Dominique de Villepin a été entendu aujourd’hui par les juges de l’affaire Clearstream. Arrivé peu avant 15H00, M. de Villepin, accompagné de ses deux avocats, Mes Olivier d’Antin et Luc Brossollet, a quitté le pôle financier peu après 15H30 sans faire de déclaration à la presse.
Dans un réquisitoire aux fins de complément d’information signé le 3 juin, le parquet avait demandé aux juges Jean-Marie d’Huy et Henri Pons de reprendre leur enquête pour mieux cerner le rôle de Dominique de Villepin dans la transmission de listings falsifiés à la justice, au printemps 2004.
Il avait requis dans ce cadre une nouvelle audition de l’ancien Premier ministre, pourtant déjà entendu pendant cinquante-quatre heures par les juges durant l’instruction.
Les juges le soupçonnent d’avoir participé à une machination visant à déstabiliser Nicolas Sarkozy, en l’accusant, avec d’autres personnalités, de posséder des comptes occultes à la chambre de compensation financière Clearstream.
Mais, pour le parquet, les charges « n’apparaissent pas suffisantes » en l’état pour justifier son renvoi devant le tribunal correctionnel.
Dans le réquisitoire supplétif, le procureur de Paris, Jean-Claude Marin, écrit en effet que l’instruction menée par les juges d’Huy et Pons «n’apporte pas de réponse qui permettraient de lever le doute sur la connaissance exacte qu’avait Dominique de Villepin (…) du montage destiné à faire croire en l’existence des comptes occultes (…) Clearstream».
Rappelons qu’en trois ans et demi, les juges ont déployé des moyens hors normes pour un dossier de dénonciation calomnieuse, qui s’est mué en scandale d’Etat.
Des centaines d’heures d’auditions, des perquisitions dans les hautes sphères du pouvoir: les juges d’Huy et Pons n’ont reculé devant rien pour établir si oui ou non Dominique de Villepin avait tenté de déstabiliser Nicolas Sarkozy en 2004 pour lui barrer la route vers l’Elysée.
A lui seul, Dominique de Villepin a été entendu pendant 54 heures en huit auditions, dont l’une a duré 17 heures, sans qu’il ne soit encore prouvé qu’il ait eu conscience du caractère falsifié des listings, condition indispensable à sa prétendue culpabilité.
Les deux magistrats avaient signifié aux parties le 22 février la fin de leur enquête sur cette saga judiciaire dans laquelle cinq personnes, dont l’ancien Premier ministre, sont mises en examen.
Après ce complément d’information, ils devront une nouvelle fois clore leur instruction, ouvrant la voie à une nouvelle période de trois mois aux parties pour demander des actes supplémentaires.
Le parquet prendra ensuite ses réquisitions avant que les juges ne se prononcent définitivement sur le renvoi des mis en examen devant le tribunal correctionnel pour un procès en 2009.
La dernière audition de M. de Villepin comme la récente remise aux juges de notes du parquet et articles de presse sur l’ouvrage du journaliste Denis Robert sur Clearstream, publié avant l’affaire, ne devraient pas changer le sens du dossier. Pas plus que la récente audition de Pierre Bousquet de Florian, ex-patron de la DST, par les policiers, révélée par le site Mediapart.
A la demande du ministère public, les juges ont donc demandé mardi à M. de Villepin de préciser « s’il n’a pas disposé dans ses différentes fonctions ministérielles d’informations sur le passé d’Imad Lahoud (falsificateur présumé des listings) et sa personnalité émanant soit du service des renseignements généraux soit de connaissances privées ».
Ils ont également interrogé l’ancien Premier ministre sur « les démarches qu’il a entreprises notamment auprès de Jean-Louis Gergorin (le corbeau de l’affaire) à la suite de la connaissance même tardive du caractère mensonger des informations transmises à l’autorité judiciaire ».
Ils l’ont enfin questionné sur la déconfidentialisation tardive d’une note de juillet 2004 de la DST adressée à son directeur de cabinet évoquant l’éventuelle implication de Gergorin dans l’affaire.
Selon une autre source proche du dossier, M. de Villepin a réaffirmé qu’il ne connaissait pas Imad Lahoud avant que son nom apparaisse publiquement dans le dossier.
Il a également réexpliqué avoir demandé mi-juillet au général Rondot, qu’il avait saisi en janvier d’une enquête officieuse sur les listings en janvier 2004, de se mettre en contact avec la DST qu’il venait de saisir d’une enquête officielle en tant que ministre de l’Intérieur.
Il a enfin affirmé s’être manifesté en septembre et octobre auprès du groupe Lagardère et du procureur Yves Bot, dès que la DST lui a fait part d’éléments troublants sur le rôle de Jean-Louis Gergorin.
Source: Agence France Presse