S’il avait rêvé de Bercy, il ne s’était pas préparé à ce grand ministère de l’Écologie, du Développement et de l’Aménagement durables, taillé pour Alain Juppé. Aujourd’hui, pourtant, ce nouveau costume semble lui aller comme un gant.
« Il n’y connaissait pas grand-chose au départ. Mais on a été agréablement surpris de la manière dont il s’est saisi de la question de l’aménagement durable », concède-t-on à l’Élysée.
A son arrivée au ministère, en juin, il est, selon plusieurs témoignages, au plus bas. Sa petite phrase sur la TVA sociale, au soir du premier tour, lui a valu un flot de critiques. Sa nomination en remplacement de Juppé, battu aux législatives, apparaît comme un second choix. En dépit de son haut rang dans la hiérarchie gouvernementale – il est le seul ministre d’État – lui-même aurait préféré rester à Bercy.
On lui a, de plus, adjoint Nathalie Kosciusko-Morizet comme secrétaire d’État : elle connaît parfaitement le dossier de l’écologie et veut « exister ». Elle s’installe dans un autre bâtiment, loin de celui de Borloo. Certains y voient une marque de sa volonté de se mettre en concurrence. Dans les premiers temps, les deux maisons se regardent en chien de faïence. Après, dit-on, une mise au point cet été, les ministres se mettent au diapason. Aujourd’hui, « ils fonctionnent très bien, s’appellent tout le temps et ont trouvé chacun leurs marques », assure-t-on dans l’entourage de Borloo. On ne prendra pas Borloo et « NKM » en flagrant délit de conflit, ouvert ou larvé. D’ailleurs, le secrétaire d’État chargé de l’Écologie dit ouvertement du bien de son ministre de tutelle. « Elle le croyait brouillon, elle a découvert un homme précis, elle le croyait dilettante, elle a découvert un méthodique », raconte son entourage.
Aujourd’hui, Borloo est parfaitement convaincu que sa mission n’est rien moins que « sauver la planète », comme il le répète à l’envi. La méthode Borloo, qui lui a permis de maintenir chercheurs, entreprises, ONG, associations et parlementaires autour de la table, fut celle utilisée en 2004 pour bâtir le plan de cohésion sociale et de rénovation urbaine. Un mélange de volontarisme politique et d’idées collectives, d’impulsion et de laissez-faire. Cette plongée en écologie a entraîné une certaine sous-exposition politique. « Au début de cette année, il a alimenté la chronique : allait-il rejoindre Sarkozy, et quand ? Obtiendrait-il Matignon ? Serait-il candidat à Paris ? Depuis, il a disparu du radar politique », commente une source gouvernementale.
Mais Borloo peut compter sur un soutien sans faille de l’Élysée et de Nicolas Sarkozy, qui veut faire de l’environnement un grand thème de la mandature. « C’est une question qui transcende le clivage droite-gauche. À la limite, elle pourrait incarner la politique d’ouverture du gouvernement », affirme-t-on au cabinet de Borloo.
Ce dernier devra encore transformer l’essai. Faute de quoi, son poids politique qui a fait sa grande force au moment de la campagne électorale et de la composition du gouvernement s’en trouvera amoindri. « Le plus dur, c’est l’art de l’exécution », admet le ministre, « la pire des choses serait qu’on ne parle plus de tout cela demain ». De « tout cela », y compris de lui-même.
Source: Claire Bommelaer (Le Figaro)