Il y a cinquante ans, le 4 septembre 1958, place de la République à Paris, le général de Gaulle dévoilait les grandes lignes du texte constitutionnel qu’il allait soumettre à l’approbation directe du peuple français.
Jean-Louis Debré, le fils de Michel Debré, le père de la Ve République, préside le Conseil constitutionnel depuis deux ans. Il commente l’évolution des « tables de la loi de la République ».
France Soir: Il y a cinquante ans, le 4 septembre 1958, place de la République à Paris, le général de Gaulle dévoilait les grandes lignes du texte constitutionnel qu’il allait soumettre à l’approbation directe du peuple français. On disait alors que cette Constitution était taillée sur mesure pour le Général. Il n’est pas inutile de rappeler le contexte…
Jean-Louis Debré: Cette Constitution, rédigée par mon père, alors garde des Sceaux, était le fruit d’une analyse précise des causes des dysfonctionnements de la IVe République. On a oublié alors que les gouvernements ne duraient pas plus de six ou sept mois, que le budget de la France était rarement voté en temps utile et que les crises politiques se succédaient les unes aux autres. La France ne fonctionnait pas, malgré la qualité de certains de ses dirigeants. Les constituants de 1958 ont voulu restaurer l’autorité de l’Etat, la capacité pour le gouvernement d’avoir une politique autonome et l’efficacité du contrôle parlementaire. Ceux qui ont affirmé qu’elle avait été faite pour de Gaulle se sont trompés. Ceux qui prédisaient cela étaient aveuglés par la politique et obsédés par le retour aux jeux des partis politiques. Les institutions de la Ve République ont traversé les crises politiques, nationales ou internationales, les alternances et les cohabitations.
Mais la Constitution a été modifiée. La dernière fois, c’était au printemps dernier. On a parlé de retour à la IVe, ou encore de Vie République…
C’est vrai, elle a été modifiée, notamment par le général de Gaulle, qui a souhaité que le président de la République soit élu au suffrage universel, et par Jacques Chirac, qui a réduit le mandat du chef de l’Etat de sept à cinq ans. Nous sommes à la 24e révision constitutionnelle et la Ve République existe toujours.
N’aurait-il pas fallu réformer le Conseil constitutionnel ?
Le Conseil constitutionnel est une institution essentielle. Par sa jurisprudence, il s’est imposé dans le panorama français. C’est tellement vrai que la dernière réforme constitutionnelle va permettre, à l’occasion de procédures judiciaires, aux citoyens concernés de saisir le Conseil constitutionnel. Celui-ci ne sera plus seulement saisi par les députés ou sénateurs, par le président de la République, le Premier ministre, le président des assemblées, mais suivant certaines modalités à l’initiative des justiciables.
Le Conseil constitutionnel est-il prêt a assumer ces nouvelles fonctions ?
Assurément. Depuis deux ans, les avocats ont pris le chemin du Conseil constitutionnel. Pour le contentieux électoral, ils viennent plaider leurs dossiers, c’est ce qu’on appelle le « principe du contradictoire ». Par ailleurs, vous le savez, en ce qui concerne l’examen par le Conseil constitutionnel des recours des parlementaires contre des lois, j’ai également introduit dans notre procédure la possibilité pour les auteurs de la saisine d’être entendus. Vous avez même vu récemment, pour l’examen de la loi dite « de rénovation de la démocratie sociale », que nous avons auditionné les représentants de toutes les organisations syndicales, c’était une première. Nous sommes prêts à toutes ces nouvelles attributions.
Source: France Soir