Raymond Soubie, Xavier Bertrand, Bernard Thibault, Didier Le Reste, Anne-Marie Idrac, Pierre Mongin: l’issue du conflit est entre leurs mains.
Raymond Soubie, 67 ans
Il est au coeur de la réforme. Appelé par Nicolas Sarkozy à l’Elysée comme « M. Social » dès le lendemain du second tour, il consulte, prépare, rédige ou inspire presque tous les documents et conseille le président. Mais, modeste, il explique que la ligne suivie n’est inspirée que de la volonté présidentielle.
Raymond Soubie, « réaliste positif », comme il se décrit, connaît par coeur les détours des relations sociales : « Cela ne marche pas à la baguette, il y a des accélérations, des coups de frein, l’essentiel c’est de tenir sa ligne. » Et la ligne est simple : « Détermination et dialogue. » Le chef de l’Etat tient à la réforme, explique-t-il, mais « il ne souhaite pas l’affrontement ».
L’homme est un habitué des conflits sociaux : il a commencé sa carrière politique durant le long conflit aux PTT en 1974, comme conseiller social de Jacques Chirac à Matignon. Il faut « beaucoup de sang-froid et ne jamais essayer d’humilier les partenaires », dit-il.
Xavier Bertrand, 42 ans
Nicolas Sarkozy en a fait son « Negociator », le négociateur en chef de quatre des principales réformes promises par le président : le service minimum, les régimes spéciaux, le contrat de travail unique et, en 2008, le régime général des retraites. Xavier Bertrand, ministre du travail, a accepté la mission avec gourmandise : ce boulimique de travail, qui ne dort que quatre heures par nuit, sait que, s’il remplit sa feuille de route, il deviendra une des figures principales de la droite.
Militant RPR de longue date, mais élu au niveau national seulement depuis 2002, cet ancien agent d’assurances a connu une ascension fulgurante. A la CFDT, François Chérèque lui reconnaît un véritable professionnalisme. Jean-Christophe Le Duigou, « M. Retraites » de la CGT, acte sa persévérance, mais pas sa souplesse : « Il veut convaincre, mais lui-même ne se laisse pas convaincre. Alors ça ne peut pas marcher. »
Bernard Thibault, 48 ans
Le secrétaire général de la CGT joue gros. Son syndicat, premier dans les entreprises concernées par la réforme des régimes spéciaux, se retrouve aux avant-postes de la contestation. Et le cheminot Thibault sait combien cette question est sensible. Il a lui-même porté cette contestation au plus haut niveau en 1995. Mais ses préoccupations de 2007 ne sont plus les mêmes. « L’intérêt général des salariés » et la gestion d’une organisation confédérale aux sensibilités différentes commandent sa conduite.
Bernard Thibault consulte et fait la synthèse. Coups de téléphone avec François Chérèque, son homologue de la CFDT, avec Raymond Soubie, le conseiller social de l’Elysée… Le numéro un de la CGT est diplomate et son humour séduit. Mais « Bernard », comme l’appellent les cheminots, doit d’abord protéger les intérêts de sa famille syndicale. Quitte à affronter Didier Le Reste… en interne.
Didier Le Reste, 52 ans
L’histoire ne repasse pas les plats », pense Didier Le Reste. Le long conflit des cheminots de l’automne 1995 contre la réforme des régimes spéciaux ne peut servir de modèle en 2007, estime-t-il. Le cheminot Le Reste, contrôleur de profession, se trouve au centre du premier conflit dur qu’affronte Nicolas Sarkozy.
Le patron des cheminots – il a succédé à Bernard Thibault à la tête de la fédération en 2000 – se défend de vouloir politiser le conflit. « Je ne prétends pas être le premier opposant à Nicolas Sarkozy, c’est un mouvement social », explique-t-il. Les mobilisations en cours « ont un aspect politique au sens noble », juge-t-il.
Engagé au PCF, leader syndical du camp du « non » au référendum sur la constitution européenne, au grand dam de Bernard Thibault, Didier Le Reste gère le conflit en cours coincé entre la surenchère de SUD-Rail et l’appel à la reprise de la CFDT, entre sa propre base et sa confédération.
Anne-Marie Idrac, 56 ans
Arrivée à la tête de la SNCF en juillet 2006, Anne-Marie Idrac n’en est pas à son premier conflit. Il y a déjà un an, presque jour pour jour, elle était confrontée à une grande démonstration syndicale sur le fret, la défense des salaires, de l’emploi, du service public et, déjà, du régime des retraites.
Le conflit d’aujourd’hui est difficile à gérer : Mme Idrac est identifiée par les syndicats comme celle qui, en 1995, alors qu’elle était secrétaire d’Etat aux transports, avait défendu le plan Juppé de réforme de la sécurité sociale qui devait supprimer le régime spécial des retraites des cheminots.
Moins médiatique que Guillaume Pepy, son directeur général exécutif, numéro deux de l’entreprise, elle va régulièrement sur le terrain à la rencontre des cheminots.
Devant le comité d’accueil, souvent armé de trompettes et de drapeaux rouges, elle s’adresse invariablement à eux en disant « mes chers collègues… »
Pierre Mongin, 53 ans
Depuis son arrivée à la tête de la RATP, le 2 juillet 2006, Pierre Mongin est parvenu à maintenir des relations sociales régulières avec l’ensemble des syndicats. » Il reste très disponible et rencontre facilement les responsables de la régie » reconnaît Jacques Iliez, secrétaire général de la CGT RATP.
Cet énarque, ancien préfet, a été chef de cabinet d’Edouard Balladur de 1993 à 1995 et directeur de cabinet du premier ministre Dominique de Villepin de 2005 à 2006.
Responsable d’une entreprise économiquement saine – les résultats 2007 devraient annoncer un nouveau record en matière financière et de trafic -, il ambitionne de placer la RATP dans le peloton de tête des entreprises mondiales du transport urbain. Il reste un ardent défenseur du projet métrophérique cette nouvelle rocade de l’Ile-de-France, malgré l’opposition de l’exécutif régional.
Sources: Rémi Barroux, Christophe Jakubyszyn, François Bostnavaron, Dominique Buffier (Le Monde)