Voici les principaux points de la note remise par l’ancien Premier ministre Dominique de Villepin aux juges chargés d’enquêter sur l’affaire Clearstream. Il était entendu jeudi 13 septembre pour la première fois depuis sa mise en examen.
Pas d’instruction donnée à Jean-Louis Gergorin de saisir le juge Renaud Van Ruymbeke:
Dominique de Villepin a assuré qu’il n’avait jamais donné pour instruction à Jean-Louis Gergorin, ancien haut responsable d’EADS, de transmettre les listings falsifiés à la justice comme ce dernier l’a expliqué en juillet lors de ses dernières auditions. Cette accusation est « absurde ». Une telle démarche était facilement « traçable » et ne pouvait rester secrète. « Envoyer Jean-Louis Gergorin rencontrer le juge Van Ruymbeke équivaut à y aller soi-même », avance Dominique de Villepin.
Pas de mission spécifique confiée au général Philippe Rondot:
Il affirme avoir simplement demandé au général le 9 janvier 2004 de le « tenir informé de son enquête » réclamée par le ministère de la Défense en 2003. « A aucun moment il ne m’a fait part de ses prétendues certitudes sur la fausseté des listings sur lesquels il enquêtait ». « J’ai refusé de rentrer dans le fond du dossier (…) Je n’ai pas souhaité rentrer dans le détail nominatif des listings ». L’ancien chef du gouvernement précise n’avoir revu l’officier « que six mois plus tard », en prenant l’initiative de cette rencontre. « Je l’ai toujours dit, je n’ai rien à me reprocher dans ce dossier où j’ai agi conformément à mon devoir de ministre des Affaires étrangères puis de ministre de l’Intérieur », souligne-t-il.
Jean-Louis Gergorin s’est prévalu d’une autorité usurpée:
« J’ai toujours de l’estime pour (sa) compétence stratégique » mais « il ne me serait jamais venu à l’idée d’utiliser dans un quelconque autre domaine (son) savoir-faire ». Il conteste aussi les rendez-vous que Jean-Louis Gergorin affirme avoir eus avec lui. Il nie l’avoir rencontré pour cette affaire depuis le 9 janvier 2004 et n’a pas accepté « en dépit de son insistance, de document de sa main bien qu’il déclare » lui avoir remis un CD-Rom.
Une manipulation répondant à un mobile industriel et non pas politique:
Selon Dominique de Villepin, l’affaire Clearstream trouve son point de départ dans les rivalités industrielles entre EADS et Airbus et celles opposant plus largement les géants de l’armement français. Il justifie la présence du nom de Nicolas Sarkozy sur les listings par ses responsabilités en matière de politique industrielle. Idem pour Dominique Strauss-Kahn et Jean-Pierre Chevènement, dont les noms figurent également sur les listings. Il était ministre de l’Economie et des Finances au moment de la bataille pour la succession à la tête d’EADS donc « en position de trancher » entre Noël Forgeard et Philippe Camus. D’autant que « ses liens avec Arnaud Lagardère (…) étaient susceptibles de peser ». M. Sarkozy pouvait donc constituer « une cible du fait de son influence personnelle sur le groupe Lagardère ».
Une affaire « privatisée » par l’une des parties civiles:
« Au départ rien ne permet de privilégier une lecture politique jusqu’à ce qu’éclate publiquement l’affaire au mois de juillet 2004 quand, tout de suite, Nicolas Sarkozy se sent directement et personnellement visé. On peut constater la force avec laquelle Nicolas Sarkozy s’est présenté en victime et même en seule victime de ce dossier et, concomitamment, la rapidité avec laquelle l’attaque a été lancée contre moi, sans aucun élément de preuve concret, mais en s’appuyant sur un pseudo ‘mobile’ politique », est-il écrit dans ledit document. « Si j’avais intérêt à nuire à Nicolas Sarkozy, ne peut-on imaginer que Nicolas Sarkozy avait intérêt à me nuire? … Ce dossier peut être considéré comme ‘privatisé’ au profit d’une seule partie civile », assure-t-il.
Source: Challenges