Le gouvernement envisage d’exonérer le conjoint survivant des droits de succession. Une mesure qui permettrait de ne plus taxer deux fois une même génération… et de prendre les devants vis-à-vis du président de l’UMP.
Jean-François Copé a de la suite dans les idées. Notamment lorsqu’il est question de droits de succession. Selon nos informations, les équipes du ministre délégué au Budget et à la réforme de l’Etat planchent depuis plusieurs semaines sur la suppression totale des droits de succession à la charge du conjoint survivant qui – après abattements – sont calculés selon un barème progressif : de 5 % pour la fraction de la succession n’excédant pas les 7 600 euros, jusqu’à 40 % pour celle au-delà de 1,7 million d’euros.
Cette mesure fiscale avait déjà été étudiée l’année dernière par Bercy, puis abandonnée au profit d’une disposition moins onéreuse. Depuis le 1er janvier, les parents peuvent transmettre « gratuitement » jusqu’à 50 000 euros à chacun de leurs enfants tous les 6 ans, contre 10 ans avant. « La suppression des droits de succession pour le conjoint survivant est effectivement une piste sur laquelle nous travaillons, confirmait hier Bercy. Mais rien n’est encore décidé puisque les arbitrages du premier ministre ne sont pas rendus ».
Une mesure de bon sens
Pour Bercy, la suppression des droits de succession à la charge du conjoint survivant serait une mesure de bon sens. Elle permettrait de ne plus taxer deux fois une même génération. « Est-il normal que le conjoint survivant paie des droits de succession sur un patrimoine acquis conjointement ? », avait lancé Jean-François Copé à l’été 2005, lors du débat sur les orientations du budget 2006.
Selon Nicolas de la Bigne, consultant patrimonial chez Cirus Conseil, l’adoption de cette disposition irait aussi dans le sens de davantage de justice. « Les Français tombent souvent de haut parce qu’ils pensent intuitivement que l’Etat ne peut pas taxer à la fois la génération qui a constitué le patrimoine puis celle qui en hérite. Du coup, seuls quelques conjoints survivants, les mieux informés, ne paient pas de droits de succession ».
Même si Bercy préfère ne pas en faire la publicité, la piste à l’étude permettrait aussi d’adresser un message d’apaisement aux Français assujettis à l’ISF et dont le nombre va encore grimper cette année. « La question des droits de succession entre époux commence vraiment à se poser dès que le patrimoine atteint le seuil de l’ISF, à savoir 750 000 euros », affirme Nicolas de la Bigne. Compte tenu des abattements actuels – 76 000 euros pour le conjoint survivant auxquels s’ajoutent 50 000 euros à partager avec les autres héritiers -, de nombreux conjoints sont en effet exonérés de droits de succession. En 2000, date de la dernière étude rendue publique par la direction générale des impôts, la moyenne des successions touchées par les conjoints en France s’établissait à 25 900 euros.
Un avantage politique
Matignon n’a pas encore donné son feu vert à cette mesure. Mais le chef du gouvernement pourrait y trouver un avantage, plus politique cette fois : coller au programme de Nicolas Sarkozy. Les droits de successions sont un thème cher au président de l’UMP. En 2004, lorsqu’il était ministre de l’Economie, Nicolas Sarkozy les avait allégés en instituant un abattement de 50 000 euros. Depuis fin juin, il plaide pour la suppression totale des droits de successions.
Reste à savoir si le budget 2007, qui prévoit déjà 6 milliards d’allègements fiscaux au titre des réformes de l’impôt sur le revenu et de la taxe professionnelle, pourrait absorber une telle mesure.
Selon Bercy, il en coûterait 150 millions d’euros la première année puis 400 millions par an ensuite.
Source: LE FIGARO