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Le nouveau Président (8/11): Trois premières permanences électorales sont occupées

Chaque dimanche, retrouvez en exclusivité sur ce blog le feuilleton de l’été: Le nouveau Président, écrit par Denis Bonzy du blog Exprimeo.

Huitième épisode, ce dimanche 30 août: Trois premières permanences électorales sont occupées

A moins de deux heures du début du premier débat public contradictoire à Bordeaux, des représentants des candidats continuent les discussions pour tenter de lever des barrages. Soudain, des délégués du PS chargés de la surveillance de l’une des portes d’entrée arrivent en courant. Il y a manifestement beaucoup plus de personnes que d’invités destinataires du « précieux carton d’invitation » supposé contenir un label garant d’originalité. Mais avec les techniques poussées de reproduction, cette précaution a été contournée. Même en levant les barrages, il n’est donc plus possible d’exclure une pagaille à l’intérieur. Quelques secondes plus tard, des représentants du Modem postés à une autre entrée arrivent et font part du même constat.

Avec tous ces éléments, la délégation composée des représentants des principaux candidats décide de se retirer pour prendre une décision…

Ne pas ajouter de risque de violence

Depuis plusieurs minutes déjà, chaque membre de cette délégation expose les avantages et inconvénients des mesures possibles. La porte de la salle de réunion s’ouvre brutalement. La douceur de vivre habituelle de Bordeaux tranche avec cette fièvre qui caractérise désormais ce premier débat public. Un collaborateur du candidat socialiste passe une feuille de papier blanc minutieusement pliée. Le candidat la lit attentivement. Son visage pâlit. Dans une grande capitale régionale, sa permanence a été envahie. Elle est occupée. Deux militants qui avaient tenté de s’opposer ont été hospitalisés. Dans la même ville, au même moment, il en aurait été de même pour plusieurs autres permanences dont celle de la majorité présidentielle. Des salariés sous la menace de la fermeture de leur entreprise déclarent avoir choisi «l’expression de la rue face à des élites protégées qui les ignorent».

La réunion est suspendue pour que chacun aille aux informations. Cinq minutes plus tard, elle reprend. Ces agissements gravissimes sont confirmés. Les médias sont entièrement mobilisés par ces faits inhabituels.

Il est décidé de ne pas ajouter « un risque supplémentaire de violence à une violence déjà si extrême ». Un communiqué annonce l’annulation pure et simple du premier débat public contradictoire. La dispersion sur les lieux se fera dans d’extrêmes difficultés confirmant ainsi à chacun le niveau très élevé de tensions.

Changer la donne

« Cette soirée est triste pour notre démocratie » : tels sont les premiers mots de Dominique de Villepin quand il rejoint, au centre de Bordeaux, son équipe de campagne dans la salle à manger de l’appartement d’un particulier membre du réseau « des citoyens pour Villepin ».

Il ajoute : « ce qui me marque le plus depuis plusieurs semaines, ce n’est pas le degré élevé de colère mais le niveau quasi-absolu de désespoir. La crise économique a fait disparaître les classes moyennes. Elle a cassé la mobilité sociale. Les politiques donnent le sentiment de tourner dans le vide ou ne chercher que le people anecdotique. Nous allons vivre une fin de campagne qui peut réserver une escalade permanente de violences les plus imprévisibles.

Nous devons prendre des actes forts pour changer la donne. Depuis plusieurs jours déjà, je réfléchis à quatre actes totalement novateurs :

1) j’annonce avant le vote le socle détaillé du ticket avec le profil de Premier Ministre (voire même son nom ?) et les critères précis de la composition gouvernementale. C’est quand même incroyable que de vivre une présidentielle avec de tels sujets qui sortent du « chapeau du Président » après le vote sans l’information préalable de l’opinion,

2) nous devons aller vers un Gouvernement d’intérêt national pour apporter des réponses immédiates à la crise mais surtout pour apporter ensemble une pédagogie des réformes incontournables. L’ouverture s’est piégée dans des ralliements individuels. Elle est devenue une fausse amplification de l’assiette politique de la majorité présidentielle. Nous devons aller vers un contrat qui engage non pas des individus mais des formations donc des courants de pensées. C’est d’une toute autre portée,

3) nous devons prendre toutes les mesures pour réhabiliter tous les partis politiques dans leurs fonctions d’expertise et d’alternance. Il ne doit plus y avoir de présidence impériale avec la libanisation des oppositions. En cas d’élection, notre devoir c’est de faire vivre une démocratie pacifiée par la responsabilisation des oppositions dans une logique par exemple à la britannique avec des contacts permanents avec les plus hauts responsables des administrations pour disposer d’une information impartiale, sereine, digne de foi. Il faut réhabiliter la statistique publique, la parole de l’Etat,

4) ce Gouvernement, au moins pendant les deux premières années, doit comprendre, sous une forme très restreinte, non seulement les principaux leaders politiques mais aussi des représentants de la société civile affectés à des missions très précises dans un calendrier transparent de résultats concrets. Ce Gouvernement doit rendre compte avec régularité, avec précision et avec transparence. Du temps de ma présence à Matignon, j’avais initié de tels points presse. Beaucoup reste à faire. Mais cette lisibilité de l’action publique doit être restaurée.

