Chaque dimanche, retrouvez en exclusivité sur ce blog le feuilleton de l’été: Le nouveau Président, écrit par Denis Bonzy du blog Exprimeo.
Sixième épisode, ce dimanche 16 août: Bonjour l’avenir
Mardi 3 janvier 2012, il est 20 heures 15. La salle publique qui accueille la réunion de Dominique de Villepin est bondée. La file d’attente s’allonge même dangereusement à l’extérieur. Il est certain que l’audition du matin au tribunal ne pouvait qu’attiser les soutiens et la curiosité mais à ce point là …
La jeune chanteuse qui est sur scène déploie tout son talent pour distraire les présents. Même si son talent est grand, cela ne suffit pas.
Son âme est belle, dévouée et conquérante
La Présidente du Comité National de soutien prend la parole. Elle débute ainsi la présentation de Dominique de Villepin :
« Antoine de St Exupéry a exprimé un enseignement de la vie que je trouve d’une vérité forte : on est de son enfance comme on est d’un pays ».
L’enfance de Dominique, c’est le monde au gré des affectations de son papa. Mais, même dans les capitales les plus lointaines, le pays de Dominique a toujours été la France.
Pour le connaître de longue date, je sais que son âme est belle, noble, dévouée, conquérante.
Mes amis, il y eut le temps de la préparation. Nous l’avons gagné en travaillant en équipe avec tolérance mais surtout avec passion.
Puis ce fut le temps de l’ouverture de la compétition. Nous avons gagné cette étape en livrant une campagne propre faite de propositions positives et concrètes.
Maintenant et pour quelques petites semaines encore, il y a désormais le temps du sprint ultime de cette compétition. Ce temps, nous l’ouvrons ce soir.
Ce temps, nous allons le vivre soudés, unis, avec la force de ce que nous sommes et avec la force de ce que nous croyons.
Mesdames, Messieurs, Chers amis, je vous demande de vous lever et d’accueillir celui qui en cette période de fêtes nous fait le plus beau des cadeaux : le cadeau de l’espoir.
Mesdames, Messieurs, Chers amis, je vous demande de vous lever et d’accueillir celui qui, je l’espère de tout mon cœur, par ce soir de mai 2012, nous aurons la chance et nous aurons l’honneur désormais de l’appeler : le nouveau Président.
Mesdames, Messieurs, Chers amis, je vous demande d’accueillir Dominique de Villepin.»
Une nouvelle offensive de démocratie
Il est 20 heures 45. Les lumières diminuent d’intensité. La musique de campagne est lancée. De l’arrière de la salle, Dominique de Villepin traverse la foule. C’est très difficile pour lui de se frayer un chemin. Il prend un plaisir certain à serrer les mains. La filiation avec Jacques Chirac sur ce point est manifeste contrairement aux craintes si longtemps formulées.
Les derniers mètres le séparant de la tribune sont là. Il s’élance sur la scène. Le silence s’installe progressivement et le candidat lance, comme phrase introductive, un «bonjour l’avenir» qui tranche avec les formules habituelles.
La salle explose d’applaudissements en scandant son prénom.
Plusieurs dizaines de secondes plus tard, il fait signe pour que le calme se réinstalle et il débute son discours :
« Bonjour l’avenir,
Ce soir, dans cette salle, nous avons la certitude de vivre ensemble un rendez-vous qui va bien au-delà d’une amicale rencontre de début d’année.
Ce soir, au plus profond de nous, nous savons que nous partageons la plus belle force qui soit : l’espoir.
Cette force, c’est une chance. Mais c’est aussi un devoir.
C’est la chance de l’élection de mai 2012 qui s’approche.
C’est la chance que nous construisons chaque jour dans nos efforts en commun sans lesquels rien ne serait possible.
Mais c’est aussi un devoir. Celui de parler vrai, d’agir juste.
Parler vrai, c’est dire au pouvoir sortant qui promet de changer de rythme, d’accélérer les réformes ; ce n’est pas de rythme que nous voulons changer mais de direction.
Agir juste, c’est montrer à nos concitoyens qu’il ne doit plus être question de promettre mais d’être. Il ne doit plus être question de bâtir des programmes ambitieux pour … 2030 mais de mobiliser toutes les énergies pour … tout de suite.
Car il y a de nombreux domaines où notre pays a besoin de changements immédiats.
L’honnêteté impose de reconnaître qu’en effet la France de 2012 doit vivre une nouvelle offensive de démocratie. La liberté, la solidarité, l’unité sont des questions d’actualité dans notre pays. Peut-être même dans des conditions de gravité rarement connues à ce point … ».
