La guerre et la paix, le choc des inégalités et le fracas des radicalités, l’engrenage des peurs et le « basculement du monde », le frottement des idées et l’affrontement des nations : rien de tel que le grand vent de l’histoire – dont on avait imprudemment annoncé la fin et qui est « de retour » – pour mettre en branle Dominique de Villepin.
L’ancien premier ministre a beau avoir récemment évoqué sa disponibilité électorale, fût-ce dans une lointaine province française, nul doute qu’il est plus à son affaire à arpenter le vaste monde, à en comprendre la marche et à en explorer les « menaces qui s’accumulent ».
Ici, la crise économique et financière qui souffle, comme après celle de 1929, sur « les braises d’un système international déséquilibré et incertain », mais aujourd’hui d’autant plus redoutable qu’elle est mondialisée et exacerbe les autres révolutions en cours, démographique et technologique, urbaine ou éducative.
Là, la crise écologique qui impose de mettre la nature « en partage », après l’avoir trop longtemps soumise au pillage au profit d’une fraction de l’humanité.
Ailleurs, l’inquiétante crise idéologique qui résulte de « la prétention du religieux à dominer le politique » et nourrit les pulsions théocratiques que l’on voit à l’oeuvre, notamment, en Iran.
Enfin, dans le moindre recoin de la planète, ces embardées provoquées par le passage à un monde multipolaire, bousculé par les nouveaux acteurs qui émergent.
Reste, pour l’homme, à opposer sa liberté à sa « démesure ».
Cela suppose autant de « vision » que de « volonté » et de « vertu ». Dominique de Villepin se prévaut abondamment de chacune de ces qualités.
Face aux dérèglements du monde, le voilà qui esquisse une « gouvernance mondiale » capable de mettre en oeuvre concrètement le multilatéralisme, sur la base de Nations unies rénovées de fond en comble. Face au risque de « dislocation européenne » et de « lent détricotage des solidarités existantes », le voici qui plaide pour l’établissement d’un « gouvernement commun » de l’Union.
Quant à la France, elle ne saurait défendre sa singularité qu’en faisant de l’indépendance le « principe actif » de son action et en opposant à la crise une « véritable politique de modernisation, sélective et durable ».
C’est dire que l’actuel président, jamais nommé, ne s’y emploie pas. C’est esquisser, en creux, une alternative. Mieux, une « renaissance » : celle d’un « nouvel esprit » autant que celle d’un homme. L’espoir fait vivre.
La cité des hommes – Dominique de Villepin – Plon, 246 pages – 19,50 €
Source: Gérard Courtois (Le Monde – Critique parue dans l’édition du samedi 27 juin 2009)