Près d’un mois après son adoption par le Parlement, le travail de pédagogie sur les 360 milliards d’euros alloués au plan de sauvetage des banques peine à porter tous ses fruits. Et les élus UMP s’inquiètent.
Et ce, en dépit des efforts déployés par Nicolas Sarkozy et ses ministres, qui s’échinent à répéter – pour contrecarrer les critiques de la gauche – que si l’Etat prête aux banques, ce n’est pas au détriment des Français mais bien pour sauver « leur argent ».
Partout, les électeurs qui interpellent les élus de la majorité accompagnent leurs doléances d’un même reproche: « Vous avez trouvé 360 milliards d’euros pour les banques, alors pourquoi n’y en a-t-il pas pour nous ? »
Lors d’un chat organisé par le parti majoritaire, il y a quelques jours, plus de 400 internautes ont envoyé une question sur ce thème à Christine Lagarde.
Ce n’est donc pas un hasard si l’UMP a entamé en fin de semaine dernière un « Tour de France » pour expliquer à ses sympathisants « tout » ce qu’il doivent savoir sur la crise financière et les réformes gouvernementales.
« Pas question qu’on nous refasse le coup du paquet fiscal et le mensonge des 15 milliards d’euros pour les riches ! » tempête Jérôme Chartier, le député du Val-d’Oise, qui anime ces réunions.
Comment répondre au « pourquoi pas nous? », demande Benoist Apparu?
Dans leurs circonscriptions, les députés de la majorité sont bousculés.
« Les gens ont compris que le plan était nécessaire. Ce qui manque – et c’est le plus compliqué -, c’est répondre au pourquoi pas nous ? », explique Benoist Apparu, le député UMP de la Marne, qui y voit comme « un bout de Scotch que la majorité peut traîner des années sur le bout des doigts » sans parvenir à s’en dépêtrer.
« On peut encore corriger le tir, mais le temps presse. Si la pédagogie ne prend pas d’ici deux ou trois mois, on aura du mal à éviter une réaction en chaîne », s’inquiète Arlette Grosskost (Haut-Rhin).
François Goulard: « On n’est plus à 100 millions d’euros près… »
Le villepiniste François Goulard (Morbihan) juge la tâche compliquée par l’annonce d’un déficit public supérieur à 3 % du PIB l’an prochain: « Puisque la barre est tombée, les Français vont estimer qu’on n’en est plus à 100 millions d’euros près… »
Dans ce climat, Yves Bur, le député du Bas-Rhin, ne parvient pas à cacher son pessimisme. Désormais, prévient-il, « tout effort social refusé sera jugé à l’aune des milliards mis à disposition des banques ».
Pour lui, le gouvernement doit à nouveau hausser le ton vis-à-vis des établissements bancaires, dont l’image est « déplorable », afin d’éviter « le risque de collusion » entre le politique et la finance.
Bruno Le Maire, très préoccupé par l’accès au crédit que les banques réservent aux PME
S’ils assurent ne pas vouloir faire des banques des boucs émissaires (« Elles doivent aussi faire attention à leurs comptes de résultat »), les élus de la majorité n’en critiquent pas moins avec insistance leur « extrême frilosité ».
« La réalité, c’est qu’en dépit des dispositifs mis en place elles ne veulent pas jouer le rôle de soutien à l’économie que certains attendent d’elles », déplore Bruno Le Maire, se disant « très préoccupé » par la capacité d’accès des PME aux crédits, « parfois au bord du dépôt de bilan », en raison des revirements des banques.
Le député de l’Eure se sent « pris en tenaille » entre les patrons de PME (« Pas un jour sans que l’un d’eux m’appelle ») et les banques (« qui me répondent que ce n’est pas mon job »).
L’Etat doit-il nationaliser ou entrer dans le capital des banques ? C’est « trop tôt pour le dire », affirme-t-il, avant de glisser: « Il faudra sans doute aller plus loin » que ce qui est fait aujourd’hui.
Source: Pierre-Alain Furbury (Les Echos)