Chaque dimanche, retrouvez sur ce blog le feuilleton de l’été: Le nouveau Président, écrit par Denis Bonzy du blog Exprimeo, qui nous fait l’amitié de cette exclusivité.
Troisième épisode, ce dimanche 26 juillet: Premier tournant de campagne
Mardi 13 décembre 2011, à 10 heures, Dominique de Villepin arrive dans une jolie ville de Provence. Ici, l’air est doux. Il prend quelques minutes pour s’équiper de bottes hautes et imperméables. La presse l’attend en bordure de rivière. Il fait quelques pas. Il tient son point presse les pieds dans l’eau.
Il débute « je ne ferai pas campagne pour écrire un annuaire de promesses sans lendemain. Je fais campagne sur des enjeux de génération et pas sur des paris d’élection. Cette rivière est belle. Elle devrait être un lieu de vie, de détente et de plaisir. C’est une poubelle à ciel ouvert. Pourquoi ? Parce qu’elle n’a pas pu compter sur notre attention prioritaire et pas davantage sur un cadre légal adapté. Voilà les deux modifications que je veux apporter. Sur la mobilisation collective, je prends un engagement simple. Parce que la pollution diffuse est une maladie volontaire par négligence notamment, il ne suffit pas d’accorder des bonifications. Il faut aussi prévoir des sanctions quand l’inaction aussi durable devient ainsi fautive. Je m’engage donc à dresser, dans les 12 premiers mois de mon élection, une carte bleue des espaces d’eau de notre territoire. Ce programme contractuel comportera des aides bonifiées. Passé un délai de réalisation, le temps des mali s’ouvrira. Deuxième action : parce que la nature est inégale, les dispositions légales ne doivent pas être uniformes. Cette carte bleue cassera le code de l’uniformité qui ignore encore trop les inégalités naturelles et nous irons ainsi au cas par cas. Avec ces deux actions, nous créons une nouvelle attitude face à l’environnement ».
A ses côtés se tient une leader écologiste qui a déjà eu une compétence ministérielle et qui témoigne de sa solidarité face à de tels actes neufs et forts. En aparté, cette élue évoque l’évolution exemplaire de la rivière Malbaie dans la province de Québec à deux pas de l’usine d’AbitibiBowater. C’est donc possible.
La visite continue. Puis il est temps de partir pour le prochain lieu symbolique.
La fête nationale de l’impôt
Chacune de ces visites se déroule de la même façon : les pieds dans le terroir, des actes simples, du concret.
Le moment le plus émouvant fut sans doute celui non préparé dans une petite Commune du Nord. L’économie, donc l’emploi, a quitté ce territoire depuis longtemps. C’est le moment où Dominique de Villepin doit parler de la solidarité. Au hasard d’une question, il évoque une mesure forte : la fête nationale de l’impôt. Il annonce qu’il entend compléter la traditionnelle journée du patrimoine par une journée qui soit la fête de l’impôt. Il précise «pendant cette journée, nous allons inverser les habitudes. D’ordinaire, tout est payé et les services concrets sont oubliés. Cette journée là, tout sera gratuit et les services seront détaillés cas par cas. La police ouvrira ses portes pour exposer ses actions. Les Directions départementales de l’Equipement ouvriront leurs bureaux et démocratiseront leurs données : entretien des voies publiques, éclairage public … L’impôt c’est le filet de sécurité de la «famille France». Il faut le respecter, l’honorer. Nous avons un devoir d’explication pour refonder notre lien civique».
La première semaine de campagne se déroule sur un rythme très soutenu. Dominique de Villepin vit la France. Il ne la visite pas. Sa caravane électorale fait qu’il s’installe réellement dans une ville. Cette présence répond à une logique entièrement nouvelle.
Le candidat aux « 36 000 locaux de campagne »
Dominique de Villepin s’installe le temps d’une journée chez un foyer qui accepte ainsi de l’accueillir. Il n’y a pas de bus à l’Américaine. Encore moins de descente dans des équipements clinquants.
Le comité local « citoyens pour Villepin » a en effet organisé avec son équipe de campagne une présence terrain atypique. Un appel à volontaires a été organisé. Dominique de Villepin s’installe dans le foyer qui s’est porté candidat. Il y rencontre souvent la presse locale ou des délégations. Là dans une salle à manger. Parfois, ce fut dans la cuisine d’une HLM. L’équipe rapprochée de campagne s’installe dans une pièce annexe ou, si l’espace ne le permet pas, dans la salle d’un hôtel-restaurant de la Commune. Le déjeuner ou le dîner permettent de rencontrer dans ce foyer temporaire les animateurs locaux de ses soutiens dans un cadre informel d’une totale simplicité. Ces contacts terminés, il se rend ensuite à l’hôtel le plus proche pour y passer la nuit. Une autre logique de relation aux Français et aux régions est indiscutablement née de cette proximité physique originale. Il est ainsi « le candidat aux 36 000 locaux de campagne » tant à l’écart des locaux de partis politiques que des salles impersonnelles d’hôtels.
