Défi de l’innovation, respect de l’environnement, développement des biocarburants, bataille pour l’emploi, patriotisme économique européen: les principaux extraits de son allocution.
Monsieur le Ministre de l’Economie et des Finances, cher Thierry Monsieur le Ministre de l’Agriculture, cher Dominique Monsieur le Ministre de l’Industrie, cher François Messieurs les Présidents Mesdames, Messieurs,
C’est une grande fierté pour moi d’inaugurer le Mondial de l’Automobile cette année, et d’y représenter le Président de la République, Jacques CHIRAC. Comme tous les Français qui viennent toujours plus nombreux, c’est avec beaucoup de plaisir que j’ai découvert les nouveautés de ce salon. J’en sors avec une certitude : la voiture reste un objet de rêve.
Derrière les voitures que nous admirons, il y a une industrie, l’une des plus importantes en France. Il y a des entreprises, des technologies de pointe. Il y a des hommes et des femmes qui font vivre cette industrie avec passion. C’est d’abord à eux que je veux rendre hommage. Car ce sont eux qui nous permettent de faire face à une compétition de plus en plus vive.
Aujourd’hui il y a des inquiétudes : certains salariés s’interrogent sur l’avenir de la filière ; les sous-traitants savent qu’ils doivent s’adapter de plus en plus vite ; enfin les Français veulent connaître les perspectives d’avenir de notre industrie.
Face à cela, je suis venu affirmer une conviction : notre pays a besoin d’une industrie automobile forte. La France ne peut se passer de cette industrie innovante et riche en emplois.
1. L’automobile, c’est pour nous tous, Français comme Européens, une partie essentielle de notre histoire.
Elle est au cœur même de notre histoire industrielle, cette histoire industrielle qui a su croiser avec génie inventeurs et entrepreneurs. Je pense évidemment à André Citroën et Benjamin Peugeot en France ou à Carl Benz et Rudolf Diesel en Allemagne. Des esprits inventifs, le goût du risque : ils sont les pères de l’Europe industrielle.
L’industrie automobile est aussi au cœur de notre histoire sociale. C’est elle qui a vu monter les premières grandes revendications sur le temps de travail et les droits des salariés. Elle a su y répondre avec ouverture et le sens des réalités. Je sais que les grands groupes français sont fermement engagés dans un dialogue social approfondi, sur tous les grands enjeux actuels : je pense à l’emploi des seniors et à la question de la santé au travail.
Enfin, je veux dire un mot du rôle de brassage que vous avez joué. L’industrie automobile a attiré des dizaines de milliers d’étrangers sur notre sol. Ils ont contribué à la prospérité de notre industrie. Je sais qu’aujourd’hui les grands groupes français sont particulièrement impliqués dans la politique de lutte contre les discriminations, notamment à travers la charte de la diversité. Je veux leur rendre hommage, car il s’agit d’une bataille essentielle.
2. L’industrie automobile a un véritable avenir en France et en Europe.
Elle a été l’un des facteurs les plus puissants de développement économique tout au long du XXème siècle : organisation du travail, développement de la consommation de masse, ruptures technologiques, préoccupations environnementales. Tous ces enjeux, vous avez su y faire face, les uns après les autres, pour faire de vos sociétés les fleurons de cette industrie.
Aujourd’hui, les choses s’accélèrent : la mondialisation franchit tous les jours de nouvelles étapes. Les marchés traditionnels, en Europe occidentale, aux Etats-Unis, et au Japon, changent. De nouveaux marchés, en Inde, au Brésil, en Chine émergent à grande vitesse. La compétition est de plus en plus rude. Les frontières technologiques sont sans cesse repoussées. Les consommateurs sont de plus en plus exigeants : ils veulent des voitures plus sûres, plus confortables, plus propres, à des coûts toujours plus compétitifs. Par ailleurs, la lutte contre le réchauffement de la planète s’impose à nous tous comme une exigence absolue.
Cette nouvelle donne entraîne naturellement des défis nouveaux. Le premier défi, c’est celui de l’innovation.
