Recherche de boucs-émissaires à la crise, recours aux violences, occasions manquées du début du quinquennat, prochaine rencontre avec François Bayrou, avenir politique: suite et fin des principaux extraits de l’intervention de Dominique de Villepin, ce mardi, au Talk Orange – Le Figaro.
Sur la recherche de boucs-émissaires à la crise
« Dans la crise, il faut éviter les boucs-émissaires: les patrons, les banquiers, quiconque… Je crois qu’il faut éviter les amalgames. Mais pour éviter les boucs-émissaires, pour éviter les stigmatisations, il faut être juste. Et c’est vrai que l’immense majorité des patrons (quand on pense qu’ils gagnent en moyenne 4000 euros) n’ont rien à voir avec ceux qui effectivement ont des parachutes dorés, plus des stocks options, plus des bonus, plus une rémunération mensuelle.
Donc je crois qu’il faut savoir faire la part des choses, il faut fixer une règle et il faut un peu d’exemplarité. Vous savez, quand on est chef, quand on commande, eh bien, on doit donner l’exemple. »
Sur le recours aux violences
« C’est évidemment une tentation quand il y a de la frustration, quand il y a de l’humilation, quand il y a le sentiment d’injustice. C’est pour cette raison qu’il faut faire preuve de transparence et de justice sociale. »
Les occasions manquées du début du quinquennat
« Moi, je l’ai dit: les Français ont pu avoir le sentiment au cours des deux dernières années qu’il y a eu en matière de justice sociale, un certain nombre d’occasions manquées.
Vrai ou faux? Le paquet fiscal: sans doute, certains des reproches qui ont été faits à ce paquet fiscal sont injustes, mais le sentimen des Français a été celui-là.
Il faut partir de la politique et de la réalité telle qu’elle est. Et c’est dans ce sens que nous avons besoin de gestes forts et je crois que si l’on veut éviter d’avoir à faire des concessions beaucoup plus importantes, et dans certains cas stigmatisantes et injustes, eh bien, il faut faire ces gestes forts au bon moment pour assurer la cohésion.
Mais il y a une chose certaine, je pense que tous les Français sont d’accord là-dessus: dans tous les cas de figure, les violences sont injustifiables. On peut faire en sorte de les éviter en étant, justement, juste. »
Prochaine rencontre à François Bayrou?
« Je pense que la vie politique manque de dialogue. Vous savez, c’est pas en érigeant des forteresses, des cloisonnements… On est dans une période où tout le monde doit être mobilisé pour apporter des réponses aux Français et il faut de la bonne volonté en politique si on veut éviter les procès d’intention, si on veut éviter les stigmatisations.
Donc, se parler, se poser des questions, essayer d’apporter des réponses, essayer d’avancer ensemble vers des solutions, je crois que c’est la première responsabilité du politique. »
Dominique de Villepin dans l’opposition?
« J’ai dit ce que je dis bien avant la crise. (…) Je suis dans le souci d’apporter une contribution à la sortie de crise et de faire en sorte que notre pays soit le mieux armé et le mieux doté pour faire face à la crise. Et je dis depuis le début: si nous voulons réussir, soyons justes. Si nous voulons réussir, concentrons-nous sur l’essentiel. Si nous voulons réussir, évitons de nous disperser.
Donc la vraie question, c’est pas de se poser ces questions-là en 2012 (parce qu’alors, nous serons confrontés à des échéances), c’est de faire en sorte que pour gagner, l’action gouvernementale, l’action présidentielle ait toutes les cartes en main.
Or, il y a, à mon sens, un effort de concentration sur l’essentiel, un effort de modernisation… Je l’ai dit, j’ai salué l’effort en matière d’investissement. Mais investir, c’est bien, investir au bon endroit, c’est mieux ! Et investir en matière d’innovation, investir dans le développement durable, comme le font un certain nombre de grands plans de relance, c’est se donner davantage de chances de sortir bien et vite de la crise. »
Quel avenir politique?
« La question, c’est de savoir comment on peut défendre l’intérêt général, comment on peut servir notre pays, chacun à sa place, avec une nécessité de l’écoute. (…)
Une fois de plus, le combat pour la France, c’est pas 2012. Vous savez, les Français, leur souci, c’est pas 2012. Leur souci, c’est comment on fait pour, face à des difficultés immenses, eh bien, d’apporter les bonnes réponses, comment on fait pour soulager l’inquiétude et les souffrances des Français, c’est ça qui doit nous mobiliser aujourd’hui, et c’est la seule question. Certainement pas les ambitions partisanes et les ambitions personnelles. »
Source: Dominique de Villepin, invité du Talk Orange – Le Figaro (7 avril 2009)