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Interview de Dominique de Villepin sur le site Mediapart

Vous connaissez Mediapart, le site d’information lancé par l’ancien patron de la rédaction du Monde, Edwy Plenel?

Comme d’autres hommes et femmes politiques attachés à la défense de medias authentiquement indépendants du pouvoir économique, Dominique de Villepin soutient ce projet original: celui d’un site Internet d’information payant, qui entend s’affranchir de toute dépendance autre que celle de ses abonnés (9 euros par mois, 5 euros pour les chômeurs et les moins de 25 ans).

En exclusivité, l’ancien Premier Ministre a accordé aujourd’hui à Mediapart une interview dont les extraits vidéos figurent ici.

Gouvernance de l’UMP, rôle des conseillers de l’Elysée, fin du CNE, loi sur la rétention de sûreté, relation franco-allemande, élection présidentielle américaine et politique étrangère: les sujets ne manquent pas !

Sur l’UMP

Comment redresser la majorité ? Faut-il mettre fin à la direction collégiale de l’UMP (un secrétaire général et plusieurs vice-présidents) en la remplaçant par un président élu par les militants ? Permettre davantage d’autonomie et de liberté d’expression ? Pour Dominique de Villepin, le constat est clair, l’absence de leader légitime dans le parti majoritaire est synonyme de « perte de dynamisme et d’initiative de la majorité ».

« Le fait d’avoir tous les projecteurs braqués sur le président de la République, cela ne lui rend pas service, estime-t-il dans un entretien à MediaPart. C’est notre intérêt d’avoir une répartition des pouvoirs et des tâches clairement définies avec plusieurs pôles d’initiatives et de propositions. Il faut tirer les leçons de ce qui vient de se passer » et avoir « un responsable clairement défini, légitime ».

L’ancien Premier Ministre pointe du doigt le « manque de tolérance » de son parti. « Ecoutons-nous davantage, il faut plus de diversité dans les propositions. Cela passe par un président élu de l’UMP qui apportera plus de sang neuf ».

Sur les conseillers du Président Sarkozy

La médiatisation des fameux conseillers de Nicolas Sarkozy exaspère une partie de la majorité. L’ancien premier ministre revient sur cette « République des conseillers », dénoncée par le socialiste Pierre Moscovici, et ses « risques d’interférences ».

« Ces derniers mois, sur les sectes, sur la situation des comptes publics, est-ce qu’il n’y a pas eu un risque de confusion, de gêne ou d’embarras pour un certain nombre de responsables ministériels ? », interroge-t-il. « Le président de la République est parfaitement libre de souhaiter que ses conseillers aient telle ou telle mission (…). Mais s’ils expliquent et annoncent un certain nombre de décisions, il y a un risque de contradiction avec l’action gouvernementale ».

Dominique de Villepin estime qu’il faut, là aussi, « tirer les leçons des derniers mois » et fixer « une étiquette, une ligne de conduite pour chacun ».

Sur la disparition du CNE

Dominique de Villepin a également réagi à la suppression définitive du contrat nouvelle embauche (CNE), qu’il avait mis en place en 2005 pour développer l’emploi dans les entreprises de moins de 20 salariés. Jugés contraires au droit international, les CNE seront transformés en contrats à durée déterminée (CDD) ou indéterminée (CDI).

Cette condamnation juridique sonne-t-elle comme un désaveu politique pour l’ancien premier ministre ? S’il assure « comprendre la situation juridique créée par les CNE », il préfère insister sur « les progrès qui ont été créés grâce à eux: un million de contrats ont été signés, nous avons enclenché une tendance extrêmement positive qui a amorcé une forte décrue du chômage ».

« Nous avons besoin de nouveaux outils qui donnent plus de souplesse au marché du travail. Les priorités, ce sont les PME et la situation des jeunes », souligne-t-il, avant d’affirmer que « depuis la crise du Contrat Premier Embauche (CPE), il n’y a pas eu de réponse spécifique au problème du chômage des jeunes ».

Sur la rétention de sûreté

Autre réaction : celle à la polémique sur la loi de la rétention de sûreté. « En tant que juriste », Dominique de Villepin salue « la juste réponse » du premier président de la Cour de Cassation qui a refusé de remettre en cause la décision du Conseil Constitutionnel.

« Il y avait un risque de dissocier la pleine de la durée de la rétention (…) Après quelques péripéties, nous sommes revenus à une situation de droit qui me paraît plus satisfaisante ».

Sur les difficultés du couple franco-allemand

A quatre mois de la présidence française de l’Union européenne, l’ancien Premier Ministre tire la sonnette d’alarme sur les difficultés du tandem franco-allemand.

Il déplore « le report du sommet franco-allemand et de la rencontre entre les ministres des Finances. Cela n’est pas sain, il faut reprendre rapidement les choses en main. Nous ne pourrons pas exercer dans de bonnes conditions la présidence de l’Union européenne si nous ne rétablissons pas une relation de qualité avec nos partenaires allemands ».

Sur l’élection présidentielle américaine

Obama, Clinton ou McCain ? Dominique de Villepin ne tranche pas.

Mais en pleine course à la Maison Blanche, il évoque les dossiers internationaux qu’il aimerait voir développer dans la campagne. Pour lui, les Etats-Unis ont « tourné le dos à la multipolarité au fil des dernières années » et il aimerait que « tous les candidats prennent des engagements en faveur du multilatéralisme pour que les grands problèmes du monde qui échappent de plus en plus aux compétences des Etats – le développement, la justice internationale, l’environnement -, puissent être traités par une gouvernance mondiale ».

Sur la politique étrangère du Président Sarkozy

L’ancien ministre des affaires étrangères souligne ses désaccords avec la politique atlantiste menée par Nicolas Sarkozy.

« La volonté de la France de se rapprocher de l’OTAN, voire de réintégrer l’Alliance, est pour moi un vrai sujet d’inquiétude. De même concernant sa politique traditionnelle d’équilibre. La France en Europe était le pays trait d’union entre l’est et l’ouest et le nord et le sud, il est important qu’elle reste fidèle à cette politique d’équilibre ».

Source: Marine Turchi et Pierre Puchot (Mediapart)

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