A la tête d’une Union européenne qui peine à parler d’une seule voix face à la Russie, le président français, Nicolas Sarkozy, a pris le risque de s’impliquer dans le dossier géorgien pour tenter de résoudre, après le non irlandais, ce deuxième écueil diplomatique de la présidence française.
L’accord des deux belligérants sur le plan en six points, obtenu mardi au prix d’une journée de discussions-marathon alors qu’il espérait négocier en une dizaine d’heures, n’est cependant qu’une première étape : il reste à la présidence française à trouver un consensus parmi les Vingt-Sept, divisés en deux blocs.
Les partisans du dialogue avec les Russes – Italie, Allemagne – ne veulent pas d’une alliance « anti-Russie », dont l’UE dépend à hauteur de 30% pour ses besoins énergétiques.
A l’opposé, les anciens satellites soviétiques, qui sont entrés dans l’UE en 2004, sont partisans de la manière forte contre Moscou. Mardi, à l’heure où Nicolas Sarkozy négociait avec Mikhaïl Saakachvili dans un bureau du Parlement de Tbilissi, les présidents polonais, lituanien et estonien et le Premier ministre letton participaient à une manifestation antirusse devant l’édifice.
L’Histoire nourrit des sensibilités différentes, a reconnu le président français lors d’une conférence de presse en pleine nuit dans la capitale géorgienne. « Mais nous voulons tous la paix », a-t-il assuré.
S’il permet de sauver la tête du président pro-occidental de la Géorgie, le compromis proposé par la présidence française comporte des clauses synonymes de victoire pour la diplomatie russe.
Il ne prévoit en effet aucun calendrier précis pour les retraits militaires et autorise même Moscou à prendre des « mesures additionnelles de sécurité » près de l’Ossétie du Sud – autrement dit à renforcer sa présence militaire en territoire géorgien – dans l’attente du « mécanisme international » de surveillance réclamé par Tbilissi.
En juin, Nicolas Sarkozy s’était attiré l’ire de certains Etats membres en déclarant unilatéralement qu’il faudrait nécessairement faire revoter les électeurs irlandais sur le traité de Lisbonne. Désormais, il prend soin de mettre en avant ses nombreux contacts avec les autres capitales de l’UE. Et revendique un succès collectif des Vingt-Sept.
Pour la première fois, souligne-t-on à l’Elysée, l’Union européenne « se trouve être un interlocuteur accepté et sollicité par la Russie ». Face à un conflit à ses portes, l’Europe « doit exprimer une volonté politique, c’est ce qu’elle fait en ce moment ». Les problèmes du Caucase ne sont pas réglés pour autant « mais qui pensait qu’on les réglerait » d’un coup ?, s’est défendu le président français.
Source: Laure Bretton (Reuters)