Je réfléchis aussi à l’hypothèse d’une vaste consultation populaire à l’issue de la première année donnant la parole aux Français pour décider ensemble de mesures fortes de réorganisation dans un climat dépourvu de toute ambiance plébiscitaire. Pendant la première année, quand nous aurons démontré une nouvelle logique passant tout particulièrement par des mesures exemplaires appliquées à nous-mêmes, les responsables politiques auront alors, mais alors seulement, la crédibilité pour défendre les réformes appliquées à la vie d’autrui.

Je vous demande de penser à ces premiers actes et vous convie à une réunion de décision demain à 11 heures. »

La salle de réunion se libère rapidement. La présidentielle vient de rappeler que ce ne sont pas les nouvelles technologies ou les médias qui font une élection mais bien les tempéraments. Les masques de chacun vont tomber. C’est au moins le mérite de cette soirée atypique.

2012 a des défis de l’ampleur de ceux de 1958

Ce mercredi 25 janvier, il est 11 heures quand l’état major de campagne se réunit dans le quartier général parisien. Le chargé de l’économie fait une présentation détaillée de la situation comme ce fut le cas à de très nombreuses reprises déjà. Il précise : « nous avions été peu nombreux à prévoir dès 2009 cette crise à deux secousses avec la seconde plus forte que la première. Le problème est certes économique mais il va bien au-delà. Chacun entend désormais défendre sa position par des actions directes parce que les responsables politiques sont entièrement décrédibilisés perçus comme incompétents, démagogues, voire même profiteurs. Dans ces circonstances, il n’y a plus de réponse technique. Il faut des messages pour changer le système politique. Nous sommes au bord d’une révolte des contribuables parce que la prise de conscience de l’ampleur de la dette a débuté. Chacun commence à calculer le nombre des générations appelées à payer pour une situation qui ne peut que se dégrader alors même que l’effort financier sera de plus en plus impactant. »

Le directeur de campagne prend la parole : « Dominique, les prochaines semaines vont passer comme des journées brèves mais peser comme des décennies. Il faut toujours se méfier de la « France qui s’ennuie ». Le détachement des dernières années pouvait annoncer un réveil brutal. Nous ne sommes qu’au début. Les dernières semaines de la présidentielle sont imprévisibles à ce jour. J’étais opposé à la proposition de débats publics régionaux. Ils auraient été une chienlit sans précédent. A mes yeux, vous devez provoquer un électrochoc. A cette fin, il importe de démontrer que vous n’êtes pas un candidat comme les autres.

4 mesures concrètes changeraient la donne :

- vous annoncez en préalable une réduction drastique des moyens de la Présidence de la République qui doit devenir l’exemple de l’économie au quotidien. Si vous validez ce cap, en 24 heures, nous pouvons donner des chiffres précis avec des exemples concrets,

- vous annoncez un profil de Premier Ministre à très forte autorité morale qui rassure le bon sens d
es Français. Sa connaissance du quotidien doit primer. Il doit parler au cœur et à la raison sur les arbitrages quotidiens des ménages,

- vous proposez une nouvelle organisation Gouvernementale. Vous savez qu’à titre personnel, je préfère le renforcement des pouvoirs d’expertise de l’opposition aux mesures individuelles de supposée « ouverture »,

- vous présentez en première place de la hiérarchie ministérielle un «Ministère du désendettement de l’Etat». Là aussi, nous ne devons pas nous tromper de sens. Il ne s’agit pas d’engager une approche comptable mais d’initier un nouveau pacte social qui, sur des bases claires connues de tous, sera le cadre à l’intérieur duquel le secteur public va se redéployer. Ce nouveau pacte social est un contrat de mandat. Il détermine le sens des actions à conduire. Il sera le régulateur de vos actions avec une information permanente. Ainsi, exemple parmi beaucoup d’autres, à l’entrée de chaque Ministère comme de chaque Préfecture, seront obligatoirement installés des panneaux électroniques avec d’un côté le poids de la dette par heure et de l’autre les économies réalisées depuis votre élection …

A certains égards, nous sommes comme en 1958. Mais notre défi, ce n’est pas la décolonisation mais le redéploiement de notre appareil public sur notre propre territoire et non plus «à l’extérieur». Si vous trouvez les actes qui parlent à l’opinion, la présidentielle changera de dimension avec vos propositions. Le premier qui trouvera cette nouvelle tonalité a de fortes chances de gagner ».

Deux autres intervenants s’expriment dans le même sens en donnant des pistes complémentaires. Dominique de Villepin fixe un nouveau point en fin de journée pour arrêter les premières mesures après réflexion.

Auteur: Denis Bonzy du blog Exprimeo

En exclusivité sur le blog 2villepin, dimanche 6 septembre, neuvième épisode: Soyons d’abord au service de l’avenir de chaque Français

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