Dominique de Villepin, était, dimanche soir, l’invité de Soir 3 Politique.
Réforme des retraites, bouclier fiscal, coopération militaire franco-britannique, situation en Afghanistan: les principales déclarations du Président de République Solidaire…
Sur la réforme des retraites
« Je crois qu’il faut prendre acte d’abord du vote de la loi et essayer d’en tirer le meilleur parti. C’est une réforme, et je l’ai regretté, qui a été trop vue sous l’angle comptable et pas assez dans sa dimension de société, voire dans son exigence de justice sociale. Donc, la première chose, c’est d’essayer de prendre en compte cette exigence de justice, c’est-à-dire, d’ailleurs, de faire des gestes forts.
Gestes forts dans le domaine de la politique de l’emploi, vis-à-vis des jeunes, vis-à-vis des seniors, vis-à-vis des femmes. Nous ne pouvons pas avoir une réforme dure sur le plan des retraites, sans avoir parallèlement la prise en compte de ceux qui sont le plus en difficulté sur le marché de l’emploi. (…)
C’est, je l’espère, ce qui va s’engager dans les prochains mois, à travers une négociation avec les partenaires sociaux, mais il faut que les partenaires sociaux puissent se retrouver autour d’une table et apporter des réponses. (…)
Dans le contexte actuel, c’est difficile, mais il faut penser (et c’est cela aussi, l’intérêt général), il faut penser aux Françaises et aux Français. Nous sommes là, les uns et les autres, chacun à notre place, pour essayer de les servir. (…) Il est évident que c’est au gouvernement à apporter des propositions, à s’engager dans la voie de la négociation. Et puis parallèlement, il y a un rendez-vous technique qui est prévu par la loi en 2013: ce rendez-vous, il faut le préparer, dès maintenant, pour réaliser le grand projet de société qui doit se faire autour des retraites, notamment à travers le système de retraite par points qui sera susceptible de donner plus de liberté aux Français. (…)
C’est un enjeu de justice, et pour cela, il faut engager une négociation forte dans le domaine de l’emploi, dans le domaine des conditions de travail, parce que si les Français aspirent si souvent à prendre une retraite tôt, c’est parce que les conditions de travail restent difficiles dans notre pays. Donc des gestes importants doivent être faits ».
Sur le bouclier fiscal
« Le bouclier fiscal que j’avais inventé était très différent de celui qui a été mis en place par Nicolas Sarkozy. (…) Il était extrêmement différent de la situation actuelle. (…) Il faut, à l’évidence, supprimer le bouclier fiscal. Cela doit se faire dans le cadre d’une grande réforme fiscale: là encore, ce sera l’un des grands enjeux de la campagne électorale.
Quid de l’impôt sur la fortune? (…) La question se pose, parce que si l’on revoit l’ensemble de notre système fiscal, il faudra se poser la question de l’impôt sur la fortune, son injustice notamment pour l’habitation principale et pour un certain nombre de Français qui sont injustement taxés par cet impôt. Mais cela suppose de revoir l’ensemble de la fiscalité, et en particulier la fiscalité du patrimoine. Le critère le plus important, c’est celui de la justice. Aujourd’hui, nous avons un certain nombre de méfaits liés à notre système fiscal. (…)
Le bouclier fiscal, tel qu’il a été conçu en 2005, il avait un objectif, c’était d’accroître la compétitivité française et nous avons gagné des points de croissance dans cette période. Dès lors que la crise passe par là et qu’il faut solliciter l’ensemble des Français, mais d’abord ceux qui sont les mieux placés, les plus aisés, eh bien, il est normal que la réforme remette à plat notre système fiscal. (…) Vous savez, les réformes, elles valent dans des périodes particulières. Dans le nouveau contexte économique et financier, l’exigence de justice doit l’emporter sur tout le reste ».
Sur la coopération franco-britannique en matière de défense
« La perspective franco-britannique en matière de défense, elle a été lancée par le sommet de Saint-Malo, par à l’époque Jacques Chirac, en 1998, avec Tony Blair. Depuis malheureusement, nous n’avons pas fait beaucoup de chemin et on continue à évoquer toujours les mêmes projets.
Ce qui est certain, c’est que l’effort des européens diminue: 50% de l’effort de défense, il est fait par la France et par le Royaume-Uni. Donc plus nous nous concerterons, plus nous nous coordonnerons, mieux ça vaudra pour pallier cette diminution de l’effort, mais cela ne peut pas remplacer une vraie politique européenne de défense.
Donc il faut avancer sur le plan bilatéral, mais sans négliger la nouvelle impulsion qu’il faut donner. Et de ce point de vue-là, malheureusement, les choses restent en panne ».
Sur la situation en Afghanistan
« La France a eu raison de s’engager en Afghanistan, à la suite du 11 septembre. Elle l’a fait dans un cadre international, avec la légitimité donnée par la communauté internationale.
Ce qui, par contre, a été moins bien mené, c’est la politique au fil des années. L’engagement militaire, la stratégie militaire ne marquent pas de résultats en Afghanistan. Donc il faut en tirer les leçons. Il faut un calendrier de retrait et il faut parallèlement dessiner une coopération civile, économique, sociale avec les Afghans, tout ceci de façon concertée. Mais nous voyons bien que nous sommes dans une impasse sur le plan militaire. (…)
Quand on voit la dissémination du terrorisme, on le voit aujourd’hui au Yémen, on le voit dans d’autres régions du monde, il faut changer de stratégie si on veut être efficace. »
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