Bercy n’aura réussi ni à Thierry Breton ni à Jean-François Copé. Nommé ministre de l’économie, des finances et de l’industrie le 25 février 2005, en remplacement d’Hervé Gaymard démissionné, Thierry Breton a quitté Bercy sans qu’on lui connaisse de projet d’avenir arrêté. Un retour dans le monde industriel pourrait le tenter et on l’a même soupçonné d’avoir manoeuvré pour se recaser à la tête d’entreprises privatisées. Il pourrait prendre un congé sabbatique de six mois.
A 52 ans, cet homme venu de la société civile, ingénieur diplômé de Supelec, écrivain de science-fiction à ses heures perdues, a alterné les responsabilités en entreprise – chez Bull, Thomson et France Télécom – et les postes plus politiques, comme la vice-présidence du conseil régional de Poitou-Charentes, avant d’être nommé à Bercy sous Jean-Pierre Raffarin. Proche de Jacques Chirac avec lequel il partage une passion pour le Japon, M. Breton a imposé dans ce ministère un style particulier, inaugurant des conférences de presse trimestrielles solennelles en présence de l’ensemble de ses directeurs d’administration centrale, le petit doigt sur la couture du pantalon.
M. Breton, qui aimait parler de lui-même à la troisième personne, croyait à la force du verbe en économie. Il a donc beaucoup parlé, mais été plus rarement entendu sur les dossiers sur lesquels il a planché, comme la taxation des super-bénéfices des groupes pétroliers ; l’ouverture du capital de Gaz de France et sa fusion, au point mort, avec Suez ; la réforme de l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF) ; les class actions, ce système qui permet à des actionnaires de se regrouper pour aller en justice.
En revanche, celui qui s’est présenté comme le croisé « anti-dette », pour reprendre le titre de son dernier livre, a fait oeuvre de pédagogie sur les finances publiques en commandant à Michel Pébereau, président de BNP Paribas, son fameux rapport sur la situation financière de la France.
Avec le concours de son ministre délégué au budget, Jean-François Copé, il a réussi en 2006 à inverser la tendance et à réduire la dette publique de 2,5 points à 63,7 % du produit intérieur brut (PIB).
Il fut aussi avec M. Copé l’artisan du tournant libéral de Dominique de Villepin en convainquant le premier ministre de la nécessité de simplifier et de baisser l’impôt sur le revenu et de créer un « bouclier fiscal », limitant à 60 % du revenu la somme des impôts directs, faute de pouvoir réformer l’ISF.
A 43 ans, M. Copé peut espérer retrouver un jour un ministère. Le maire UMP de Meaux (Seine-et-Marne), un des quadragénaires qui comptent de la majorité, a administré plus d’une fois la preuve de sa puissance de travail. Enarque, porté à l’autosatisfaction – « vous savez combien la modestie me coûte ! », avait-il avoué un jour dans un sourire à la commission des finances de l’Assemblée -, M. Copé a porté la réforme fiscale et modernisé l’Etat. Ce travailleur n’a pris que tardivement le virage du sarkozysme, contrairement à un autre « quadra », Xavier Bertrand, ministre de la santé. Rallié le 16 novembre au candidat Sarkozy avant d’en devenir l’un des porte-parole, M. Bertrand, qui a imposé l’interdiction de fumer dans les lieux publics, a, lui, obtenu un portefeuille.
Source: Claire Guélaud (Le Monde)