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Immigration : le bilan de Brice Hortefeux

29 796 reconduites à la frontière en 2008. C’est la « performance » affichée, mardi 13 janvier, par Brice Hortefeux qui, avant d’être promu dans les prochains jours, ministre des affaires sociales, a dressé le bilan de son action à la tête du sulfureux « ministère de l’immigration et de l’identité nationale ».

L’appellation avait suscité la polémique lors de la création du ministère en mai 2007 : elle sonnait comme un gage à l’extrême droite et avait été décriée par la gauche, les associations et de nombreux intellectuels. Dix-neuf mois plus tard, Brice Hortefeux se targue de laisser dans le paysage gouvernemental un ministère « serein et apaisé ». Derrière la brutalité des chiffres, se cache en fait une réalité plus complexe

Immigration clandestine

Avec 29 796 « éloignements » de personnes en situation irrégulière en 2008 , le ministre souligne avoir dépassé l’objectif fixé en début d’année de 28 000 reconduites « effectives » à la frontière. Et de relever la « spectaculaire progression »des retours volontaires. Chiffrés à 10 072 en 2008, ceux-ci constituent plus du tiers du total des éloignements.

Cette « progression spectaculaire » s’explique toutefois, pour l’essentiel, par le développement, depuis l’été 2007, de l’aide au retour dit humanitaire qui s’applique aux ressortissants communautaires et en l’occurrence quasi exclusivement aux Roumains et Bulgares.

Devenus ressortissants de l’Union européenne, Roumains et Bulgares, et en particulier les Roms, continuent néanmoins d’être reconduits dans leur pays, moyennant une aide financière bien plus modeste que l’aide au retour traditionnelle (300 euros par adulte contre 2 000 euros ). Cela ne les empêche pas, observent tous les experts, de revenir en France quelque temps plus tard.

Les reconduites contraintes, autrement dit les expulsions, elles, « plafonnent » : de 18 735 en 2006, 19 885 en 2007, elles n’ont pas dépassé les 19 724 en 2008.

Immigration professionnelle

Nicolas Sarkozy a demandé au gouvernement de porter l’immigration économique de 6 % à 50 % du flux total d’entrées sur le territoire. Pour Brice Hortefeux, « le rééquilibrage entre immigration professionnelle et immigration familiale est engagé ».

En 2007, avec quelque 85 800 titres de séjours délivrés, l’immigration familiale a enregistré une « baisse spectaculaire » de 10,6 %, se félicite-t-il, tandis que l’immigration de travail a progressé pour atteindre 14 % des entrées. Avec quelque 33 000 travailleurs, elle pourrait même représenter environ 20 % en 2008.

Ce rééquilibrage s’explique, pour une part non négligeable, par l’entrée dans les statistiques du ministère des travailleurs européens de l’Est soumis, pour une période transitoire, à l’obligation de détenir une carte de séjour s’ils veulent travailler.

Le nombre de personnes originaires des nouveaux Etats membres (NEM) de l’Union européenne (EU) venus s’installer en France pour travailler est passé de 3 421 en 2006, à 6 880 en 2007 et 7 145 en 2008.

Mais le gouvernement ne pourra pas toujours compter sur cette contribution pour réaliser l’objectif de 50 % d’immigration professionnelle. Depuis juillet 2008 en effet seuls les Roumains et Bulgares restent soumis, pour quelque temps seulement, à un régime dérogatoire. Passé ce délai, ils n’auront, comme les autres, plus besoin de visas pour venir travailler.

La politique des quotas en panne

Pour favoriser l’immigration professionnelle, Nicolas Sarkozy avait aussi demandé que soient fixés « chaque année des plafonds d’immigration selon les différents motifs d’installation en France ».

Tout en actant le rejet du principe de quotas migratoires par la commission Mazeaud, Brice Hortefeux avait, mi-juillet 2008, annoncé la présentation « dès 2009″ d’un « projet de loi programme, pour la période 2009-2012, avec des objectifs chiffrés ».

Ce projet n’a jamais vu le jour. « Ce n’était pas l’urgence », se défend aujourd’hui M. Hortefeux qui préfère que l’on retienne ses efforts pour renouer le dialogue avec l’Afrique où il s’est rendu pas moins de 22 fois. Ces voyages ont débouché sur la signature de huit accords bilatéraux avec le Gabon, le Congo, le Bénin, le Sénégal, le Tunisie, l’île Maurice, le Cap Vert, le Burkina Faso. Mais pas le Mali.

« Ces accords fixent des objectifs chiffrés de migrations professionnelles », relève M. Hortefeux. Avec ces accords et le Pacte européen sur l’immigration « adopté à l’unanimité des Vingt-Sept », il affirme avoir rempli sa mission.

Source: Laetitia Van Eeckhout (Le Monde)

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