Pascal Clément en avait tant rêvé qu’il fut, en mai 2005, comblé de se voir confier le ministère de la justice, ce lieu où pourtant, selon ses mots, « on s’en prend plein la gueule ». Son pronostic était bon.
Le successeur de Dominique Perben est arrivé après trois ans de réformes tous azimuts. M. Clément a dû conduire des réformes pensées par d’autres. Ce fut le cas, dans le domaine civil, pour celles des tutelles et des successions, et pour la loi de sauvegarde des entreprises. En matière pénale, la loi de programmation de 2002 avait décidé de l’augmentation des moyens pour cinq ans, programmé de nouvelles prisons, créé les juges de proximité voulus par Jacques Chirac et durci la justice des mineurs en créant notamment les centres éducatifs fermés. La loi sur la criminalité de mars 2004, traduction judiciaire des lois sur la sécurité, avait quant à elle renforcé les moyens des enquêteurs et des procureurs.
M. Clément a eu pour première tâche d’en corriger une disposition très contestée, en ce qu’elle facilitait la détention provisoire des avocats. Il a aussi dû reprendre la réforme promise dès 2004 par la précédente équipe pour répondre au fiasco d’Outreau. Il a abouti, début 2007, à un texte de compromis dont l’une des dispositions, portant sur la responsabilité des magistrats, a été censurée par le Conseil constitutionnel.
Quand, en 2005, puis en 2006, Nicolas Sarkozy a accusé les juges de « faute » et de « démission » devant la délinquance, c’est vers le président de la République que les plus hautes autorités judiciaires se sont tournées.
Sur la récidive, M. Clément a repoussé les peines planchers chères à M. Sarkozy mais avait appelé les députés à « prendre le risque de l’inconstitutionnalité ». Fait rarissime, il s’était fait rappeler à l’ordre par le président du Conseil constitutionnel, fin 2005 : « Le respect de la Constitution n’est pas un risque, mais un devoir », l’avait tancé Pierre Mazeaud.
Source: Nathalie Guibert (Le Monde)