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Dominique de Villepin en Bretagne

Remerciements à Rodolphe pour ces deux photos

On se bouscule, ce week-end au salon du livre de Vannes! Avec cette année, une tête qui dépasse: celle de Dominique de Villepin, autoproclamé premier opposant à Sarkozy, depuis que Bayrou s’est mis les doigts dans une prise et les socialistes, carrément dans le transfo. À Vannes, DDV a été accueilli comme une rock star, avec flashs et applaudissements. Il est vrai qu’il est ici dans son jardin puisqu’il a de la famille dans le coin et surtout un grand ami, François Goulard, maire de la ville et son premier supporter.

En arrivant pour présenter son nouveau bouquin « La cité des hommes », DDV a serré vigoureusement la pogne du maire mais ce qui a surpris les proches, c’est l’accolade chaleureuse qu’il a réservée à Jean-Louis Debré, président du Conseil constitutionnel et ex-président de l’Assemblée. La démonstration d’estime réciproque dépassait tellement la norme républicaine qu’on se permet d’attirer l’attention de l’entourage de Nicolas Sarkozy. Il se trame de drôles de choses dans la cité des hommes..

Ses ambitions électorales, la victoire de l’UMP aux européennes, Nicolas Sarkozy… Invité du Salon du livre de Vannes, Dominique de Villepin a aussi accepté de parler de politique. Interview au Télégramme, à lire dans ce billet.

A lire également ici: l’ancien Premier Ministre donne aussi ce dimanche une interview à Nice Matin / Var Matin / Corse Matin dans laquelle il déclare à propos de l’affaire Clearstream: « La volonté de m’écarter n’est un mystère pour personne. Raison de plus pour aller au bout de dossier ».

Interview de Dominique de Villepin au Télégramme: « L’UMP, c’est ma famille »

Le Télégramme: Les candidats se positionnent pour les régionales de 2010. Comptez-vous vous présenter ? Sous quelle étiquette ?

Dominique de Villepin: J’ai un désir d’élection. Je me déciderai en fonction des circonstances et des différentes échéances. L’élection régionale ? Je dis pourquoi pas, mais rien n’est encore arrêté. J’irai à la rencontre des Français. J’aimerais me présenter dans le cadre de ma famille politique, car j’appartiens à l’UMP. Mais tout dépendra des circonstances.

Et l’élection présidentielle de 2012 ? Ça vous arrive d’y penser en vous rasant le matin ?

Toute ma vie a été guidée par une volonté de servir, qui s’exprime différemment selon les circonstances: je l’ai fait dans un cadre administratif, dans un cadre politique et elle peut prendre d’autres formes. Ce qui est certain, c’est que nous sommes dans un monde confronté à de graves épreuves. Ma détermination est entière à participer et à apporter ma contribution, sous une forme que je serai amené à préciser le moment venu. Il serait totalement ridicule d’être plus précis aujourd’hui.

On a accolé à François Bayrou l’étiquette de meilleur opposant de Nicolas Sarkozy. Qu’est-ce que cela vous inspire ?

Moi, je n’ai jamais prétendu ni voulu faire partie de l’opposition. Ce qui paraît important, dans une famille politique, c’est qu’il y ait une capacité de remise en cause et à proposer une alternative. Face aux difficultés, il faut pouvoir discuter du meilleur chemin pour atteindre ses objectifs. Ce n’est pas une position d’alternance mais bien d’alternative dans laquelle je me situe. Tout pouvoir a besoin d’être remis en cause, d’être stimulé, d’être aiguillonné. Il ne faut pas hésiter à dire ce que l’on pense.

Le bon score de l’UMP aux européennes ne vous pousse-t-il pas à mettre de l’eau dans votre vin dans vos critiques ?

Je me méfie beaucoup des victoires qui peuvent être en trompe-l’oeil. Aux européennes, c’est l’abstention qui est sortie victorieuse. Il ne faut pas se tromper: elle marque une inquiétude pour l’avenir et une désaffection vis-à-vis de l’Europe. Je crois que le combat, il est là. Si mon parti politique s’en est mieux tiré que les autres, tant mieux.

Si vous avez intitulé votre livre « La Cité des Hommes », et non « Les hommes de la cité », c’est parce que ça aurait fait trop sarkozyste ?

Le défi aujourd’hui, c’est de construire un monde dans lequel les hommes pourraient être le centre de la vie. Il faut bâtir une forme humaine, une gouvernance, des principes, et c’est ça que j’ai voulu traiter dans mon livre. Sachant que le citoyen est le centre de la cité, c’est lui qui a vocation à faire les choix.

