Invité de France Inter mardi matin, Dominique de Villepin s’est exprimé sur l’affaire Woerth, qui touche selon lui « au bon fonctionnement de l’Etat ». Refusant « toute chasse à l’homme », l’ancien premier ministre assure que certains principes sont menacés.
« Celui de l’impartialité de l’Etat », d’abord : « Il y a une incompatibilité entre la fonction de trésorier d’un parti et celle de ministre ».
Celui de « l’égalité devant l’impôt », ensuite : évoquant une « fraude fiscale », Dominique de Villepin assure qu’ »en période de crise, la morale publique est importante. Chacun doit s’efforcer de respecter la règle de droit. »
Celui de « l’indépendance de la justice », enfin : selon lui, il y a eu « immixtion d’un conseiller du président de la république et du procureur de Nanterre très au-delà de la sphère qui est la sienne ».
Dominique de Villepin est également revenu sur les annonces de réduction du train de vie de l’Etat faites lundi par Nicolas Sarkozy, au moment même où l’on apprenait le coût du nouvel avion présidentiel: 180 millions d’euros !
« Il y a incompatibilité entre fonction de ministre et trésorier d’un parti »
Dominique de Villepin, fondateur de République solidaire, a estimé mardi qu’il y avait « incompatibilité » entre la fonction de trésorier d’un parti et celle de ministre, mais a assuré qu’il ne voulait « pas porter la suspicion » sur Éric Woerth, mis en cause dans l’affaire Bettencourt. « Je refuse toute chasse à l’homme, mais puisqu’il s’agit de l’État, il faut se placer au niveau des principes », a déclaré l’ex-Premier ministre sur France Inter, jugeant que l’affaire Woerth « touche et concerne directement l’État », « la justice, l’égalité devant l’impôt et l’impartialité de l’État ».
Premièrement, « il y a incompatibilité entre la fonction de trésorier d’un parti – petit ou grand – et ministre », « pas uniquement ministre du Budget », a-t-il fait valoir, car « on ne peut pas à la fois solliciter des bailleurs de fonds et en même temps exercer la fonction de ministre qui exige l’impartialité ». De Villepin s’est aussi interrogé sur le principe d’indépendance de la justice, « le plus grave ».
« On apprend à travers le dossier (Bettencourt) une immixtion régulière et constante d’un conseiller du président de la République » et du procureur de Nanterre, Philippe Courroye, « très au-delà de la fonction qui est la sienne, a-t-il souligné. « Est-ce que tout ceci est acceptable ? Est-ce que tout ceci ne doit pas conduire à des éclaircissements et des remises en ordre ? »
Woerth peut-il se maintenir à son poste de ministre ? « Tant qu’il n’y a rien de vérifié, de précis en matière judiciaire qui soit susceptible de lui être reproché, bien évidemment c’est la règle », a-t-il dit, réfutant les « amalgames trop souvent faits dans notre pays ». « Dans la situation actuelle, Éric Woerth doit d’abord apporter des réponses aux questions qui sont posées » mais « je ne veux pas porter la suspicion sur lui », a assuré M. de Villepin.
Train de vie de l’Etat: Nicolas Sarkozy aurait pu se passer de son nouvel avion
Dominique de Villepin, fondateur de République solidaire, a estimé mardi que Nicolas Sarkozy qui a annoncé lundi des mesures pour réduire le train de vie de l’Etat, aurait « pu se contenter de garder la flotte ancienne » plutôt que de se commander « un avion de 180 millions d’euros ».
Les annonces du président de la République sont un « rappel à l’ordre salutaire », a déclaré M. de Villepin sur France Inter, soulignant que « c’est bien que le chef de l’Etat ou le Premier ministre – c’est souvent le Premier ministre qui fait cela -, rappelle les règles de bonne conduite ».
« Il y a un esprit d’économies qui doit être au rendez-vous de l’Etat et peut-être encore davantage au niveau des ministres qui doivent donner l’exemple », a ajouté l’ancien Premier ministre. Mais « est-ce que nous sommes au-delà du symbole? je n’en suis pas sûr », a-t-il dit.
Car « nous sommes en mesures d’économies qui se chiffreront en dizaines de milliers d’euros peut-être en centaines de milliers d’euros » et « si on compare par exemple à l’avion que vient de commander le président de la République, nous parlons-là de 180 millions d’euros! », a-t-il argué alors que le chef de l’Etat devrait disposer à l’automne d’un nouvel Airbus A-330 spécialement aménagé.
« Le président de la République aurait pu considérer que, dans cette période, il passait son tour et que l’un des grands chefs d’Etat des pays émergents (aurait été) ravi d’acheter cet avion. Nous aurions fait l’économie de 180 millions d’euros », a affirmé M. de Villepin, soulignant que Jacques Chirac s’était « contenté de moyens courriers ».
De plus, a-t-il fait valoir, « il y a un problème évident derrière » : « dès lors qu’il y a qu’un avion de 180 millions d’euros, cet avion par définition connaît des pannes, des réparations ». « Quel sera l’avion qui sera alors amené à se substituer? » alors que « traditionnellement il y a deux avions » présidentiels, a-t-il dit.
« Dans une période de crise on aurait pu se contenter de garder la flotte ancienne », a-t-il conclu.
Source: Agence France Presse