Ce climat neuf plaît et les sondages progressent manifestement. L’électorat jeune tout particulièrement se montre très réceptif à ce nouveau style. Le secteur rural aime ce parti pris de simplicité et de réalisme. La «mécanique»est huilée. Chacun a pris les bons réflexes. Le petit-déjeuner avec le banania au lait chaud dans une étable de la Bresse restera un temps fort dans la mémoire de chacun après que DdV eut démontré son « talent relatif» à la traite …
Alors même que tout est calme ce jeudi 22 décembre en fin de matinée et que l’équipe de campagne commence à se préparer à vivre une coupure de Noël qui permette de faire le plein d’énergie, une dépêche apprend qu’un hélicoptère militaire s’est écrasé en Afghanistan. 6 militaires Français sont décédés. D’autres luttent contre la mort. Le Chef de l’Etat s’adressera aux Français dans la soirée pour effectuer un point officiel.
A 20 heures, sur la quasi-totalité des chaînes de TV, Nicolas Sarkozy apparaît. Il s’exprime brièvement pour déplorer ces pertes humaines et rappeler que la contribution de la France dans la lutte contre le terrorisme international était incontournable même à un prix humain élevé.
« Ma campagne est suspendue »
Dans l’après-midi, Dominique de Villepin a publié un communiqué très bref dans lequel il appelle les Français à l’unité et à la mémoire. Dans les minutes qui ont suivi cette publication, il a suspendu sa campagne.
De façon confidentielle, la direction de son équipe de campagne s’est rapprochée des services de l’Elysée pour les informer de la volonté de l’ancien Premier Ministre de se rendre en Afghanistan pour partager Noël avec le bataillon frappé par ce drame.
Le vendredi 23 décembre au matin, sa direction de campagne attend toujours une réponse de l’Elysée. Le Ministre de la Défense vient d’informer qu’il se rendrait en Afghanistan pour la nuit de Noël. Mais rien de plus.
A 11 heures, le porte-parole de Dominique de Villepin publie le communiqué suivant : « Dominique de Villepin a suspendu sa campagne jusqu’au jeudi 29 décembre 2011. Comme ancien Premier Ministre, il se rend en Afghanistan par les moyens ouverts à chaque Français. Sur place, comme pour chaque Français, il s’en remet aux mesures communes de sécurité. Ce déplacement ne donnera lieu à aucune couverture de presse. Loin des clivages politiques comme de tant d’autres facteurs qui divisent artificiellement, Dominique de Villepin appelle à l’unité ».
A 17 heures, un point presse est tenu par la Présidente de l’un de ses comités de soutien. C’est une personnalité qui a l’attachement spécifique à la France témoigné par celles et ceux qui ont adopté ce pays. Cette démarche témoigne d’un amour encore plus fort pour les actes symboles.
« Ces trois couleurs sont celles de notre arc en ciel »
Cette présidente expose son parcours personnel, les raisons de son engagement de longue date aux côtés de Dominique de Villepin. Elle est particulièrement émouvante quand elle explique pourquoi elle aime ce pays, son Histoire, ses atouts. Elle précise « parce qu’en France la fraternité est notre nature. Parce qu’
ici l’universalisme est notre Histoire. Parce que la mémoire est notre tradition, nous appelons les Français à poser une bougie sur leurs balcons dans la nuit du 23 au 24 décembre et les convions à porter sur leurs vêtements un petit ruban aux couleurs du drapeau national : bleu-blanc-rouge. Cet acte n’est pas un quelconque nationalisme mais pour toutes celles et pour tous ceux qui aiment notre pays sans arrogance ni pénitence, ces trois couleurs sont celles de notre arc en ciel ».
Quand elle termine son intervention, une gravité particulière s’est installée et, peut-être pour la première fois aussi, chez plusieurs journalistes présents…
Dès les premières heures qui suivent, dans les rues, l’ambiance a changé. La France plurielle avait été unie dans la victoire en 1998. Elle se retrouve aussi unie dans la tristesse découvrant les origines et les parcours si divers des soldats.
Les bougies sont déjà aux fenêtres et presque chacun arbore « son » ruban.
A peine sortie de cette conférence, la presse cherche à savoir quand, comment … Dominique de Villepin est parti. Quel vol ? D’où ? Aucune information d’aucune sorte ne filtre à l’exception de la phrase suivante « Dominique de Villepin sera présent en Afghanistan comme il s’y est engagé. Il est déjà en route par un vol ordinaire».
Ce silence ajoute au mystère et en début de soirée, la fièvre journalistique franchit un nouvel échelon : l’ancien Premier Ministre serait en route au sein d‘un groupe comprenant d’autres candidats à la présidentielle ?
Tous les états-majors des candidats croulent alors sous les appels téléphoniques. Deux d’entre eux viennent de reconnaître qu’il est exact que plusieurs candidats sont en vol en commun pour l’Afghanistan.
Auteur: Denis Bonzy du blog Exprimeo
En exclusivité sur le blog 2villepin, dimanche 2 août, quatrième épisode: Nous avons la même passion