Jacques Chirac présidera son dernier Conseil des ministres le 9 mai. Dominique de Villepin démissionnera juste avant la passation de pouvoirs à l’Elysée. Dans les ministères, les secrétaires généraux assurent la « continuité républicaine ».
« Et pourtant, elle tourne. » En ces temps politiques agités, l’équipe gouvernementale sortante a pris « un rythme printanier », comme le dit en souriant un membre de cabinet ministériel. Elle n’en reste pas moins au travail pour encore quelques jours. Jusqu’à dimanche, les ministres peuvent prendre des décisions « normalement ». Ensuite, lorsque les Français auront choisi le nouveau président de la République, l’exécutif ne pourra plus qu’expédier les affaires courantes, selon la formule consacrée, même si, formellement, le gouvernement ne démissionnera pas au lendemain du second tour.
Ce n’est en effet qu’aux alentours du 16 mai, juste avant la passation de pouvoirs à l’Elysée, que Dominique de Villepin tirera sa révérence, ainsi que le veut un usage républicain remontant à la IIIe République. Un ultime Conseil des ministres sous la présidence de Jacques Chirac est d’ailleurs prévu mercredi prochain.
Cette semaine, donc, les cabinets ministériels font « les fonds de cuve », explique un responsable, « car le match ne s’arrête pas à la 88e minute ». Il leur faut répondre, encore et toujours, aux questions des parlementaires, notamment des sénateurs, dont le mandat ne s’arrête pas avec l’élection présidentielle. Et obtenir le feu vert du Conseil d’Etat sur les textes d’application des dernières lois du quinquennat votées au Parlement.
Une flopée de décrets
Bouclier social pour les microentreprises, statut militaire, baux agricoles, indemnités des directeurs d’école, droit opposable au logement, droits d’auteur sur Internet, validité des mariages… Une flopée de décrets sont dans les tuyaux, pour pouvoir être signés la semaine prochaine.
Par ailleurs, certains ministres restent sur la brèche lorsqu’ils traitent de sujets sensibles dont le calendrier leur échappe. Aux Affaires étrangères, Philippe Douste-Blazy est mobilisé par l’affaire des otages en Afghanistan, l’ultimatum des ravisseurs expirant samedi. Ce dossier donne lieu à une réunion quotidienne à Matignon.
A l’Agriculture, où l’on n’est jamais à l’abri d’une crise sanitaire, Dominique Bussereau se déclare très attentif au Conseil européen des ministres de l’Agriculture qui se tiendra lundi et mardi prochains à Bruxelles. Il craint un « coup de Jarnac » du commissaire Peter Mendelson à propos des négociations à l’OMC, compte tenu du flottement politique momentané à Paris.
Peu à peu, néanmoins, les cabinets se déplument et ce sont les secrétaires généraux des ministères qui assurent la continuité. Apparus récemment dans les organigrammes, ce sont eux qui préparent le fameux « dossier ministre » à remettre aux futurs détenteurs de portefeuille, document dans lequel on trouve une synthèse des dossiers de fond en cours, ainsi que des notes sur les « points de sensibilité » qui attendent une décision rapide.
« L’administration a une responsabilité particulière pendant ces périodes de transition républicaine », explique Dominique Antoine (Education nationale). « Dans cette configuration spéciale, on prend aussi le temps de réfléchir aux sujets structurants », observe Marie-Caroline Bonnet-Galzy (Cohésion sociale et Santé). « Il n’y a pas de montée en charge particulière », tempère Jean Bassères (Economie et Finances).
Dans certains cas pourtant, les secrétaires généraux sont très puissants : à l’Intérieur, Bernadette Malgorne occupe une fonction clef depuis que Nicolas Sarkozy a cédé son fauteuil à François Baroin et, à l’Equipement, Patrick Gandil est aux commandes depuis le départ du directeur de cabinet de Dominique Perben. Pour quelques jours seulement.
Source: Guillaume Delacroix (Les Echos)