Source: Le Télégramme (Introduction du billet: rubrique Grain de sel – Interview: Laurent Guenneugues et Emmanuel Nen – Photo: Emmanuel Nen)

Interview de Dominique de Villepin à Corse Matin: « Je ne postule à rien et je n’écarte rien »

Il ne s’agit ici ni de Napoléon ni de poésie, moins encore de sarkoincompatibilité. Sur l’itinéraire en pointillé de son destin national, Dominique de Villepin arpente avec aisance une parenthèse vaste comme la superficie de la Terre.

De ses clés de diplomate humaniste, il ouvre les portes de La cité des hommes sur les décombres de laquelle, il incite à creuser les fondations d’une société humaine nouvelle à l’échelle planétaire où les citoyens du monde édifieraient leur propre avenir avec pour ciment la liberté, la démocratie, la laïcité, la responsabilité, la tolérance. Si le feu des vieux réseaux de solidarité qui ont illuminé l’histoire de l’Humanité venait à décliner un peu plus encore, le pire serait à craindre.

Dominique de Villepin, qui entretient ce feu sacré, est moins moraliste qu’éclaireur. Prendre de la hauteur et courir le monde lui confèrent la stature présidentielle. Mais l’éclaireur éclaire à peine notre lanterne sur le sujet. Pour l’auteur de L’empire de la solitude, être seul, c’est déjà être avec soi-même. Un passage obligé avant de marcher vers un horizon peuplé d’espoir. Peut-être, de pouvoir.

Corse Matin: Préconiser une sorte de gouvernement mondial basé sur un humanisme moderne et laïc, c’est un peu de l’angélisme…

Dominique de Villepin: Lorsqu’on est confronté à une crise d’une telle ampleur, globale, durable, qui touche tous les pays et tous les secteurs, il faut trouver des solutions à la hauteur des enjeux. L’indépendance des états, au sein desquels les peuples ont besoin d’affirmer leur identité, n’appartient pas au passé. Elle n’est ni l’autarcie ni le protectionnisme. Elle est l’ancrage de chaque citoyen dans la mobilisation d’une communauté à construire.

Poser les jalons d’une gouvernance régionale et internationale, ce n’est pas enlever du pouvoir aux états, c’est, au contraire, accroître leur responsabilité et leur capacité d’action, là où elles ne se sont jamais exercées. On a besoin d’un Conseil de sécurité qui agisse avec une légitimité incontestable, non pas pour geler les crises, en Afrique, au Proche-Orient, mais pour les régler.

C’est aussi valable pour l’Europe dont vous dites qu’elle est en cale sèche ?

Il faut une gouvernance européenne plus forte, une Commission plus forte, un Parlement plus fort pour remettre cette Europe en marche. La coopération franco-allemande a besoin d’une nouvelle dynamique pour, par exemple, produire des champions industriels. Tirons les leçons du rendez-vous manqué dans le domaine du nucléaire civil. Il est aussi crucial d’instituer un grand pôle de référence, un pôle paneuropéen rassemblant, au-delà d’elle, la Russie, la Turquie, l’Afrique du nord, un espace à la mesure des grandes entités mondiales que sont la Chine et l’Inde.

Peut-on espérer une solidarité humaine planétaire à l’ère de la mondialisation numérique ?

Oui, si on prend en compte toutes les composantes de la modernité. La complexité extraordinaire du monde exige d’enclencher un cercle vertueux avec une hiérarchie, de l’ordre, des partenariats, une interaction fonctionnelle et, pour cela, il faut des organisations qui définissent entre elles des rapports créatifs de confiance, de solidarité, de compréhension. Qui doivent s’adapter aux grands défis et se fixer des objectifs crédibles. La mondialisation crée les conditions d’un intérêt général à l’échelle planétaire.

Mais comment surmonter de si grandes injustices que sont la pauvreté, la faim, les guerres, les exils climatiques ?

C’est la mobilisation des associations, des ONG, des consciences individuelles, qui fait bouger les lignes. Les citoyens sont souvent en avance sur leurs dirigeants et peuvent créer un effet d’entraînement. Ils ont été précurseurs en matière d’environnement, montrant la voie aux États-Unis et même à la Chine. C’est pareil pour la pauvreté, la faim. Seuls un vrai effort collectif et une volonté organisée qui s’affranchira de l’égoïsme des états, pourront en venir à bout.

