Onze ministres sur vingt-trois tenaient un blog sur Internet pendant la campagne. Certains le poursuivent, d’autres l’ont interrompu.
Le 1er août, Fadela Amara, la nouvelle secrétaire d’État à la Politique de la ville, ouvrira un blog sur la célèbre plate-forme Skyblog.com, vers laquelle convergent chaque semaine des millions d’adolescents. Son objectif : garder le contact avec les jeunes des cités. Fadela Amara n’est pas la seule à « bloguer ». Car les « ministres blogueurs » sont nombreux dans l’équipe de François Fillon. Après quelques semaines au gouvernement, certains ont choisi, à l’instar du premier ministre, de le poursuivre, d’autres de l’arrêter.
De fait, pour la première fois de son histoire, la France a un premier ministre… blogueur. François Fillon, qui tenait un carnet en ligne depuis plusieurs années, compte bien continuer. Faute de temps, il demandera à deux de ses collaborateurs de « poster régulièrement des réflexions liées à l’actualité ». Le premier ministre promet également « de modérer les commentaires, d’y répondre » dès que possible. Et n’exclut pas d’écrire lui-même un billet, « lorsque j’en ressentirai le besoin ». François Fillon n’est pas le seul blogueur du gouvernement. Même si les « poids lourds » comme Jean-Louis Borloo, Michèle Alliot-Marie, Brice Hortefeux ou Rachida Dati n’en ont pas, ministres et secrétaires d’État sont nombreux à tenir un carnet de bord sur la Toile. Sur les vingt-trois membres du gouvernement, pas moins de onze avaient leur blog avant d’intégrer leur ministère. Qu’en faire, une fois installé dans ses fonctions ? Pas simple.
Pour nombre de ministres, le blog était un outil de communication durant leur campagne législative. Ce fut le cas de Nathalie Kosciusko-Morizet ou d’Hervé Novelli, qui ont stoppé leur carnet en ligne dès leur entrée au gouvernement. Mais pour d’autres, plus assidus, le choix d’arrêter a été plus difficile. Éric Woerth, qui a ouvert son blog en avril 2006, a annoncé fin juin qu’il ne pourrait continuer, faute de temps. « Je ne souhaite pas sous-traiter à des collaborateurs cet exercice qui n’a d’intérêt que s’il est personnel », expliquait-t-il.
Même déchirement pour Xavier Darcos, autre blogueur passionné, forcé d’arrêter. « Il n’a plus le temps de s’en occuper lui-même », explique son entourage, et « c’était lui ou personne ». Certains ministres, plus rares, ont choisi de poursuivre l’aventure. C’est le cas de Luc Chatel, qui a raconté sur son carnet en ligne son « émotion » lors du premier Conseil des ministres. C’est aussi le cas de Christian Estrosi. Le secrétaire d’État à l’Outre-Mer « veut garder un lien important avec les Français ». Car un blog est un « lien charnel » qui permet de « ne pas perdre la notion des réalités de terrain », malgré ses fonctions. « Le blog m’aide à rester authentique », explique Christian Estrosi, pour qui cet outil « traduit aussi la personnalité de quelqu’un et permet de mieux l’appréhender dans ses sentiments, dans sa dimension humaine ».
Son humanité, c’est également ce qu’Alain Juppé met en avant sur son blog qu’il tient depuis septembre 2004. Jouant le jeu de la confession personnelle, souvent de mise dans la blogosphère, c’est aux lecteurs de son carnet en ligne que le maire de Bordeaux réservera la primeur de ses sentiments de doute et d’amertume, au lendemain de sa défaite aux législatives et de sa démission du gouvernement.
Bloguer peut également ouvrir de nouveaux horizons. Passionné de nouvelles technologies, le porte-parole du gouvernement, Laurent Wauquiez, a lui aussi interrompu à regret son carnet au soir du second tour de la présidentielle. Mais cet « outil formidable » continue d’enthousiasmer le jeune secrétaire d’État, qui ne l’estime « pas du tout incompatible avec la fonction », selon son entourage. Mais Laurent Wauquiez a d’autres ambitions : aller plus loin qu’un simple blog, en lançant « des initiatives pour mettre en place un dialogue avec les Français par le biais du Web ». Le grand retour des débats participatifs ?
Source: Samuel Laurent (Le Figaro)