« A aucun moment Matignon n’a été informé des difficultés d’Airbus jusqu’à ce qu’elles soient rendues publiques par l’entreprise elle-même en juin 2006″, a affirmé mardi l’ancien Premier ministre Dominique de Villepin. « Ni mes collaborateurs ni moi-même n’avons jamais été informés d’aucune difficulté industrielle subie par le programme A380″, a-t-il dit devant la commission des Finances du Sénat.
Le cours d’EADS s’est effondré après l’annonce, le 13 juin 2006, de nouveaux retards dans son programme gros porteur A380. La Caisse des dépôts et consignations venait alors de racheter quelques mois plus tôt 2,25% des parts du groupe Lagardère dans EADS.
« Rien aujourd’hui dans ce dossier ne permet de dire que l’Etat n’a pas été vigilant », a affirmé Dominique de Villepin. « L’Etat devait-il être informé de ce qui se passait dans telle ou telle usine? », a-t-il lancé. « C’est un mauvais procès (…) que de considérer qu’il fallait que nous sachions ce qui se passait dans les usines allemandes alors que l’état-major d’EADS l’ignorait, ou nous dit l’ignorer ».
« A aucun moment Matignon n’a été informé des difficultés d’Airbus jusqu’à ce qu’elles soient rendues publiques par l’entreprise elle-même en juin 2006″, a déclaré M. de Villepin.
« Matignon n’a reçu aucune information de Bercy ni du ministère des Transports sur le +process+ industriel ou la situation dans les chaînes de production de l’A380 et donc sur la réalité des difficultés industrielles », a-t-il poursuivi.
Selon l’ancien chef du gouvernement, « on ne saurait leur en faire un quelconque grief puisque eux-mêmes ne savaient pas ».
« Je le dis donc très clairement et très solennellement devant vous: ni mes collaborateurs ni moi-même n’avons jamais été informés d’aucune difficulté industrielle subie par le programme A380″, a-t-il insisté.
« Je ne crois pas qu’il faille aller chercher des poux dans la tête de l’Etat, parce qu’il n’y a aucune raison de les trouver », a martelé l’ancien Premier ministre de Jacques Chirac.
« L’Etat est le seul des grands actionnaires à ne pas avoir cédé ses actions », a-t-il rappelé, en défendant sa décision de ne pas se désengager à l’époque d’EADS.
Informé par le groupe Lagardère en février 2006 de son intention de céder ses titres, l’Etat avait alors refusé de vendre les siens. « C’est pour des raisons de principe que l’Etat était engagé et, pour des raisons de principe, il n’avait nullement l’intention de se désengager », a expliqué M. De Villepin. « Cette volonté de l’Etat était partagée entre l’Elysée, Matignon et Bercy et elle était justifiée par l’importance stratégique de notre industrie aéronautique »
« L’Etat n’est pas un spéculateur », a-t-il lâché.
Evoquant le rachat en mars 2006 par la Caisse des dépôts et consignations (CDC) d’une partie des titres EADS vendus par le groupe Lagardère, M. De Villepin a affirmé qu’ »à aucun moment Matignon, c’est-à-dire mes collaborateurs ou moi-même, n’avons été informés de la décision prise par le directeur général de la Caisse des dépôts de racheter des titres d’EADS ».
L’Etat « n’a pas donné d’ordre à la Caisse pour qu’elle se porte acquéreuse de titres EADS », a-t-il affirmé. « La Caisse agit sous sa propre responsabilité ».
Dominique de Villepin a toutefois confirmé l’existence d’une note de février 2006 qui cite la CDC parmi les investisseurs intéressés par une prise de participation dans EADS. « Il est exact qu’un document remis à mes services par le groupe Lagardère (…) mentionnait l’intérêt potentiel d’un groupe d’investisseurs » qui comprenait la CDC. Mais « cette mention, qui présentait un caractère hypothétique et aléatoire, n’était pas susceptible de retenir notre attention », a-t-il souligné.
« L’Etat a fait tout à fait ce qu’il devait », a insisté Dominique de Villepin.
Sources: Associated Press et Agence France Presse