De Madrid à Londres, en passant par New-York, les grands quotidiens internationaux critiquent les propos peu amènes qu’aurait tenus mercredi le chef de l’Etat français à l’égard de ses homologues espagnol, américain ou allemand.
C’est par Libération que le scandale est arrivé. Dans son édition de jeudi, le quotidien rapportait les propos qu’aurait tenus Nicolas Sarkozy devant des parlementaires de la majorité et de l’opposition la veille. Selon le journal, qui citait plusieurs de ces élus, Nicolas Sarkozy s’était livré à un retour d’expérience sur le G20 qui a rapidement viré à la critique de ses homologues étrangers.
Le chef de l’Etat aurait ainsi lancé, à propos de Barack Obama : « un esprit subtil, très intelligent et très charismatique. Mais il est élu depuis deux mois et n’a jamais géré un ministère de sa vie. Il y a un certain nombre de choses sur lesquelles il n’a pas de position ». Pour Nicolas Sarkozy, le président américain n’est tout simplement « pas toujours au niveau de décision et d’efficience » de son homologue français.
Autre cible de la critique présidentielle, Angela Merkel. Selon Nicolas Sarkozy, « Quand elle s’est rendu compte de l’état de ses banques et de son industrie automobile, elle n’a pas eu d’autre choix que de se rallier à ma position ».
Et ce n’est pas fini. Au tour de Jose Luis Zapatero, le chef du gouvernement espagnol, d’en prendre pour son grade. Interrogé par Henri Emmanuelli, Nicolas Sarkozy lance, à son propos, selon Libération : « Il n’est peut-être pas très intelligent. Moi j’en connais qui étaient très intelligents et qui n’ont pas été au second tour de la présidentielle », explique le chef de l’Etat, dans une allusion à Lionel Jospin. Et de conclure : « dans ma carrière politique, j’ai souvent battu des gens dont on disait qu’ils étaient plus intelligents et avaient fait plus d’études que moi. »
Seul dirigeant à trouver grâce aux yeux de Nicolas Sarkozy, son homologue italien, Silvio Berlusconi : « L’important dans la démocratie, c’est d’être réélu. Regardez Berlusconi, il a été réélu trois fois. » Ce qui est faux, Silvio Berlusconi ayant été élu trois fois, mais réélu deux fois seulement.
Ces propos tenus en privé, mais lâchés à des parlementaires, donc en sachant qu’ils seraient rapportés, Nicolas Sarkozy les paye vendredi d’une salve de critiques de la presse internationale.
Dans un article au vitriol, le quotidien britannique The Guardian note que le chef de l’Etat s’est « surpassé », qui avait « déjà irrité ses homologues avec sa vantardise, les avait épuisés avec son hyperactivité et offensés avec sa tendance à envoyer des textos lors des réunions. »
Même ironie dans le Telegraph, pour qui « Sarkozy n’est pas connu pour son tact » et possède « une réputation de grossièreté ». L’article consacré par le quotidien aux sorties présidentielles est d’ailleurs titré « Nicolas Sarkozy insulte les leaders mondiaux autour d’un déjeuner ». Le Times parle quant à lui de « fin de la brève lune de miel franco-américaine » et estime que « Sarkozy est irrité par l’adulation dont jouit un dirigeant américain sans expérience, dont la popularité a éclipsé (sa) réputation de sauveur du monde ».
Pour le New York Times, qui n’est pas tendre non plus, Nicolas Sarkozy est connu pour sa tendance à « se vanter et descendre ses homologues ». « Dans le monde de Sarko, le président Obama est faible, inexpérimenté et mal conseillé, Angela Merkel n’a pas compris les problèmes économiques de son pays… « , rapporte le quotidien.
En Espagne, El Periodico glose « sur le caractère fanfaron » du président français, tandis que La Vanguardia doute « que ce soit la meilleure manière de préparer » sa visite en Espagne, qui aura lieu les 27 et 28 avril prochains. La presse conservatrice, quant à elle, a sauté sur les propos de Nicolas Sarkozy pour nourrir ses critiques du dirigeant socialiste. ABC en profite pour estimer que Zapatero est « stupide, borné, sectaire, têtu, n’en faisant qu’à sa tête et divisant l’Espagne ». Le parti conservateur a quant à lui commencé par estimer que « Sarkozy pourrait avoir raison » avant de rectifier, notant que « Zapatero est notre Président et, quoi qu’il arrive, s’il est attaqué de l’étranger, nous serons amené à le défendre ».
Pris d’assaut par les correspondants étrangers, l’Elysée a seulement nié les propos de Nicolas Sarkozy sur Zapatero, pas les autres commentaires.
Certains députés présents au déjeuner de mercredi, comme Didier Migaud, nient que ces propos aient été tenus. D’autres notent que dans cette phrase, Nicolas Sarkozy s’en prenait surtout aux socialistes français et à Lionel Jospin.
Source: Samuel Laurent (Le Figaro)