L’ancien premier ministre bat la campagne, rêve d’un groupe à l’Assemblée, multiplie les critiques envers le chef de l’Etat. Comme s’il était déjà candidat.
Dominique de Villepin sera-t-il candidat à la présidentielle de 2012 ? Fort du récent sondage du Parisien qui le place à égalité avec Nicolas Sarkozy comme meilleur candidat de la droite en 2012, le président de République solidaire (le mouvement qu’il a lancé en juin dernier) se sent pousser des ailes. Il multiplie les déplacements « à la rencontre des Français », comme vendredi dernier à Rennes, où il a passé plus de trois heures à déambuler dans un salon d’agriculteurs, avant de tenir une réunion avec une centaine de militants dans une maison de quartier de la ville.
Le 4 novembre, la sortie de son livre l’Esprit de cour, une malédiction française (Plon) devrait lui donner une occasion supplémentaire de critiquer Nicolas Sarkozy. Ce qu’il ne manque jamais de faire en marge de chacun de ses déplacements. La politique à l’égard des Roms? « La France ne se grandit pas en désignant des boucs émissaires et il serait temps d’apaiser les esprits, après trois mois de dérive sécuritaire. »
L’économie? Villepin s’inquiète « du décrochage de notre pays, de l’absence de stratégie industrielle et regrette que le gouvernement ne se soit pas adapté à la crise, ait continué à appliquer un programme écrit en 2007, à prendre des mesures qui se justifiaient en période de croissance mais étaient devenues contre-productives en période de récession ».
La rupture? « Ce n’est pas si simple, la sagesse, c’est trouver l’équilibre entre la fidélité au passé et les nécessaires évolutions. » La fonction présidentielle? « De la même façon qu’un chef d’Etat n’a pas à répondre quand on l’injurie (allusion au « casse-toi pauvre con » lancé par Sarkozy au Salon de l’Agriculture), un président n’a pas à répondre en prenant la balle au bond à un commissaire européen, pour nourrir une polémique, au lieu de prôner l’apaisement. » La réforme des retraites? « Une réforme strictement comptable et partisane, à la fois insuffisante – le problème des retraites se reposera dès 2018 – et injuste, notamment pour les femmes: il n’est pas acceptable qu’une femme sur deux, pénalisée par les années consacrées à élever des enfants, doive travailler jusqu’à 67 ans pour bénéficier d’une retraite à taux plein. »
Pour résumer la pensée villepiniste, Nicolas Sarkozy est dans une stratégie personnelle de conquête puis de conservation du pouvoir, en oubliant l’intérêt national. D’où l’impérieuse nécessité d’offrir un recours aux Français, en rassemblant le plus largement possible à droite souverainistes, gaullistes, démocrates sociaux, centristes…
Dernière proposition de Dominique de Villepin: créer un groupe à l’Assemblée, avec François Bayrou et Nicolas Dupont-Aignan. Les députés villepinistes assurent qu’ils ont – presque – réuni les quinze parlementaires nécessaires en rassemblant les trois députés MoDem, les deux élus de Debout la République, les villepinistes historiques, Marie-Anne Montchamp, Jean-Pierre Grand, François Goulard et également Jacques Le Guen, Jean Ueberschlag, Guy Geoffroy, Michel Raison, Marc Bernier et Daniel Garrigue, tous prêts, selon eux, à sauter le pas.
Un groupe leur offrirait un certain nombre d’avantages, comme des temps de parole, à l’Assemblée, sur les projets de loi, l’examen de leurs propositions de loi, des collaborateurs… Mais rien n’est fait. Fançois Bayrou pose une condition: les villepinistes doivent lever toute ambiguïté en quittant l’UMP. Il s’étonne d’ailleurs que Villepin ait lui-même repris sa carte à l’UMP fin juillet, lui qui a dénoncé peu après « la tache de honte sur notre drapeau ». Si Marie-Anne Montchamp et Jean-Pierre Grand envisagent de quitter officiellement le parti présidentiel, il n’en est en revanche pas question pour François Goulard… Quant à Nicolas Dupont-Aignan, il préfère, pour l’instant, rester à l’écart d’un sujet qu’il juge trop politicien. Pas si simple, le grand rassemblement républicain…
Villepin n’en dit pas plus sur ses intentions. Il élude toute question sur son éventuelle candidature en 2012… et attend toujours d’être fixé sur la date de son procès en appel dans l’affaire Clearstream. Nicolas Sarkozy avait promis de la pendre à un croc de boucher. En attendant, candidat ou pas, Villepin fera tout pour affaiblir le président sortant dans la course à l’Elysée.
Source: Josée Pochat, Valeurs Actuelles (23/09/2010)