François Goulard était l’invité de Michel Field, mercredi sur LCI, pour le « Oui/Non ».
Le député villepiniste du Morbihan a estimé que « le gouvernement devrait accepter des concessions sur la retraite à 67 ans ». Il s’est également exprimé sur le prochain remaniement gouvernemental, ainsi que sur le projet de budget pour 2011.
Les principales déclarations de François Goulard
Sur François Fillon qui a envisagé une remise en cause du bouclier fiscal
« Il l’a tellement défendu pendant trois ans que c’est pas lui qui est en mesure de le briser. (…)
Cette semaine, François Fillon et quelques autres nous disent: « c’est pas un tabou, on va y réfléchir ». Oui, sauf que la semaine dernière, on nous a présenté le budget, et que dans le budget, il n’y a évidemment pas l’esquisse de l’ébauche d’une réforme fiscale qui supprimerait le bouclier. Donc, c’est pas crédible et c’est pas maintenant. »
Sur les rumeurs de nomination de Jean-Louis Borloo à Matignon
« Borloo a plein de qualités: il est imaginatif, il est intelligent, etc… (…) Mais franchement non, quoi, ça colle pas ! En plus, on voit très bien la ficelle politique: on a la séquence sécuritaire, autoritaire de l’été pour ramener les électeurs du Front National. Et puis on se dit que, ben, il faut ramener d’autres électeurs et on prend le plus centriste en apparence au sein du gouvernement. Mais ça marche pas: les gens se laissent pas prendre à ça ! Et puis Borloo n’est pas fait pour diriger un gouvernement. (…)
D’abord, il dirigerait pas un gouvernement. Parce qu’il faut sortir de l’illusion selon laquelle le Premier ministre dirige un gouvernement. On sait très bien que c’est l’Elysée, Sarkozy, ses conseillers, qui dirigent aujourd’hui. Et donc le Premier ministre, il est quand même là pour l’apparence. »
Sur le rabotage des niches fiscales
« C’est une augmentation de 10 milliards d’impôts et c’est pas une bonne augmentation. Alors, il y a des niches qui demandent à être rabotées, supprimées. Mais c’est fait d’une manière assez aléatoire, pas très cohérente et ça ne remplace pas une vraie réforme fiscale, avec un impôt qui soit réellement progressif. Aujourd’hui, on a vraiment des aberrations dans notre fiscalité. (…) Bref, il y a de l’ordre à remettre et ce n’est pas en rabotant quelques niches qu’on y parvient. »
Sur la question des déficits publics
« Elle est majeure. Et moi je crois que va s’imposer, tôt ou tard, cette réalité que, en gommant les effets de la crise (je dis bien: « s’il n’y avait pas eu de crise »), on a doublé le déficit public depuis 3 ans. Je dis bien: « on a doublé le déficit public de la France, indépendamment de la crise ». (…) On n’a pas géré sérieusement. (…) Et même si la situation économique s’améliorait considérablement (ce qui n’est pas encore garanti), on aurait toujours ce problème majeur des finances publiques. »
Sur la radicalisation du mouvement social
« C’est assez inquiétant. Je crois que les syndicats, vous savez, ils suivent en gros quand même l’opinion des Français… un peu comme les hommes politiques. Et les Français savent qu’il faut faire une réforme: les 62 ans, c’est largement admis, mais il y a un certain nombre de points dont les 67 ans qui passent pas. Et je crois que tant qu’on n’aura pas donné des signes concrets là-dessus, on a un vrai risque d’un emballement du mouvement et d’un blocage complet du pays. (…)
Il y a un sentiment justifié qu’on n’est pas dans l’équité sociale, avec les 67 ans. Parce que qui est visé? Ce sont les plus modestes, ceux qui ont les retraites les plus faibles et on leur dit: « à 65 ans, de toute façon vous n’avez pas une retraite complète (pour des petits salaires en général), mais en plus on va continuer à vous appliquer une décote et il faudra attendre 67 ans (vous imaginez, pour une femme de ménage), 67 ans pour partir non pas avec une retraite plus complète, mais pour qu’on ne vous pénalise pas au-delà de cette insuffisance de retraite que vous avez déjà ». Ca colle pas et là-dessus, il fallait absolument changer le texte. On ne l’a pas fait, donc on est en risque. »
Sur la constitution d’un groupe parlementaire avec François Bayrou et Nicolas Dupont-Aignan
« On a discuté un peu, mais c’est vrai que quand on prend François Bayrou, il y a des vieux gaullistes qui disent « non, on veut pas être avec lui ». C’est un peu compliqué. Vous savez, les députés sont les derniers à prendre conscience que le vent a vraiment tourné. On s’en souvient dans le duel Chirac-Balladur: ce ne sont pas les députés qui ont désigné le vainqueur, ce sont les Français ! Et là, moi ce que je crois, c’est qu’on aura une prise de conscience au sein de l’UMP, qu’on ne peut pas aller, dans l’état actuel, avec Sarkozy tel qu’il est, aux élections de 2012. On va à la défaite. (…)
Je le critique trop pour dire que c’est mon candidat pour 2012. (…) Il y a pas mal de députés UMP qui vont s’apercevoir que ça ne marche pas. Et à ce moment-là, ils se diront qu’il faut trouver d’autres voies et peut-être vont-ils nous rejoindre dans quelques temps. »
Sur la candidature présidentielle de Dominique de Villepin en 2012
« Moi je crois oui. C’est à confirmer. Il n’est pas encore totalement inscrit dans le paysage présidentiel des Français. Ca commence à venir. Il y a eu quelques sondages qui indiquent qu’il commence à tracer son sillon. C’est pas fait. Ca reste à faire. Il reste 18 mois pour le faire. »
Sur les relations avec l’UMP
« On est libre de penser et on est libre de parler. Et c’est ça qui compte. Je crois que la situation politique, la situation économique et sociale vont démontrer qu’il y a eu des erreurs majeures de commises et qu’il faut absolument autre chose. Alors, il ne s’agit pas de dire qu’on détient seuls la vérité. Il s’agit de dire qu’il faut se mettre d’accord sur des principes républicains, sur une certaine modération et sur un sens du compromis. On ne sera pas tous d’accord et il ne peut pas y avoir un seul chef: il n’y a pas un seul homme en France ou une seule femme qui pense juste sur tout. Et ça, c’est une nouvelle approche qui n’est pas Bayrou « ni droite, ni gauche ». C’est « On n’a pas tous les mêmes idées, mais on peut gouverner ensemble » et je crois qu’il y a une majorité potentielle en rejetant les extrêmes. J’appelle « extrême » l’UMP très droitisée et évidemment le Front National et le Parti Socialiste qui n’a pas su évoluer qu’incarne assez bien Martine Aubry. »
Sur la question d’alliances entre l’UMP et le Front National
« C’est une des menaces pour nous de perdre notre âme dans cette tentation qui consiste à dire: « on ne peut gagner qu’avec les voix du Front National ». Moi je crois que peut-être on peut gagner (d’ailleurs 2007, c’est en partie cela: c’était pas mal d’ailleurs, à l’origine, de faire revenir les gens du Front National vers nous), mais ça n’est pas, aujourd’hui, pour faire de la surenchère pour essayer de les ramener. Le danger, il est là. Parce que c’est un calcul qui est totalement illusoire: l’électorat modéré fuit quand on mène une politique comme celle-là. »