Il faut aussi des hommes d’état d’exception…

L’arrivée de Barack Obama est un atout pour la communauté internationale. Une Europe mieux organisée politiquement peut jouer la complémentarité et l’émulation pour bâtir des partenariats susceptibles d’éviter le duopole entre la Chine et les USA, tout en faisant prospérer son héritage d’humanisme et de diversité.

Mais Mahmoud Ahmadinejad, lui, n’en est pas un…

Allons plus loin dans la volonté de dialogue, forçons la né
gociation pour freiner toute velléité de repli. Mais ne nous trompons pas de signaux adressés à l’Iran. Il faut offrir des perspectives de coopération et ainsi lui montrer qu’il a tout à gagner à choisir la voie pacifique, sans perdre de vue la nécessité de maintenir l’espoir d’un peuple qui a soif de reconnaissance et d’identité. Répondre à cette équation, c’est repousser le spectre de la radicalisation.

Dans votre livre, vous ne citez jamais Nicolas Sarkozy…

Mon propos se situe dans une perspective historique mondiale, pas dans le jeu des individualités.

En revanche, à son égard, vous êtes passé de la critique sévère à l’encouragement. Pourquoi ?

Vous savez, je suis d’une grande fidélité à mes convictions. Je contribue à la réflexion, à l’évolution de l’action face à des situations changeantes. Des choses ont été réussies, d’autres pas. Nous entrons dans une nouvelle phase du quinquennat, le moment de faire un bilan lucide des deux ans écoulés et d’opérer les bons choix qui lui donneront un second souffle.

Quels choix, selon vous ?

Il y a des réformes à privilégier pour préparer la sortie de crise, car la hiérarchie des puissances va être bouleversée. Par exemple, se concentrer sur une grande politique de l’innovation qui inclut l’éducation, la recherche, la réforme universitaire, tout ce qui a trait à l’économie de la connaissance. Mais aussi développer les outils de la politique de l’emploi qui demeure la préoccupation majeure des Français. Avant même d’évoquer le report de l’âge de la retraite, faisons en sorte que soient mieux pris en compte les difficultés d’accès à l’emploi des jeunes, des femmes ou des seniors. Ne pas rester non plus les bras croisés face au trou abyssal de la sécu et au déficit public multiplié par trois depuis la période où j’étais Premier ministre. En un mot, porter prioritairement l’effort sur ce qui ne va pas.

Et, à l’heure du remaniement, si le Président de la République vous confiait le Quai d’Orsay voire Matignon ?

Dans toute vie politique, il y a des rythmes à respecter. J’étais dans l’action, je suis dans la respiration. Je crois être plus utile comme force de propositions et comme voix indépendante mettant en garde contre certaines facilités…

Vos voyages, vos conférences, ce livre, c’est l’attitude de quelqu’un qui se forge une image présidentielle…

La politique, c’est mener de pair la réflexion et l’action. C’est aussi des circonstances favorables ou plus difficiles. Je ne postule à rien et je n’écarte rien.

Vous pourriez, malgré tout, vous inscrire dans une stratégie de recours…

Je veux que la France réussisse maintenant, que la majorité à laquelle j’appartiens réussisse maintenant. Je ne suis pas dans une stratégie d’ambition personnelle mais dans une volonté d’alternative et non pas d’alternance.

Votre intention de vous présenter aux Régionales ne plaît pas à tout le monde…

J’éprouverais un grand plaisir à aller à la rencontre des Français. Nous verrons quand et à quelle élection. Mais c’est vrai, j’ai entendu quelques réticences s’exprimer, émanant parfois de ceux qui me reprochaient hier de ne m’être jamais confronté au suffrage universel…

Dans l’affaire Clearstream, vous n’éviterez pas le procès qui aura lieu le 21 septembre…

Il y a eu trop d’instrumentalisations et trop de malentendus pour ne pas attendre avec impatience ce rendez-vous qui fera éclater la vérité au grand jour.

L’affaire a pris la dimension d’un règlement de comptes politique…

Il y a eu, en effet, ce dessein d’en faire ce qu’elle n’était pas, une affaire politique. La volonté de m’écarter n’est un mystère pour personne. Raison de plus pour aller au bout de dossier.

Une condamnation vous éloignerait un temps de la vie politique ?

J’ai du mal à imaginer une condamnation, dans un Etat de droit, quand on est innocent.

Source: Corse Matin (Interview réalisée par Jean-Marc Raffaelli)

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