Mieux que d’autres, vous savez que la clé pour continuer de produire, de se développer, de gagner des parts de marché, c’est d’innover. Innover en matière de nouvelles technologies, évidemment, mais aussi innover en matière de sécurité, de design, de concepts commerciaux. L’innovation est au cœur même de votre processus de production industrielle. (…)
Ce défi, vous le relevez avec détermination. Les moyens et les résultats le prouvent. L’industrie automobile porte un effort de recherche et développement considérable, plus de 7 milliards d’euros pour la filière industrielle française. Et cette industrie, que certains considéraient il y a vingt ans comme condamnée, est aujourd’hui un des piliers de notre économie. Je ne citerai que deux chiffres : 6 millions de véhicules ont été produits en 2005 par des constructeurs français ; l’activité a dégagé un solde positif de 9 milliards d’euros.
Pour vous aider à relever ce défi, sous l’impulsion du Président de la République, mon Gouvernement a posé les fondements d’une nouvelle stratégie industrielle. Elle est fondée sur deux principes : débloquer des moyens publics massifs pour accompagner votre effort de recherche et d’innovation, et favoriser la mise en réseau de nos forces autour de nos grandes filières industrielles. Très concrètement, je veux rappeler que 2 milliards d’euros sont mis à votre disposition, à travers l’Agence pour l’Innovation Industrielle, pour innover, pour créer et trouver de nouveaux produits. Je veux rappeler aussi qu’il y en a France, 66 pôles de compétitivité qui permettent de tirer la croissance de notre pays.
Le second défi, c’est celui de l’environnement.
Vous le savez, c’est l’une des préoccupations essentielles de nos concitoyens, en particulier des jeunes générations qui ont pleinement pris conscience de l’importance de cet enjeu.
Nous avons déjà accompli de grands projets dans ce domaine. Avec des émissions de CO2 des véhicules neufs inférieures à la moyenne, nous sommes parmi les mieux placés en Europe. D’ici 2010 le filtre à particules sera entièrement généralisé. Mais si nous voulons véritablement diviser par 4 nos émissions de gaz à effet de serre et réduire encore les émissions polluantes, nous devons mettre au point de nouveaux instruments technologiques.
Notre objectif est clair, c’est de faire en sorte que tous les Français puissent utiliser, s’ils le souhaitent, un véhicule et des carburants propres à des conditions économiques abordables. Aujourd’hui le choix est encore trop restreint, les technologies de pointe trop coûteuses.
Le premier axe de notre action, c’est de favoriser la mise au point de voitures plus propres. L’agence de l’innovation industrielle soutient depuis juillet dernier un programme qui permettra, d’ici 5 ans, la mise sur le marché d’un hybride diesel. De son côté, l’Agence nationale de la recherche et les pôles de compétitivité sont mobilisés pour préparer les véhicules du futur.
Le deuxième axe, c’est d’encourager la production et l’utilisation des biocarburants avec un objectif ambitieux : en 2015, nous en produirons 10 fois plus qu’en 2003. Aujourd’hui plusieurs options et techniques de production existent. Le gouvernement a décidé de favoriser le développement de chacune de ces options, et de laisser les consommateurs faire leur choix. Nous continuerons de soutenir le développement d’usines d
e production : depuis mai 2005 les agréments de l’Etat vont permettre la production de près de 2,7 millions de tonnes de carburant vert et la création ou la préservation de 20 000 emplois. (…)
Je réunirai dans les toutes prochaines semaines l’ensemble des acteurs afin de signer ensemble une charte d’engagement pour la réussite de cette filière stratégique de l’E85, premier véritable carburant de l’ »après-pétrole ». Elle devra prévoir notamment le déploiement d’un réseau de pompes vertes : 500 à 600 devront être disponibles d’ici la fin 2007 et nous inaugurerons très rapidement mon cher Thierry, puisque c’est dans les prochains jours, la première pompe verte.
J’ai également décidé que l’Etat ne percevrait aucune taxe sur la partie verte de l’E85. Le prix à la pompe de ce nouveau carburant sera donc de l’ordre de 0,80 euros par litre.