Et dans la foulée, Dominique de Villepin annonce 11 mesures qui sont un total changement de direction. Il est ainsi proposé une organisation du Ministère de la Justice sur la base des principes du Cabinet présidentiel Américain avec un profil de Procureur Général garant de l’indépendance de l’institution judiciaire. Il annonce l’incompatibilité entre le statut d’actionnaire de référence d’un média télévisuel et la dépendance de marchés d’Etat au-delà d’un certain seuil du chiffre d’affaires de la société mère. Il ajoute comme mesure prioritaire une transparence généralisée sur l’utilisation des fonds publics avec par exemple la publication via Internet des notes de frais des Ministres comme c’est déjà le cas au Canada …
Le vrai chantier moderne : une nouvelle intelligence d’exercice du pouvoir
Plus il détaille les mesures, plus la salle est attentive. Dominique de Villepin peut compter sur un silence quasi-absolu pour prononcer sa conclusion. La salle est sous le choc. C’est bien une nouvelle République qui est proposée.
Et l’ancien Premier Ministre conclut : « Le vrai chantier moderne, c’est une nouvelle intelligence d’exercice du pouvoir. Nous devons refuser le «tout à l’Etat» qui deviendrait progressivement la forme sociétale du tout à l’égout qui évacue les pollutions domestiques en déresponsabilisant à l’excès. Nous devons pareillement refuser le moins d’Etat parce que la vie moderne a toujours besoin d’un régulateur qui échappe aux seules contraintes des marchés.
Nous proposons un Etat au service d’une nouvelle âme collective.
Cette nouvelle âme collective, c’est la morale dans l’exercice du pouvoir, c’est la morale dans notre rapport à l’environnement, c’est la morale dans le rapport entre la ressource humaine et le capital financier.
Alors que tout progresse et si vite, pourquoi la politique a-t-elle régressé ces dernières décennies ? Parce qu’elle perdu ce sens de la morale. André Malraux rapportait qu’il n’y a de morale que celle qui dirige l’homme vers ce qu’il porte de plus grand.
La première morale que nous devons rétablir, c’est la dignité de chaque individu.
La dignité du travailleur qui ne peut tolérer que l’argent ruisselle pour les actionnaires quand l’ouvrier ne peut nourrir sa famille et qu’il se demande de quoi demain sera fait.
La dignité du citoyen qui doit être assuré que des contre-pouvoirs indépendants lui assurent que la parole officielle peut être digne de foi parce que ses auteurs commencent par s’appliquer à eux-mêmes ce qu’ils demandent pour autrui.
La dignité de l’Etat qui doit restaurer la fonction de contrôle. Tous les organismes les plus compétents interviennent pour contrôler mais ils interviennent chaque fois … après la débâcle qui est toujours lourde de charges pour les finances publiques.
Voilà la nouvelle frontière que nous devons franchir tous ensemble. Toute la famille qui compose notre nation. Pour le partage des bénéfices comme pour le partage des fardeaux. Sans considération de race, de sexe, de géographie ou d’affiliation politique.
Avec ce nouveau cap, mai 2012 sera le printemps de France, le printemps de tous les Français. C’est à ce printemps que je vous appelle à travailler tous ensemble. ».
Il est 23 heures. La réunion prend fin. Elle a bénéficié d’une couverture médiatique inhabituelle. Dans le QG de campagne, l’équipe de permanence re
çoit un appel. Le groupe qualitatif qui testait le contenu du discours montre que les réformes proposées plaisent à la « gauche innovante » mais que les « seniors » sont inquiets. Ils se sentent menacés par des réformes aussi structurelles. Très matérialistes, ils se soudent toujours derrière la majorité présidentielle sortante. L’érosion n’est pas encore suffisante pour ouvrir sérieusement les places qualificatives pour le second tour. Il est donc indispensable de trouver des mesures chocs pour parler à ce segment de l’opinion qui est quantitativement très important et qui alimente le gros des bataillons électoraux du Président sortant.
Le rapport détaillé est promis pour le lendemain en milieu de matinée. L’équipe de campagne sait maintenant que le succès de ce soir ne doit pas effacer l’immensité des progrès à faire à destination de ceux qui veulent vivre l’adaptation par la protection : « la ruche endormie » selon les termes du spécialiste ou une grosse partie de la majorité silencieuse selon des mots plus communs.
Un point est fixé pour le lendemain à 11 heures. L’enjeu est simple : comment organiser l’évasion d’une partie de la « ruche endormie » et la ramener chez DdV ?
Auteur: Denis Bonzy du blog Exprimeo
En exclusivité sur le blog 2villepin, dimanche 23 août, septième épisode: Premier débat public contradictoire en Région : Bordeaux