le tribunal commençait à sombrer dans une discrète torpeur que l’ancien Premier ministre s’est levé pour une dernière envolée. Synthèse de ses différentes déclarations, la tirade a toutefois soigneusement égratigné l’actuelle Garde des Sceaux.
« Le fait d’être désigné comme un rival politique de Nicolas Sarkozy me vaut d’être aujourd’hui devant vous, ne pas l’être pour Michèle Alliot-Marie lui permet d’être Garde des Sceaux », a lancé Dominique de Villepin, constatant : « J’ai fait mon travail d’information, je ne suis pas sûr que tous les autres ministres en aient fait autant. »
Ministre des Affaires étrangères puis de l’Intérieur au moment des faits, alors que MAM était à la Défense, M. de Vi
llepin est soupçonné d’avoir participé à une vaste manipulation au cours de laquelle des noms de personnalités, dont celui de Nicolas Sarkozy, ont été ajoutés à des listings bancaires, afin de faire croire qu’ils détenaient des comptes occultes.
Durant le procès, il a été répété que Mme Alliot-Marie et son directeur de cabinet avaient été régulièrement informés par le général Rondot de l’affaire Clearstream, mais n’en avaient jamais alerté quiconque.
Pour sa part, l’ancien vice-président d’Airbus Philippe Delmas a affirmé, hier, que l’affaire Clearstream portait incontestablement « la patte » de l’ancien vice-président du groupe aérospatial et de défense EADS, Jean-Louis Gergorin.
Clearstream, « ce n’est pas pour moi l’apparition d’un nom sur un listing mais la destruction d’une carrière professionnelle, une réputation entachée depuis cinq ans », a déclaré l’ancien responsable aéronautique. Interpellé à l’aéroport de Toulouse-Blagnac le 7 mai 2004, alors qu’il assistait aux cérémonies d’inauguration du site d’assemblage de l’Airbus A380, M. Delmas a été la seule personnalité citée dans les listings Clearstream à avoir été placée en garde à vue.
Dès ce moment-là, a-t-il dit, « je sais que c’est une opération de M. Gergorin et je le dis tout de suite » aux gendarmes. « J’ai reconnu (sa) patte, je savais comment il travaillait et de quoi il était capable. »
Aux yeux de M. Delmas, Jean-Louis Gergorin a recruté Imad Lahoud, « un coup formidable » car il maîtrisait l’informatique, a « accroché Dominique de Villepin » en lui permettant de « voir son rival politique » Nicolas Sarkozy « sérieusement compromis » et s’est servi du général Rondot, pour donner « une caution d’un poids considérable » à ses dénonciations.
« C’est une opération signée Gergorin », avec tous ses ingrédients : « la manipulation, la compromission d’autorités publiques et l’impunité malgré des mensonges », a insisté Philippe Delmas.