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Chat de Dominique de Villepin sur le site L'Internaute (2/3): "On a perdu un temps précieux sur le chômage"

« Je crois qu’on a perdu un temps précieux. A la formation de ce gouvernement, on a pu penser ou croire que la situation de l’emploi allait, naturellement et mécaniquement, par les mesures qui avaient été prises précédemment, continuer de baisser. Et on a sans doute sous-estimé l’effort qu’il fallait continuer de faire.

Nous avons pu, entre 2005 et 2007, baisse de 2 points le taux de chômage. Cet effort, c’était le résultat, au quotidien, d’un travail permanent de l’ensemble des membres du gouvernement et de l’ensemble de notre administration.

Donc, je pense qu’on a été pris un peu à contre-pied et je me réjouis de voir qu’aujourd’hui, on essaie à nouveau d’apporter et de multiplier un certain nombre de mesures, de dispositions pour le chômage partiel, pour la prise en compte des différentes catégories de chômeurs, de façon à répondre à cette situation.

Donc je crois qu’aujourd’hui, oui, on a conscience clairement de cette situation difficile et d’une situation qui devrait s’aggraver tout au long de l’année 2009, voire un peu plus.

Et je crains qu’effectivement, ce chiffre de 300.000 chômeurs* soit largement dépassé sur la base annuelle. »

*: 300.000 chômeurs de plus en 2009, dernière prévision du Ministère de l’Economie

Les mesures du gouvernement contre la crise

« Je pense que le gouvernement a parfaitement raison d’avoir accordé la priorité à l’investissement. Nous sommes dans une situation où il faut prendre en compte la donne financière. Nous sommes avec des marges de manoeuvre extrêmement étroites.

J’ai regretté en son temps que les premières mesures de ce gouvernement soient des mesures qui allaient forcément être mal comprises, parce que le paquet fiscal allait être interprété comme un geste vis-à-vis des plus riches et donc pas comme un geste de justice sociale.

A partir du moment où nos marges de manoeuvre sont très étroites, il faut essayer de les optimiser, de les diriger là où elles peuvent être le plus utiles, et c’est vrai que l’investissement, c’est ce qui est susceptible d’accroître la compétitivité française, d’accroître notre capacité à faire des produits plus innovants, d’accroître notre capacité à produire mieux et plus.

Donc je crois que la priorité à la relance par les infrastructures, par l’innovation, par tout ce qui peut créer des emplois, c’est une bonne chose.

En même temps, on ne peut pas faire l’impasse sur ceux qui souffrent le plus, ceux qui sont confrontés le plus durement à la crise. Donc il fallait faire des gestes vis-à-vis des plus faibles et il fallait faire des gestes, bien sûr, vis-à-vis de ceux qui sont confrontés au problème du chômage.

Je pense que les dernières annonces du gouvernement et du Président de la République viennent corriger ce qui apparaissait insuffisant dans le plan de relance de 26 milliards consacrés à l’investissement. Il fallait effectivement pouvoir marcher sur deux jambes: une jambe de justice sociale, une jambe qui prenne en compte les demandes les plus immédiates des Français et parallèlement la nécessité de se consacrer fortement à l’investissement.

J’ai une inquiétude: c’est sur la concentration de notre effort. Se concentrer sur l’investissement, c’est bien, mais pas n’importe quel investissement. Et je crois qu’il faut être très attentif à ce que dans cette crise, nous ne perdions pas de vue que se joue le futur de notre pays. C’est-à-dire que dans la crise la hiérarchie des puissances, la compétitivité des économies va, dans certains cas, chuter ou, au contraire, s’améliorer.

Donc il faut se concentrer sur les secteurs les plus innovants et c’est pour cela que je pense que dans la relance par l’investissement, il faut se consacrer à ce qui est le plus indispensable à notre économie, tout ce qui va dans le sens de l’innovation, tout ce qui sert l’Université, la Recherche, parce que c’est véritablement là-dessus que se fera la différence entre les économies dans la compétition mondiale.

La compétition ne s’arrête pas à cause de la crise. Au contraire, la crise va accroître les différences entre les Etats: certains Etats vont plonger, certains Etats peuvent même casser dans la crise. D’autres au contraire vont se développer et améliorer leur position. Je souhaite que la France fasse partie des pays qui sortent plus forts de la crise. »

Source: Chat de Dominique de Villepin avec les lecteurs du site L’Internaute – 3 mars 2009

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