Le gouvernement revient à la charge sur le travail le dimanche. Au risque d’ouvrir un nouveau front social et de diviser la majorité, le ministre du Travail Brice Hortefeux a annoncé dimanche dernier le dépôt « dans les toutes prochaines semaines » d’une proposition de loi, pour un débat en juillet au Parlement.
L’examen du texte initial avait été reporté sine die
On pouvait croire le dossier enterré depuis le débat houleux dans l’hémicycle le 17 décembre dernier sur la proposition de loi du député UMP Richard Mallié.
Le gouvernement avait alors reporté sine die l’examen du texte, officiellement en raison des 7.400 amendements déposés par le PS, en réalité à cause de la mobilisation insuffisante des députés UMP, dont une partie est opposée à toute remise en cause du repos dominical.
Depuis, l’exécutif et les responsables de la majorité n’avaient cessé d’assurer que le texte n’était pas enterré, sans le réinscrire à l’ordre du jour de l’Assemblée. Début avril, le gouvernement avait demandé le retrait d’amendements de sénateurs centristes sur le sujet, en échange d’un engagement à aborder ultérieurement la question.
Dépôt d’un nouveau texte
Invité dimanche du « Grand rendez-vous » Europe-1/Le Parisien/Aujourd’hui en France, Brice Hortefeux a annoncé le prochain dépôt d’un nouveau texte.
« Le dossier était bloqué, nous allons le débloquer. Une proposition de loi (NDLR: d’initiative parlementaire) sera déposée dans les toutes prochaines semaines. Un texte sera débattu en juillet », a dit le ministre du Travail, qui s’exprimait devant le secrétaire d’Etat aux Relations avec le Parlement Roger Karoutchi et le secrétaire général de l’UMP Xavier Bertrand.
Sur le contenu du texte, le ministre du Travail a évoqué un dispositif proche de celui qui figurait dans la proposition Mallié. Il a ainsi expliqué que le texte se focaliserait sur les grandes agglomérations où une « habitude de consommation » le dimanche existe -Paris, Marseille et Lille-, ainsi que sur les zones touristiques et thermales. Il a précisé que le texte ne remettrait pas en cause la règle des ouvertures exceptionnelles des magasins cinq dimanche par an dans les autres communes.
« Il faut des règles simples qui permettent aux salariés qui le souhaitent, dans des zones bien définies, de pouvoir travailler volontairement », a résumé M. Hortefeux. Sept millions et demi de Français travaillent régulièrement ou occasionnellement le dimanche, selon les partisans de l’ouverture des magasins. L’objectif du texte n’est pas une « généralisation totale du travail le dimanche », mais « une prise en compte de l’aspiration de nos concitoyens qui souhaitent pour une bonne part faire leurs courses le dimanche », selon M. Hortefeux.
Le ministre du Travail a précisé qu’il consulterait les partenaires sociaux et les représentants des religions sur le nouveau texte. Ces derniers s’étaient fortement mobilisés contre ce qu’ils considèrent comme une remise en cause du repos dominical, un droit qui remonte à 1906.
Jean-François Copé, patron des députés UMP, a assuré le gouvernement de son soutien. « On s’est mis d’accord sur deux dispositions importantes qui sont des aberrations », en particulier sur les dispositions concernant les zones touristiques et les zones commerciales, a expliqué le maire de Meaux. « Ce sera mis en débat ».
« Naturellement, il ne s’agit pas de faire travailler tous les Français le dimanche, il s’agit simplement de répondre à des questions très spécifiques qui concernent en particulier les zones touristiques », a déclaré François Fillon aux journalistes à l’occasion d’un déplacement consacré au plan de relance. « Ce texte (…) tiendra compte d’un certain nombre de débats qui ont eu lieu depuis le dépôt de ce texte devant l’Assemblée nationale. Nous avons encore du travail devant nous, mais nous voulons que dans les zones touristiques, dans un certain nombre de secteurs où d’ailleurs les employés le souhaitent, la possibilité de travailler le dimanche soit offerte », a-t-il dit, limitant l’ambition du texte.
Opposition de la gauche, des syndicats et d’une partie de l’UMP
Les socialistes, à l’image de François Hollande, jugeaient eux aussi ce texte « inopportun » en cette période de crise. « Remettre sur le tapis cette affaire de travail le dimanche, c’est totalement décalé par rapport à la situation », a renchéri sur Radio-J le numéro deux du PS Harlem Désir.
« L’ouverture des commerces le dimanche bénéficiera avant tout aux grandes surfaces et sera au final détériorateur d’emplois. Ca ne créera pas d’emplois, ça en détruira », a déploré Bernard Thibault, patron de la CGT dès lundi. « Je pense que les salariés, qui sont en train de perdre leur emploi, vont être bien surpris que ce soit la priorité du gouvernement », a ironisé pour sa part François Chérèque, secrétaire général de la CFDT.
Dans l’immédiat, l’annonce d’un nouveau texte a remobilisé les opposants UMP. « Je n’ai pas le sentiment que ce soit le sujet du moment », a réagi Jacques Remiller, député-maire de Vienne (Isère) interrogé par l’Associated Press. Il attendait néanmoins de voir le texte pour se faire une opinion définitive.
Sources: Associated Press et Journal du Dimanche