Enfin des mesures d’accompagnement fiscal pour les véhicules des particuliers et des sociétés renforceront encore les avantages des véhicules Flexfuel E85.
Ce que je souhaite, c’est que chaque Français puisse participer à la protection de l’environnement dans sa vie quotidienne sans que cela pèse sur son budget. J’aurai l’occasion de m’exprimer sur ce sujet la semaine prochaine.
Le troisième défi que nous avons à relever, c’est bien sûr l’emploi.
Vous le savez, le gouvernement fait de la bataille de l’emploi sa priorité.
Cette bataille, nous la menons sur tous les fronts. D’abord en défendant les emplois chaque fois que c’est possible comme nous l’avons fait pour la SOGERMA ; ensuite en modernisant le service public pour l’emploi afin qu’il accompagne et conseille mieux les demandeurs d’emploi ; enfin, et c’est de cela que je veux vous parler, en préparant l’avenir et en encourageant les secteurs créateurs d’emplois.
Nous avons obtenu de premiers résultats : 160 000 emplois salariés à plein temps ont été créés en un an. C’est la preuve que notre pays est capable de surmonter les difficultés lorsqu’il sait se rassembler autour d’un même objectif.
La bataille pour l’emploi c’est un combat quotidien. (…) Cette bataille pour l’emploi, nous avons besoin de vous, de vous tous, pour la mener. Car l’industrie automobile, c’est un million et demi de salariés en France, 13 millions dans l’Union Européenne. Ce sont aussi des territoires, des villes comme Sochaux, Flins, Cléon, Cerisay, Valenciennes, Clermont Ferrand. C’est aussi évidemment Turin, Munich, Stuttgart, Wolfsburg en Europe. Toutes les décisions que vous prenez ont bien évidemment un impact concret et immédiat sur l’équilibre économique et social de ces régions. (…)
Vous tous qui représentez des géants de votre industrie, vous êtes confrontés à la question difficile de la mondialisation. Vous vous y adaptez en internationalisant vos équipes, en vous implantant à travers le monde, en élargissant vos marchés sur tous les continents, en nouant des alliances. Vous le savez mieux que quiconque, vos marques restent des emblèmes nationaux forts. Ce sont des sujets légitimes de fierté pour chacun de vos compatriotes.
Qu’est ce que cela signifie ? Tout simplement, que nos plus grandes réussites mondiales, que vos succès, sont profondément ancrés dans des réalités nationales. Cet ancrage, ce n’est pas un handicap, encore moins une page de l’histoire qu’il faudrait tourner, c’est une force qui nous fait gagner dans la mondialisation. (…)
C’est le sens que je veux donner au patriotisme économique que défend mon gouvernement au niveau français comme au niveau européen.Comme les Américains et les Japonais savent le faire, nous devons reconnaître que nous avons des intérêts communs qu’il nous faut défendre ensemble. Vos succès ce sont les emplois de demain, c’est la confiance de notre pays dans son avenir. Voilà tout l’enjeu d’une politique industrielle moderne.
La France et l’Europe ont tous les atouts pour réussir dans la compétition internationale. Beaucoup de nos grands groupes et de nos PME ont su tirer profit de la mondialisation. Elles y sont parvenues parce qu’elles ont su faire un bilan lucide de leurs forces. Je souhaite que la France puisse faire le même exercice et évaluer précisément les avantages compétitifs de notre industrie dans cette bataille mondiale. Cette évaluation doit nous permettre d’identifier les grandes filières industrielles qui feront les emplois de demain. Je demanderai à un chef d’entreprise reconnu de bien vouloir mener cette réflexion.
Mesdames, Messieurs,
Soyons fiers de vos succès. Soyons fiers de cette France qui innove, qui crée, qui se développe. Soyons fiers de cette Europe industrielle qui allie technologie, environnement, sécurité et, ne l’oublions pas, plaisir. Soyons fiers de tous ces constructeurs à travers le monde qui travaillent concrètement à un monde plus sûr et plus propre.
Je vous remercie.