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Réforme du temps de travail: syndicats et patronat unis dans leur critique de la méthode gouvernementale

Les députés UMP prennent le relais du gouvernement dans le conflit sur les 35 heures. Les dirigeants de la CGT, de la CFDT, du MEDEF et de la CGPME sont venus défendre mardi devant les députés de la majorité leur position commune, remise en cause par l’avant-projet de loi du gouvernement.

Les parlementaires UMP ont affiché, à quelques exceptions près, leur « solidarité » avec le gouvernement. Le député villepiniste François Goulard a cependant affirmé que « le gouvernement et le groupe sont en train de casser quelque chose d’extrêmement positif ».

Le projet de loi, couplé avec la réforme de la représentativité syndicale, doit faciliter la renégociation, entreprise par entreprise, de nombreuses modalités du temps de travail.

Cette réunion inédite entre le groupe majoritaire et Bernard Thibault (CGT), François Chérèque (CFDT), Laurence Parisot (MEDEF) et un représentant de la CGPME, prévue de longue date, s’est tenue dans un contexte social tendu par la décision du gouvernement de passer outre l’accord signé en avril par plusieurs organisations sur la représentativité et les 35 heures.

L’article 17 de ce texte signé en avril prévoyait la possibilité de négocier le temps de travail dans les entreprises sur la base du contingent d’heures supplémentaires et « à titre expérimental ». Mais dans son avant-projet de loi, qui sera présenté mercredi à la Commission nationale de la négociation collective (CNNC) et le 18 juin en conseil des ministres, le gouvernement autorise les entreprises à déroger par des accords majoritaires à la durée légale du travail.

Les signataires, qui s’estiment trahis par le ministre du Travail Xavier Bertrand, ont donc demandé aux députés, qui examineront le texte en juillet, de respecter leur accord.

Pour la CFDT, le divorce est consommé, François Chérèque ayant « le sentiment d’avoir été trompé ». « Le Premier ministre et le ministre du Travail nous ont tendu un espèce de piège, c’est-à-dire négocier sur le temps de travail ce qu’on a fait, et après, ils profitent de cette négociation pour faire autre chose. C’est une démarche qui n’est pas acceptable« , a-t-il dit.

« On vous demande simplement de nous respecter« , a déclaré François Chérèque, proposant en outre aux députés de donner aux partenaires sociaux un délai de six mois supplémentaires pour trouver un accord satisfaisant.

Au nom de la CGT, Bernard Thibault a brandi la menace de « conflits très importants » si le projet de loi est voté en l’état. « Ce texte de loi remet à plat tous les accords sur le temps de travail à l’échéance du 31 décembre 2009. C’est la première fois qu’un projet de loi nous annonce la date d’un futur conflit important de portée nationale », a ironisé le dirigeant syndical.

Dénonçant un texte « gravissime » et une « méthode malhonnête » qui « modifie autoritairement plus de 60 articles du code du travail », la CGT a jeté ses cheminots dans la bataille en déposant un préavis national de grève à la SNCF le 17, tombant le deuxième jour des épreuves du baccalauréat.

La présidente du Medef, Laurence Parisot n’a pas été la moins virulente pour critiquer, non pas les 35 heures, mais la méthode du gouvernement consistant à aller plus loin que les partenaires sociaux dans la déréglementation du temps de travail.

« Attention à ne pas briser un élan nouveau dans les rapports sociaux en France, élan qui peut être porteur de réformes fondamentales », a averti Laurence Parisot (MEDEF). Cela « pourrait être une victoire à la Pyrrhus », c’est-à-dire trop chèrement obtenue, a-t-elle tenté d’expliquer à ses interlocuteurs de la majorité présidentielle.

Ces appels n’ont pas été entendus par la majorité du groupe. Lors de la réunion, des députés UMP ont rappelé les engagements de campagne de Nicolas Sarkozy pour « sortir du carcan des 35 heures imposées ».

« Nous sommes totalement solidaires de la démarche du gouvernement. Il y a urgence à avancer« , a répondu Jean-François Copé. Le président du groupe UMP a défendu la position du gouvernement sur les accords d’entreprise, « une avancée très importante » et « tout à fait nécessaire ».

Jean-François Copé a écarté la suggestion de M. Chérèque d’un délai supplémentaire de six mois, affirmant qu’il « faut avancer » sur la question. Le président du groupe UMP s’est néanmoins dit prêt à poursuivre le dialogue. Il a proposé une autre réunion pour la fin juin-début juillet, avant l’examen du projet de loi par les députés.

Cette fin de non-recevoir a satisfait le gouvernement. « Nous sommes les uns et les autres en phase, chacun prenant clairement ses responsabilités », s’est réjoui Xavier Bertrand lors des questions au gouvernement.

Les arguments des partenaires sociaux ont quand même été approuvé par plusieurs parlementaires. Selon la porte-parole de l’UMP Chantal Brunel, « la réunion a ébranlé le groupe » et « voir Parisot et Thibault sur la même ligne dénoncer le « passage en force » du gouvernement a déstabilisé certains députés UMP« .

« Thibault est moderne par rapport au groupe UMP », ironisait le villepiniste François Goulard. « Le gouvernement et le groupe sont en train de casser quelque chose d’extrêmement positif« .

Sources: Agence France Presse, Associated Press et Reuters

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